Samedi 9 octobre à 18 heures, l'autrice espagnole sera l'invitée du festival bastiais. Elle recevra le prix Ulysse pour l'ensemble de son œuvre. Une œuvre attachante et peuplée de fantômes, qui aborde les questions les plus douloureuses avec autant d'intelligence que d'esprit.
"Ecrire est une magie puissante, et un livre est un organisme vivant qui me surprend souvent moi-même", confiait Rosa Montero à L'Express en 2017. C'est un juste retour des choses, pour l'une des autrices les plus surprenantes du monde de l'édition hispanique...
La frange longue et indisciplinée, les tatouages qu'elle arbore, le collier coloré, l'œil perpétuellement mutin. Lorsqu'on rencontre Rosa Montero, on comprend vite qu'avec la septuagénaire madrilène, on est plus du côté de chez Patti Smith ou Agnès Varda que dans le salon de Camille Laurens. Mais la suprise ne s'arrête pas là.
Maestria
L'œuvre de Rosa Montero est foisonnante. La romancière n'a peur de rien. Et s'empare avec gourmandise des genres et des thèmes les plus divers, pour les faire siens. Avec La chair, le désir et le sexe chez les femmes de plus de soixante ans. Avec L'idée de ne plus jamais te revoir, Marie Curie, le deuil et l'absence. Avec La fille du cannibale, le roman initiatique mâtiné de thriller. Avec la trilogie de Bruna Husky (Des larmes sous la pluie, Le poids du cœur, Le temps de la haine) , l'anticipation et le cyberpunk...
Alors lorsqu'on a ouvert La bonne chance, le dernier roman de Rosa Montero, publié en septembre aux éditions Métailié, on s'attendait une nouvelle fois à tout. Et on n'a pas été déçu. Un architecte, en route pour Malaga, traverse Pozonegro, un village oublié du temps, et abandonné par ses habitants. La plupart des commerces ont mis la clé sous la porte, et les volets des maisons sont clos. Sur l'une d'elles, un panneau "à vendre" retient l'attention de Pablo Hernando. Le quinquagénaire, honorable et sans histoires, va acheter l'appartement en ruine, sans même le visiter. Et s'y terrer, coupant tout lien avec le monde. Pourquoi ?
L'idée de départ de La bonne chance est aussi originale qu'enthousiasmante.
La suite est à la hauteur. Ses proches s'inquiètent, la police se lance à sa recherche, et Rosa Montero va tisser avec maestria une toile dans laquelle le lecteur va s'empêtrer avec délice.
"L'art inégalable de saisir ses personnages à un moment-clé de leur vie"
La bonne chance est une raison supplémentaire de saluer le très judicieux choix d'Arte Mare de remettre le prix Ulysse 2021 pour l'ensemble de son œuvre à l'autrice espagnole. Le festival, sous la plume de François-Michel Durazzo, souligne "l’art inégalable (qu'a Rosa Montero) de saisir ses personnages à un moment-clé de leur vie où tout peut basculer, ou la quête de sens – qui pourrait être celle de chacun d’entre nous – s’impose brutalement avec une urgence incontrôlable. Elle les saisit sur cette frontière de la quarantaine où l’univers se recompose, où les cartes sont rebattues, quand nous pensions savoir qui nous sommes".
Rosa Montero sera demain à 18 heures à la bibliothèque municipale de Bastia pour une rencontre avec les lectrices et les lecteurs insulaires.