Le groupe pharmaceutique avait été condamné devant la cour d'appel d'Orléans, il se refuse à verser les indemnités aux parties civiles.
L'image controversée du groupe pharmaceutique Sanofi n'est pas près de se lisser. Le 16 janvier, la firme a annoncé qu'elle refusait de contribuer à l'indemnisation des victimes de l'affaire Dépakine. Sollicité par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (Oniam) et ses premiers avis d'indemnisation, le groupe a déclaré ne pas pouvoir "donner suite".Depuis 1967, la Dépakine, un médicament antiépileptique aurait été responsable de malformations chez 2150 à 4100 enfants, et de troubles neuro-développementaux chez 16600 à 30400 enfants, selon des estimations de l'assurance maladie et de l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM).
Le groupe rejette la faute sur l'Etat
Fin 2017, la cour d'appel d'Orléans avait condamné Sanofi à verser quelque 3 millions d'euros aux parties civiles. Des indemnisations qui s'ajoutent aux solliciations de l'Oniam. Cette condamnation a été suivie d'un pourvoi en cassation du groupe.
Selon Sanofi, les avis de l'Oniam ne prendraient pas en compte "les preuves établissant que Sanofi a informé les autorités en toute transparence" sur les risques de la Dépakine pour les femmes enceintes, au fur et à mesure de l'avancée des connaissances scientifiques. Toujours selon le groupe, l'Etat aurait régulièrement rejeté, depuis les années 80, les demandes de Sanofi de mentionner dans la notice de la Dépakine les risques pour le foetus.
Mais Sanofi a pourtant choisi délibérément de continuer à distribuer ce traitement, alors même que tous les risques n'étaient pas indiqués aux utilisateurs.
Qui fera payer Sanofi ?
La décision du laboratoire a bien entendu choqué les victimes de la Dépakine. "Cette position du laboratoire était prévisible mais néanmoins scandaleuse. Contrairement à ce qu'affirme Sanofi, les procédures judiciaires et l'Oniam convergent pour retenir la responsabilité du laboratoire", a réagi Charles Joseph-Oudin, avocat de l'Apesac, l'association de victimes.
Dans ses premiers avis d'indemnisation, "l'Oniam a retenu la responsabilité de l'Etat à hauteur de 30% et celle de Sanofi à hauteur de 70%", donc "l'Oniam n'a pas mis la responsabilité de l'Etat sous le tapis" et celle-ci "ne dédouane pas le laboratoire de la sienne", selon maître Joseph-Oudin.
Le refus de Sanofi de payer ne va toutefois pas bloquer la prise en charge des victimes par l'Oniam, qui devra, de son côté, saisir la justice pour tenter de forcer la main au laboratoire.
"C'est inacceptable quand on demande autant d'efforts aux Français, ça va être derrière les contribuables qui vont payer", s'est aussi indignée Marine Martin, présidente de l'Apesac. L'association espère une pression du gouvernement sur le groupe pharmaceutique.