Ce mardi 8 février, le Cercil-Musée mémorial des enfants du Vel d'Hiv organise la diffusion du film d'animation "Où est Anne Frank!". L'occasion de revenir sur l'essentielle transmission de l'histoire, et du risque de la voir se répéter.
Dans la maison Anne Frank d'Amsterdam, lors d'une nuit d'orage au début des années 2020, un personnage de papier prend vie. Du journal intime de l'adolescente déportée et exterminée en 1945 s'extirpe Kitty, son amie imaginaire, à qui Anne Frank s'adressait page après page. Perdue entre le passé et le présent, Kitty va se mettre en quête de son amie, et de ce qu'elle représente. Avec une question en forme de cri, qui donne son titre à ce film d'animation : "Où est Anne Frank !"
A l'occasion des vacances scolaires, le Cercil-Musée mémorial des enfants du Vel d'Hiv organise ce 8 février à 15h30 au cinéma des Carmes d'Orléans la projection d'Où est Anne Frank !, sorti en décembre dernier. Il s'agit du dernier film d'animation d'Ari Folman, réalisateur israélien déjà à l'origine de Valse avec Bachir en 2008 et du Congrès en 2013.
Que nous dit Anne Frank du présent ?
Dans un contexte de franche libération de la parole révisionniste, le film ose "poser plus de questions qu'il ne donne de réponse", explique Florian Torres, responsable éditorial aux éditions du Typhon et vétéran de la médiation historique de la Shoah dans plusieurs institutions de France et d'Allemagne. Invité par le Cercil, il échangera avec le public orléanais suite à la projection du film.
La première de ces questions, poursuit l'éditeur, c'est "Est-ce qu'Anne Frank résonne encore avec notre présent, et qu'est-ce qu'on a à apprendre d'elle ?" Et au cours de ce "grand film, réalisé avec un talent fou", bien qu'un peu "didactique", Kitty va être confrontée à l'écart qui sépare les deux époques, mais aussi à ce qui les rapproche. Et en particulier l'injustice et la haine.
Quatre-vingts ans après la rafle du Vel d'Hiv, les derniers témoins s'éteignent, les termes ont changé, mais la tentation de désigner des boucs-émissaires est toujours là. La tentation d'édulcorer, voire de falsifier, cette réalité historique pour la rendre moins pénible également, quitte à l'oublier. Fin janvier, un collège conservateur du Tennessee a pris la décision de bannir Maus, le chef d'œuvre d'Art Spiegelman, au motif de propos et de représentation "inappropriés".
"Il y a toujours eu des procès assez odieux faits aux récits des rescapés, y compris au Journal d'Anne Frank", réagit Florian Torres. En réponse à ces contre-récits, l'éditeur ne croit pas spécialement à "la pédagogie de l'horreur" mais insiste sur le rôle de lieux de mémoire comme le musée loirétain.
Le Cercil, et beaucoup d'autres institutions, ont su continuer à travailler avec des chercheurs sans pour autant s'enfermer dans l'histoire pour l'histoire, mais en construisant un dialogue accessible à tout le monde. En ne tombant ni dans le débat de spécialiste, ni dans le discours purement pédagogisant.
Florian Torres, éditeur au Typhon
Programmé pendant les vacances scolaires, ce film d'animation pensé pour les enfants, conduira sans aucun doute à des conversations en famille sur ce qu'il reste d’Anne Frank aujourd’hui. Et peut-être à la lecture du "Journal d'Anne Frank".