La boutargue est aussi appelée le caviar bastiais. Elle est fabriquée avec des œufs de mulet séchés et salés. Les pêcheurs sont pourtant de moins en moins nombreux à la travailler, car la ressource se fait rare. À tel point qu'elle devient insuffisante pour satisfaire le seul marché insulaire.
Dans un marécage proche de l’embouchure du Golu, Jean-Louis remonte ses premiers filets. Après quelques minutes d’attente, la première prise : un mulet de belle taille.
Ce qui intéresse le pêcheur se trouve à l’intérieur du poisson. Car ce sont les œufs du mulet qui serviront à confectionner la boutargue. En Corse, seuls cinq pêcheurs professionnels travaillent encore le mulet. En cause : la ressource qui s’amenuise.
Le problème pourrait pourtant être résolu grâce à l’élevage. « Dans un plan d’eau comme celui-là, qui est très profond, qui a donc le potentiel nécessaire pour accueillir pas mal de mulets, on pourrait éventuellement nourrir ces poissons et créer de la boutargue, sans aucun souci. Mais ça ne serait plus de la boutargue naturelle. Et pour ceux qui achètent de la boutargue chez les pêcheurs locaux… Ils savent ce qu’ils achètent, ils savent que c’est fait de manière naturelle et identitaire », explique Jean-Louis Guaitella, patron pêcheur.
Ce produit d’exception a un prix : entre 130 euros et 150 euros le kilo. La clientèle des pêcheurs est donc triée sur le volet et la production est insuffisante pour alimenter le marché insulaire.
Importations
Pour satisfaire la demande, une seule solution : l’importation de matière première. C’est l’option qu’a choisie José Balardi.
Cet été, il a ouvert une boutique spécialisée à Bastia ainsi que le premier laboratoire de transformation de Corse. « On achète les boutargues chez de grandes entreprises, qui elles, achètent chez des pêcheurs. Elles sont toutes certifiées. On a notre réseau de grossistes qui achètent et revendent le produit brut. Nous, on peut l’acheter congelé ou frais en grosse quantité », indique José Balardi, transformateur et commerçant.
Les œufs arrivent de Sardaigne, de Grèce ou d’Espagne. José et sa femme prennent ensuite les choses en main : salaison, rinçage, séchage. Le prix reste abordable. Pour un kilo de cette boutargue, il faut compter entre 85 euros et 95 euros.