Après avoir été présenté à Cannes en mai dernier, "Le Royaume" a été projeté en avant-première dans plusieurs salles de l'île ce week-end. Ce dimanche, l'équipe du film était notamment à Propriano, la région d'où est originaire le réalisateur, Julien Colonna.
Présenté à Cannes lors du dernier festival, "Le Royaume" a été projeté en avant-première dans plusieurs salles de l'île ce week-end. L'occasion pour les insulaires de découvrir le premier long-métrage réalisé par Julien Colonna et tourné en Corse, notamment dans la microrégion du Valinco d'où est originaire le réalisateur.
Projeté devant une salle comble, le film, qui sortira le 30 octobre dans l'île et le 13 novembre sur le continent, a visiblement conquis le public proprianais.
Le reportage de Sylvie Wolinsky et Stéphane Poli :
À l'issue de la séance, le réalisateur Julien Colonna a livré ses impressions et est revenu sur l'histoire du film à notre micro.
France 3 Corse : Bastia, Corte, Ajaccio, Lecci... Pendant trois jours, vous avez présenté le film dans différents cinémas de l'île. Ce dimanche, vous étiez au cinéma à Propriano, sur les bords du golfe du Valinco, la région d'où vous êtes originaire. Comment avez-vous vécu cette projection ?
Julien Colonna : C’est toujours très émouvant de montrer une œuvre chez soi, qui est évidemment intime. Au-delà du fait que ce soit chez moi, elle a été tournée en grande majorité dans le Valinco, avec des gens dans cette salle qui ont été pour certains les chevilles ouvrières aussi de la fabrication de ce film. Ce sont des gens qui nous ont beaucoup aidés, parfois d'un point de vue logistique, parfois d'un point de vue artistique, d'un point de vue technique. Beaucoup de gens ont donné de leur temps, de leur énergie, de leur amour pour ce film. Et sans eux, il n'existerait pas de la manière dont il a été fabriqué. C’était vraiment un énorme plaisir d’être là aujourd'hui.
Le scénario du film a été coécrit avec Jeanne Herry. Comment est né "Le Royaume" ?
Les premières étincelles de l'histoire sont nées il y a à peu près six ans, quand ma femme m’a annoncé qu'elle était enceinte. Je me suis évidemment demandé quel enfant j'allais avoir, quel genre de papa j'allais tenter d'être et, inévitablement, j'ai pensé à l'enfant que j'avais été, aux parents que j'avais eus. Un souvenir assez prégnant de l'enfance est alors remonté à la surface.
Je devais avoir peut-être une dizaine d'années et j'étais dans un campement en bord de mer, un peu le même que celui que l’on voit dans le film. J'étais accompagné de mon père, d'amis à lui. On dormait à la belle étoile, on pêchait toute la journée, on mangeait notre pêche, on racontait des histoires. C’était la belle vie, la vie sauvage. Des années plus tard, j’ai appris que cette petite escapade nature avait été d'un tout autre enjeu, on va dire, pour lui. Et de là, avec ce souvenir en mémoire, j'ai pensé que l'histoire d'un père et d'une fille qui le temps d'une cavale qui tournait mal pouvait apprendre à se connaître, à se comprendre et à s'aimer, pouvait être intéressante. Tout a donc commencé comme ça.
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Vous êtes le fils de Jean-Jé Colonna, décédé en 2006 et considéré comme le "dernier parrain corse”. Avez-vous tenu à ce que ce soit une fiction ou il y a quand même une partie de vous-même dans ce scénario ?
Il y a toujours une partie de soi-même quand on fait un film, surtout un premier film. Je crois que quand on fait de l'art, il faut que ce soit intime. Quand c’est intime, c’est cathartique et c’est donc évidemment personnel. Après, la relation filiale est évidemment très proche de celle que moi j'ai pu vivre avec mes parents. J'ai puisé dans un contexte connu pour y trouver la véracité nécessaire pour avoir le film le plus réaliste qui soit ; non pas réaliste dans les faits de ce qui s'est passé ou de certaines personnes qui auraient pu exister, mais réaliste dans les trajets de vie, dans les trajets émotionnels. L'histoire dans "Le royaume" personne peut vous dire l'avoir vécue, ni moi ni personne en Corse. C’est une pure fiction qu'on a voulu écrire avec Jeanne Herry, et j'insiste souvent là-dessus.
Vous avez réalisé un premier film dans l'île avec des acteurs corses, plus particulièrement des amateurs. Cela n'a-t-il pas été trop compliqué ?
Déjà, faire un film, c’est compliqué. Mais faire des films quand on cherche un casting sauvage, c'est chercher une aiguille dans une botte de foin. Et ça a été un parcours très long avec un casting qui a duré plus de huit mois dans toute la Corse, piloté par différentes directrices de casting. Ça a aussi été un parcours financier parce qu’il faut produire aujourd'hui un film basé sur des inconnus. D'autant plus un premier film.
Il a donc fallu convaincre aussi nos producteurs et les partenaires que c'était la bonne direction artistique, que l'âme du film se situait là. Et, au fur à mesure du casting, on a pu aussi avoir des arguments. Le premier était bien sûr Ghjuvanna Benedetti, qui incarne donc notre héroïne principale. On l’a trouvée somme toute assez rapidement entre guillemets, c'est-à-dire au bout de quelques mois. Il restait à trouver le père, ce qui a été le plus compliqué, en la personne de Saveriu Santucci. Cela nous a donné un peu de fil à retordre, mais au bout de huit mois, on y est arrivé. On a réussi à convaincre tout le monde avec ce casting-là et que c’était la bonne direction à prendre.
