200 ans après, des cavaliers de la Garde impériale - des figurants fous de reconstitutions napoléonniennes - partiront dimanche des rives de Golfe-Juan, dans les Alpes-Maritimes, pour rallier en sept jours Grenoble (Isère), sur les pas de l'empereur Napoléon 1er revenant de son exil à l'île d'Elbe.
Le 26 février 1815, après 10 mois d'exil, Napoleon 1er s'évadait de l'île d'Elbe pour rejoindre la France et tenter de reconquérir le pouvoir. L'épopée des 100 jours de reconquête allait débuter. Des passionnés venus de toute l'Europe ont décider de rejouer en costume d'époque le départ d'Italie de l'Empereur.
Reportage d'Anne-Charlise Lambard, Steven Picharant, Nathalie Aibar
La "Route Napoléon" sera jalonnée en 2015 de deux cents événements. Elle fut en 1932, la première route touristique créée en France, traversant deux régions et quatre départements, avec ses plaques historiques et statues marquant le bref passage de l'Empereur, un jour méditant sur un banc, un autre attablé à une auberge ou dormant dans un château.
"Les trois quarts du temps nous serons sur les chemins empruntés par Napoléon, un retour en arrière de deux siècles", se délecte par avance Bernard Symzack, éleveur de chevaux dans la Nièvre, bientôt colonel Jerzmanowski armé d'une lance et coiffé d'une "czapka" typiquement polonaise. Il s'est aussi laissé pousser d'énormes rouflaquettes, qui vont s'épaissir d'ici les fastueuses commémorations belges, en juin, de la bataille de Waterloo.
Pas question de suivre la route moderne asphaltée mais des chemins ancestraux foulés aussi par les Romains.
"Les vraies étapes aux vraies dates"
Le 1er mars 1815, Napoléon, revenu sur le sol français pour reconquérir son trône après dix mois d'exil sur l'île d'Elbe, arriva par la mer sur la plage de pêcheurs de Golfe-Juan, avec un millier de fantassins et une centaine de cavaliers de ce fidèle régiment polonais... Après un bivouac à Cannes, le cortège partit à l'aube pour une première étape de 57 kilomètres. Un parcours périlleux destiné à éviter la Provence royaliste.Seuls des purs-sangs arabes, très endurants, "peuvent tenir" sur ce trajet montagneux, souligne le commandant des cavaliers. "Nous avons privilégié non pas la quantité de cavaliers, mais la concision historique, en réalisant les vraies étapes aux vraies dates".
Une façon de rendre hommage à "ces braves fantassins qui l'ont fait à pied et ont dû en baver sur ces petits chemins de muletiers escarpés et parfois enneigés".
Une mule chargée d'or bascula d'ailleurs un jour dans un ravin. "Les lanciers étaient néanmoins très bien reçus par la population qui souvent les hébergeait. Rien de comparable avec la retraite de Russie, où les gens étaient agressés, avaient faim et froid!"
Le 3 mars, les lanciers polonais seront par exemple conviés à Barrême (Alpes-de-Haute Provence) à un "souper de Napoléon et des grognards de l'Empire", menu servi en 1815.
Une quarantaine de communes des Alpes-Maritimes, Alpes-de-Haute-Provence, Hautes-Alpes et d'Isère ont multiplié les initiatives au sein de l'association Action nationale des élus pour la Route Napoléon (ANERN).
Expositions napoléoniennes, films, spectacles, conférences, visites guidées anecdotiques sur les pas de l'Aigle, randonnées, repas gastronomiques. Un parfum et une liqueur "Napoléon 2015" verront aussi le jour.
Sans oublier plusieurs reconstitutions historiques, comme celle de Laffrey (Isère) avec des figurants de sept pays européens, le 7 mars, lieu de la première confrontation entre Napoléon et des soldats de Louis XVIII venus de Grenoble.
"Soldats me reconnnaissez-vous? S'il en est un parmi vous qui veuille tuer son Empereur, me voici", lança Napoléon, accueilli par un grand cri de ralliement.
"Là se décida le sort de l'entreprise la plus romanesque et la plus belle des temps modernes", jugea Stendhal, fervent admirateur.
Napoléon fit son retour triomphal à Paris le 20 mars, rejoint en chemin par d'autres soldats nostalgiques: il reprit le pouvoir pour "Cent jours" jusqu'à son ultime défaite à Waterloo. "Une fois de plus, la France se donna à lui comme une belle fille à un lancier", écrivit Balzac.