Archéologie et biologie marine : plongée dans les eaux profondes du Cap Corse

Une mission d'exploration franco-italienne du Drassm a fouillé les épaves de navires qui dorment au large du Cap Corse. Une expédition riche en enseignements archéologiques comme en biologie marine, pour laquelle un point a été tenu ce samedi 8 juillet.

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Ce sont, à bien des égards, des trésors des fonds marins pour les archéologues comme les biologistes marins. Pendant deux semaines, les épaves enfouies dans les eaux profondes du Cap Corse ont été étudiées, dans le cadre d'une mission d'exploration pilotée par le département de recherches archéologiques subaquatiques et sous-marine de Méditerranée du ministère de la Culture (Drassm).

Une expédition menée à bord de l'Alfred Merlin, le bateau du Drassm, regroupant archéologues, biologistes, marins, et même membres du parc naturel marin du Cap Corse, et pour laquelle a été tenu un premier compte rendu, ce samedi 8 juillet.

"Nous travaillons au Cap Corse depuis plusieurs années, en particulier sur des épaves qui se trouvent à de très grandes profondeurs, c’est-à-dire au-delà de 200 mètres", détaille Franca Cibecchini, adjointe au directeur pour l'archéologie préventive et programmée, et responsable du littoral corse au sein du Drassm.

Les explorations sont réalisées à l'aide de robots, plutôt qu'avec des plongeurs. Reliées par un grand câble au navire du Drassm, les machines peuvent ainsi retransmettre des images en direct des épaves, enfouies à parfois "200, 300 ou 500 mètres de profondeur", poursuit Franca Cibecchini. Des vidéos riches en enseignements : "Dans le cadre de cette mission, nous avons expertisé deux nouveaux sites que nous ne connaissions pas."

Des trésors archéologiques

Les épaves sont étudiées selon "deux points de vue", précise-t-elle. Un point de vue archéologique, d'abord, "pour voir de quel type de site il s'agit, et son époque" : "Nous avons pu déterminer qu'une des deux épaves est celle d'un navire d'époque romaine, où nous avons trouvé plusieurs amphores, l'autre, un navire d'époque contemporaine, où nous voyons notamment les ancres, la vaisselle utilisée à bord..."

Des vestiges du passé qui témoignent du "rôle très important que la Corse, et le Cap Corse en particulier, a eu dans la navigation depuis l'antiquité, jusqu'à l'époque moderne et contemporaine", souligne Franca Cibecchini.

"Il faut imaginer la Corse alors comme une sorte de carrefour qui relie le Sud de la Méditérranée au Nord de la Méditérranée occidentale, indique-t-elle. Cette péninsule italique, toutes les populations s'y sont succédé, les Etrusques, les Osques, les Romains, vers la Gaule en particulier, mais aussi vers l'Espagne. C'était vraiment le couloir commercial le plus important de la Méditérranée."

Une faune peu connue à documenter

Autre point d'étude : la biologie marine, pour déterminer "quelles sont les espèces qui colonisent ces types de récifs marins très particuliers." "Nous sommes amenés à regarder la faune qui occupe ces épaves, qui les utilise comme un habitat", raconte Nadine Le Bris, professeur à la Sorbonne Université spécialiste écologie des grandes profondeurs, et participante à cette mission d'exploration.

Des informations particulièrement précieuses, quand ces espèces restent aujourd'hui encore "relativement peu connues et documentées". Une façon, aussi, pour les chercheurs de constater l'augmentation des températures des eaux en Méditerranée, qui peuvent atteindre 13 à 14 degrés à 300, voire 400 mètres de profondeur.

"Il y a un réel changement, note Nadine Le Bris. Et on s'interroge sur la capacité des espèces à dépasser leur limite de tolérance des hautes températures, d'autant plus que l'oxygène est relativement appauvri dans ces eaux profondes."

La spécialiste se dit "préoccupée par le devenir de ces écosystèmes, qui sont peu connus mais jouent un rôle important au niveau régional, en termes de biodiversité comme de patrimoine, et qu'on pourrait perdre avant même d'avoir pu les décrire totalement."

D'où tout l'intérêt, donc, de la tenue de ces missions d'explorations.

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