Saint-Père-sur-Loire : quand la construction d'un bateau traditionnel de Loire fédère tout un village

C’est un projet aux multiples atouts : éducatif, participatif et surtout intergénérationnel. Depuis fin 2018 à Saint-Père-sur-Loire (Loiret), des écoliers et des mariniers construisent ensemble un fûtreau de Loire pour faire revivre leur port. Une belle aventure collective et solidaire.
 

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L’idée a germé dans la tête d’un marinier… Pour finalement éclore dans une cour de récré ! Depuis l’automne 2018, l’école Victor Meunier constitue l’écrin d’un superbe projet coopératif made in Saint-Père-sur-Loire (Loiret). L'équipe d'Ensemble c'est Mieux a d'ailleurs repris le chemin de l'école en décembre dernier pour rencontrer ses protagonistes, lors d'une froide et belle journée d'automne.
 


Pour découvrir cette incroyable aventure, il faut passer la grille d’entrée, s’assurer que le drapeau blanc et bleu des « Brasse-Bouillon » flotte dans les airs, s’engouffrer le long du bâtiment de la garderie et rejoindre l’immense chapiteau blanc installé au bout du terrain.

Sur place, pas de doute possible. Les scies électriques, les ponceuses et autres marteaux indiquent clairement qu’un chantier de construction est en cours.
 

Première fois

Équipés de leurs vareuses bleu vif, répartis à l’intérieur et tout autour du bateau, les mariniers s’affairent. Ils sont tous bénévoles, tous novices. Ensemble, ils ont décidé de fabriquer de leurs mains et pour la première fois de leur vie un fûtreau de Loire.

La mise à l’eau est d’ailleurs prévue au début de l’été. Et grâce à ce bateau traditionnel, c’est le port de Saint-Père-sur-Loire qui va renaître. "Entre Saint-Benoît-sur-Loire et Gien, sur 36 kilomètres, il n'y a pas de bateau sur le fleuve. Donc l'idée, c'était de faire revivre ce patrimoine", explique Eric Orcin, initiateur du projet et chef de bande des Brasse-Bouillon.
 
 

1,6 tonne et 11 mètres de long


Pour donner vie à leur rêve, les mariniers viennent travailler chaque mardi et chaque jeudi, quelles que soient les conditions climatiques. Côté matière première, ils sont allés dans le Morvan voisin récupérer des planches de pin Douglas qu'il a fallu faire sécher pendant trois mois.

Au fil du temps, le bateau a pris forme pour atteindre 11 mètres de long et 1,6 tonne. "Ici, on construit les bateaux à l'envers par rapport aux bateaux de mer... On fait d'abord la coque et on met la structure ensuite", détaille Eric.
"Au début, on voyait les planches s'accumuler et le bateau prenait un centimètre par jour", commente Marion, élève de CM2. Et d'ajouter :

C'est rare d'avoir un bateau qui se construit sous nos yeux, dans une école... On a de la chance !


Aux premières loges

Rare certes, mais fascinant pour les élèves de l’école Victor Meunier qui passent régulièrement suivre l’avancement du chantier. Ils en sont d’ailleurs partie prenante, avec un rôle clairement défini : suivre, relater, documenter la fabrication du fûtreau à la façon d’apprentis journalistes.
"On vient voir le chantier tous les mardis et jeudis et on rapporte tous les détails de l'avancement du fûtreau dans notre livre et sur notre site internet", explique Anaïs, élève de CM2.

Mais d’autres responsabilités jalonnent leur quotidien : trouver le nom du bateau, imaginer le blason du girouet pour qu’il soit reconnaissable par le plus grand nombre, et parfois mettre la main à la pâte.

"L'été dernier, il a fallu arroser le bateau parce qu'avec la canicule, il faisait chaud et le bois du bateau risquait de craquer", raconte Mohamed, lui aussi en CM2. 
 

Faire coopérer tout un village… et au-delà

"Ce sera leur bateau, celui des enfants", affirme Eric Orcin, avec surement, dans un petit coin de sa tête, l’idée d’initier tous ces jeunes à la défense du patrimoine ligérien. Et par la même occasion, au nécessaire renouvellement des générations de mariniers.

Et pour s’assurer que tout le monde s’implique, les parents, les habitants de Saint-Père et les sept associations que compte la commune sont également intégrés au projet.

Côté financement, là aussi, de nombreux protagonistes locaux ont mis la main à la poche quand d’autres ont fait le choix d’aider différemment.
 
 

Cap sur la Saint-Péroise


C’est le cas de l’ESAT des Râteliers d’Amilly (Loiret), structure d’accueil pour personnes en situation de handicap. Connu dans la région pour sa brasserie artisanale et sa Bell’ de Loing, l’ESAT a réalisé une cuvée spéciale, la Saint-Péroise, dont l’intégralité des bénéfices de la vente (5€ la bouteille de 75cl) revient aux Brasse-Bouillon.

Dernier soutien de poids, la communauté des mariniers dont les connaissances techniques peuvent s’avérer très utiles pour des néophytes de la construction de bateau.

Réussite collective


Pour juger du succès de cette initiative, il faudra encore patienter un peu. Mais l’école Victor Meunier, adepte de l’enseignement coopératif, est une habituée des projets participatifs.
Et son directeur, Rémi Bedu, savoure déjà : "Là, on a du vrai. En tant que journalistes, les élèves ont matière à faire des écrits intéressants.

On écrit en vrai, on apprend en vrai, on parle en vrai.

Ce chantier, il est idéal pour ça car avec le côté intergénérationnel, ils apprennent à parler à toutes les générations !"

Confiné sur le dos !



A l'heure où nous nous replongeons dans cette rencontre, le chantier vit au ralenti. Le 12 mars dernier, juste avant les premières mesures de confinement, les mariniers ont procédé au retournement du fûtreau.

Et depuis ? "Le fûtreau est confiné sur le dos", sourit Eric. "Au regard de la situation sanitaire, le chantier est en activité ralentie et individuelle. A ce jour, la mise à l'eau est maintenue au 27 juin, mais la complexité de cette sortie de crise modifiera peut-être le calendrier. Nous nous adapterons aux décisions et obligations de façon pragmatique et responsable". 

Si la vie reprend normalement, la mise à l’eau interviendra au terme du grand spectacle de fin d’année de l’école. 
 

Retrouvez un extrait de notre passage sur le chantier de Saint-Père-sur-Loire :
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