"Le lacérateur" : sur les traces de l'artiste Jacques Villeglé en Corse

Plasticien et peintre français, Jacques Villeglé est de ces "Nouveaux Réalistes" qui ont fait entrer la rue dans les musées. Arracheur d'affiches depuis 1949, il réalisa le dernier de ses ravissements français à Bastia, en 2001. Un document inédit de 95 minutes le restitue aujourd'hui.

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Depuis 1949, Jacques Villeglé collecte des affiches de rue. Collées, empilées, lacérées au rythme de la vie urbaine, ces affiches sont ensuite décollées par l'artiste qui les expose dans les plus grands musées du monde. 

Né à Quimper en 1926, Villeglé, diplômé des beaux-arts de Rennes, est vite décrit comme un "releveur de traces de civilisation", pour reprendre la belle formule de Walter Benjamin. Ces traces, il les veut anonymes et lacérées, arachées à la rue comme des preuves du temps passé, au travers des agrafes et des coups de pinceau. "Ravir" plutôt que "faire".

Bio-bibliographie de Jacques Villeglé établie par Documents d'Artistes Bretagne



Des rapts de lacérés anonymes

De Cologne en 1965 à Los Angeles en 1993, les déambulations de Jacques Villeglé ne cessent d'élargir l'espace-temps de sa quête du Lacéré anonyme, entamée à Paris dans les années 1950. Pour l'artiste qui ne cesse de croire aux "génies collectifs de l'anonymat", la présence du Lacéré anonyme est universelle.

La lacération transforme les mots, transforme les images comme une écriture automatique
- Jacques Villeglé




En 1991, à l'initiative de la région Nord-Pas-de-Calais, ses premières expositions décentralisatrices sont organisées à Lille et à Douai.

En 1997, le "flâneur urbain" des rues de Paris crée, chez l'éditeur Yves di Folco, les Ateliers d’Aquitaine, un atelier itinérant qui lui permet de franchir les frontières de la région parisienne.

L'itinérance conduit l’artiste à un retour sur ces terres natales : avenue de Verdun, Saint-Malo et Concarneau. Et plus au nord encore à Anvers et au Luxembourg.

"De la veine" à Bastia

En janvier 2001, Jacques Villeglé est invité par le Fond régional d'art contemporain de Corse pour l'exposition Décentralisation 3 à Corte.

En France, c'est son dernier "décroûtage" de la "comédie urbaine". Il en dira qu'il a eu "de la veine", tout étant "prêt à être exposer tel quel". Le seul autre qu'il réalisera encore après l'expérience, physiquement éprouvante, menée en Corse, aura lieu à Buenos Aires en Argentine en 2003, "comme une sorte de couronnement" dira Villeglé, invité du Centre Cultural Recoleta.

En Corse, en janvier 2001, 13 affiches seront récoltées dont 11 aussitôt présentées, sans marouflage, à Corte.

Ravissement. Jouissance. Le documentaire de 95 minutes réalisé par Jean-Pierre Duntze et Jean Crozier restitue les trois journées de Jacques Villeglé en Corse. Depuis douze ans, il était resté inédit.




 



95 précieuses minutes dans l'océan du web
En janvier 2001, avec Jean-Pierre Duntze - rappelle le journaliste Jean Crozier, co-réalisateur du documentaire "Décentralisation 3"  exclusivement destiné au web -  nous avons eu une chance inouïe. Jacques Villeglé  nous a accordé le privilège de le suivre durant tout le temps de l'opération Décentralisation 3 que le FRAC, le Fond Régional d'Art Contemporain, sous la direction d'Anne Alessandri, accueillait en Corse. 

Durant trois journées, en privilégiant les plans séquences, Jean-Pierre Duntze à la caméra et Christophe Mac Daniel à la prise de son  assurent un remarquable et  patient  travail  qui permet, comme le ferait une live camera intelligente, d'écouter-voir le plasticien à l'oeuvre, en action et dans la durée.

Enfin, grâce au challenge que relève Frédérick Baudet, notre regretté chef-monteur, nous avons pu tenir le défi de mettre en ligne tous les matins le montage, réalisé durant la nuit, de l'événement de la veille et ce durant trois jours pleins. Et le jour même du vernissage, Jacques Villeglé  découvre qu'il existe désormais, en ligne sur Internet, un film d'une heure trente cinq minutes sur son intervention en Corse.

Nous étions tous très fiers d'avoir pu réaliser ce petit exploit multimédia avec les moyens d'un simple reportage. C'était une première pour l'Internet d'en Corse. Nous avions reproduit le rythme de Dziga Vertov qui en 1920 projetait  dans les villages russes les images tournées la veille. Nous gardions en même temps la mémoire immédiate  d'un événement comme Jacques Tati avait pu le faire à Bastia le 28 avril 1978 lors la finale de la coupe de l’UEFA. La destination, exclusivement web, avait rendu l'expérience possible.

Ce document est resté  disponible en ligne dans son intégralité durant le temps de l'exposition présentée par le FRAC à Corte: du 25  janvier jusqu'au 10 mars 2001.
Depuis, l'expérience était restée inédite.

Elle est à présent, grâce à cette nouvelle mise en ligne sur le portail de France 3 Corse-Via Stella, à la disposition de tous les internautes.

Dans l'océan du web -conclut Jean Crozier- ces 95 minutes sont précieuses: elles permettent  d'écouter-voir un flâneur ravissant.
C'est rare et nous nous devions de rendre ainsi hommage à Jacques Villeglé pour ces traces de civilisation qu'il nous révèle depuis plus de soixante ans maintenant.
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