Le face-à-face entre E. Macron et M. Le Pen révèle des fractures dans les territoires entre villes et zones périurbaines ou rurales. Et parmi les quatre régions françaises dites à forte identité, le vote en Corse reste peu comparable.
Le vote peut s’avérer très révélateur des lieux d’habitation des votants. En mauve pour Emmanuel Macron, en marron pour Marine Le Pen, cette carte donne les suffrages des deux vainqueurs du 1er tour.
Le Nord-Est vote plus facilement Le Pen que l'Ouest. Et ce partage recouvre les résultats des régions dites à forte identité. A l'Ouest, la Bretagne comme le Pays basque font gagner Emmanuel Macron entre 27 et 29% des suffrages et rejettent Marine Le Pen en 4e position.
C'est l'inverse avec l'Alsace et la Corse. Marine Le Pen est en tête et Emmanuel Macron loin derrière, particulièrement sur l’île. En Alsace, le Front national et ses élus locaux s'inscrivent dans le paysage depuis 1994.
« Il y a en Alsace, surtout dans les zones périurbaines, un sentiment identitaire, une culture alsacienne toujours présente. Et on remarque que depuis très longtemps, le vote Front national est fort là où l’affirmation culturelle alsacienne, notamment en Alsace du Nord par exemple, est très forte. De là à dire qu’il y a une corrélation, je crois malgré tout que la situation est plus complexe. Le vote Front national en Alsace est un vote plutôt populiste qu’un vote d’extrême-droite et donc, nous avons cette opposition entre les élites de Paris, des villes et le peuple de la campagne sur lequel le Front national joue beaucoup », explique Philippe Breton, sociologue à l’université de Strasbourg.
Car si on applique à notre première carte les densités de population, les résultats prennent du relief. Partout, les villes votent plutôt Emmanuel Macron tandis qu'espaces périurbains ou ruraux votent plutôt Marine Le Pen.
Sauf en Corse ! Contrairement, aux villes de même dimension d'Alsace, de Bretagne ou du Pays basque, les deux capitales régionales affichent 30% en faveur de la candidate du Front national.
« Peut-être qu’il faut rechercher dans la relation d’une partie de la société corse à l’Etat central. Ce n’est peut-être pas le même type de demande d’autonomie que ce que l’on peut avoir en Alsace, au Pays basque et en Bretagne », pense Jacques Levy, professeur à École polytechnique fédérale de Lausanne.
Des questions comme autant de pistes de réflexion ou d'hypothèses pour des évolutions politiques lentes et complexes. D'autant qu'elles épousent des modifications sociologiques qui sont, en Corse, très peu étudiées.