Une famille ajaccienne fait face depuis quelques semaines à ces insectes suceurs de sang, dont la présence chez soi peut avoir de graves conséquences. On vous en dit plus sur ce parasite qui fait un retour remarqué dans le quotidien des Français.
"Après le premier traitement chimique, quand je suis revenue dans l'appartement, je n'ai pas dormi pendant trois jours. Toutes les demi-heures je me relevais, et je passais les pièces au crible".
Anna et son fils, Jimmy, vivent dans la hantise, depuis un mois et demi. Cet été, ils ont eu la désagréable surprise d'être, à leur tour, victimes d'une invasion de punaises de lit. "Il y en avait partout. Sur le lit, il y en avait des millions !" raconte Anna, locataire d'un immeuble des Salines.
Inhabitable
Depuis, comme il est d'usage, un deuxième traitement chimique a été effectué, et aujourd'hui, la mère et son fils font un nouveau passage dans leur appartement, afin de faire un point de la situation.
J'ai tout jeté
Anna
Le lieu est inhabitable. Très peu de meubles, plus de lits, tout a été jeté. Seuls vestiges de leur vie à l'intérieur de ces murs, des sacs, à même le sol, où ont été entassés leurs vêtements. "J'ai pris peur, quand j'ai découvert les punaises. Je suis allé sur internet, pour voir les protections efficaces, et j'ai lu que les punaises ne traversaient pas les sacs en plastique... C'est tout ce qui me reste." Au sol, çà et là, on aperçoit des cadavres de punaises de lit, de la taille d'une lentille.
Dans l'air flotte une odeur agressive, laissée par le traitement. Pour autant, Anna et son fils ne comptent pas revenir de sitôt dans l'appartement. Selon eux, rien ne garantit que l'endroit soit désormais sûr. "Elles se cachent partout, il y en avait derrière les plinthes, qui ont été arrachées... Quand on a soulevé le parquet, il y en a des milliers qui sont sorties !"
Au début j'étais dans un hôtel, à mes frais. On s'arrange comme on peut.
Anna
Anna a multiplié les démarches pour être relogée dans un autre appartement, mais on lui a répondu qu'il n'y en avait pas de disponible. Alors depuis des semaines, Anna et Jimmy passent d'un hébergement à l'autre. "Au début, j'étais à l'hôtel, à mes frais", raconte Anna. "Mais financièrement c'est devenu compliqué. J’ai dormi chez un ami un soir ou deux, et désormais, c'est mon frère qui nous héberge. On est cinq chez lui, il n'y a pas vraiment d'intimité... On s'arrange comme on peut..."
Anna en est persuadée, la désinfection de son appartement ne suffira pas à régler le problème. "C'est comme si on ne faisait rien. Il y en a dans les escaliers communs, dans l'ascenseur... C'est tout l'immeuble qu'il faut désinfecter".
Le propriétaire des lieux, Erilia, assure avoir lancé un diagnostic global, dont le résultat sera connu dans quelques jours.
La punaise de lit, un fléau de retour
Anna et Jimmy sont loin d'être les seuls à être confrontés à ce problème. Selon un rapport de l'Anses, l'agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, "plus d'un foyer sur dix a été infesté par des punaises de lit entre 2017 et 2022". Sur la même période, 1,4 milliard d'euros a été dépensé, un France, pour lutter contre ce que les scientifiques appellent la cimex lectularius.
La punaise de lit, c'était un fléau que l'on croyait cantonné aux romans d'une autre époque, aux chambres d'internat de Pagnol, et aux auberges à cochers de Victor Hugo. Depuis la fin de la seconde guerre mondiale, avec l'arrivée des insecticides et des machines à laver, la présence de ce parasite dans les foyers, les hôpitaux et les hôtels semblait très anecdotique.
Pourtant, depuis le début du XXIe siècle, la punaise de lit signe son grand retour dans le quotidien des Français. Dernière preuve, très médiatisée, en date : la présence de punaises de lit dans les cinémas parisiens, il y a quelques jours.
Plus d'un foyer sur dix a été infesté par des punaises de lit entre 2017 et 2022
Anses
Les raisons sont multiples, mais deux principales se dégagent, selon l'Anses : une résistance de plus en plus importante aux insecticides, et le fait que l'on voyage de plus en plus, de plus en plus loin, de plus en plus souvent, et de plus en plus facilement... La punaise de lit ne saute pas, ne vole pas, elle s'accroche à l'humain, dont elle suce le sang. Une plus grande mobilité favorise donc sa prolifération, d'autant qu'elle peut pondre jusqu'à 500 œufs par jour.
Que faire ?
Les insecticides disponibles en magasin ne sont pas suffisamment efficaces. Mais quelques moyens permettent néanmoins d'agir sans attendre.
D'abord, laver ses vêtements à une température minimale de 60 degrés. La vapeur est également un moyen de les déloger, et on peut faire un premier passage dans son appartement avec un nettoyeur vapeur à au moins 100 degrés. Enfin, les petits objets ou le linge délicat peuvent être placés dans un congélateur, à - 20 degrés, pendant au minimum 72 heures. Il est fortement conseillé de ne pas nettoyer à la vapeur les canapés ou lits infectés, mais de les jeter.
Pour autant, cela ne suffira pas. Les punaises de lit se cachent dans la journée, dans les canalisations, dans les prises électriques, dans les interstices des cadres ou des tableaux, dans les ourlets des rideaux ou à l'intérieur des livres... Il y a quelques semaines, en Corse, une première société de détection de punaises de lit, à l'aide de chiens, a vu le jour.
Revoyez notre reportage télé :