Gilles Simeoni a gagné dimanche 30 mars les élections municipales à Bastia, en battant nettement le candidat de gauche Jean Zuccarelli. Le candidat nationaliste a obtenu 55,4% des voix contre 44,6% à Jean Zuccarelli, qui conduisait une liste PRG-PCF.
Premier maire nationaliste d'une grande ville corse, l'avocat Gilles Simeoni, 46 ans, est un militant passionné prônant le dialogue et l'ouverture pour la défense de l'île, de son peuple, son patrimoine, sa langue et sa culture.
"Mon père ne m'a pas fait d'autre legs que son engagement pour la Corse", aime à rappeler le fils du patriarche du nationalisme insulaire, Edmond Simeoni, figure emblématique du renouveau du mouvement national depuis la fin des années 1960.
Tombeur de la dynastie Zuccarelli, du nom du maire sortant Emile Zuccarelli, auquel son fils Jean a tenté de succéder à la mairie tenue par la famille depuis plus d'un siècle, Gilles Simeoni s'est souvent vu reprocher sa filiation par ses adversaires. Athlétique et souriant, ce grand sportif élancé et élégant, père de trois enfants, très attentif aux autres rappelle encore n'avoir eu "droit pour héritage qu'aux visites au parloir de la prison de la Santé" durant son adolescence.
Son père, médecin et fondateur, en 1967, de l'Action régionaliste corse, avait été incarcéré à Paris après sa condamnation à 5 ans de prison par la cour de sûreté de l'Etat pour l'occupation, en 1976, d'une cave viticole à Aleria dont les propriétaires pieds-noirs étaient accusés de malversations. Cette opération fut l'acte fondateur du nationalisme contemporain.
Né le 20 avril 1967, Gilles Simeoni baigna donc tout jeune dans une ambiance militante, avec un oncle, Max, frère d'Edmond et médecin comme lui, également emprisonné pour ses idées nationalistes, et une mère, dentiste d'origine alsacienne, ancienne communiste. Etudiant en droit et en sciences politiques à Corte et Aix-en-Provence et militant au syndicat des étudiants corses, le nouveau maire de Bastia est titulaire d'une maîtrise de droit et d'un doctorat de sciences politiques.
Contre le clanisme et le clientélisme
Ses études achevées, il s'installe comme avocat à Bastia. Il défendra notamment Yvan Colonna, condamné à perpétuité pour l'assassinat du préfet Claude Erignac. Engagé dans le mouvement national, Gilles Simeoni se prononce rapidement contre la violence politique et pour la démocratie et vivra difficilement la guerre fratricide entre factions nationalistes du milieu des années 1990. Homme de dialogue et de consensus, partisan d'un "nationalisme d'ouverture", ce passionné de sports (boxe, course en montagne, football) et de littérature, se présente aux élections législatives en 2007.
Pourfendeur du clientélisme et du clanisme, tant à droite qu'à gauche, qui a mis la Corse en coupe réglée depuis des siècles, il créée la surprise en 2008, en arrivant deuxième avec 25% des voix aux municipales à Bastia, faisant entrer cinq nationalistes à la mairie.
Deux ans plus tard, il prend la tête d'une coalition de plusieurs plusieurs partis opposés à l'action armée clandestine qualifiée de nationaliste modérée, Femu a Corsica (Faisons la Corse) qui obtient onze sièges (sur 51) à l'Assemblée de Corse.
Labourant inlassablement le terrain bastiais ces dernières années, il a de nouveau pratiqué l'ouverture en ralliant au second tour des municipales les deux candidats de gauche et de droite arrivés derrière lui au premier tour pour faire tomber la citadelle bastiaise, fief des radicaux de gauche et des communistes depuis presque cinquante ans.