Mobilisation contre l’antisémitisme à Bastia : « J’ai l’impression que les Juifs européens ne sont à leur place nulle part. »

Ce dimanche 12 novembre, alors qu’une marche contre l’antisémitisme est organisée à Paris, une mobilisation s’est tenue à Bastia à l’initiative de l’association de maires de Haute-Corse. Des participants témoignent.

Ils ont été près de 200, ce dimanche 12 novembre, à se rassembler à l’appel de l’association des maires de Haute-Corse pour dire non à l’antisémitisme devant la préfecture du département. Une mobilisation organisée en écho à la marche contre l’antisémitisme lancée, ce jour, par le président du Sénat, Gérard Larcher, et la présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, à Paris.

Car depuis le 7 octobre, date de l’attaque du Hamas contre Israël, et la guerre déclenchée par l’état hébreu contre l’organisation terroriste, les actes antisémites se multiplient en France. Si, pour l’heure, l’île semble épargner par ces actes, certains participants au rassemblement bastiais sont inquiets. Ils ont témoigné au micro de France 3 Corse ViaStella.

"Je suis inquiète de l'indifférence générale"

Participante de confession juive : "C’est important pour moi parce qu’il s’agit d’émettre un signal très fort concernant la montée d’antisémitisme qui sévit aujourd’hui sur le territoire français. A priori, il semblerait que les actes antisémites ne soient pas recensés ici, particulièrement compte tenu d’une histoire qui tend à préserver et à soutenir le peuple juif. Il semblerait d’un point de vue factuel qu’il n’y ait pas d’actes antisémites recensés aujourd’hui en Corse.

Je suis membre de la communauté juive, ici, je me sens en sécurité, mais je ne me sens pas forcément à ma place. Par les temps qui courent, j’ai l’impression que les Juifs européens ne sont à leur place nulle part. C’est un sentiment que je n’avais pas vraiment à l’esprit il y a quelques semaines et aujourd’hui, c’est quelque chose qui est dans un coin de ma tête. Ça me questionne, ça m’inquiète. Il semblerait qu’en Corse, on soit un peu plus à l’abri, mais d’un point de vue général, je dirais que je suis inquiète de l’indifférence générale."

"Les gens ont la mémoire courte"

Participante, ancienne professeure d'histoire : "C’est important, car on oublie trop vite le passé. Et lorsque je vois ces symboles juifs plaqués sur le mur des maisons, je me dis que les gens ont la mémoire courte. Ça, c’est fait avant, pour que ça ne se refasse pas, même si on n’a pas beaucoup de moyens pour agir, il faut au moins être là et manifester son goût pour la démocratie.

En Corse, pour le moment, on est un petit peu préservé de tout ça. La communauté juive est installée depuis des siècles, la communauté musulmane est plus récente, mais pour le moment, il n’y a pas de problème majeur par rapport à ce qu’on voit sur le continent. Je pense que ça peut s’aggraver sur le continent, dans les grandes agglomérations, mais moins ici. Ce n’est pas dans les petites villes et dans les villages que l’on va faire preuve d’antisémitisme. Mais il faut quand même rester vigilant. J’aurais agi de la même façon si sur des maisons musulmanes, je voyais un croissant, ce serait pareil."

"Ne pas avoir à se mobiliser après... Quand c'est trop tard"

Participant : "Nous sommes ici pour manifester notre solidarité envers les personnes qui peuvent être agressées à cause de leur religion ou de leur origine. De nos jours, c’est intolérable. Je pense qu’en Corse, on est préservé, mais comme toujours, on reçoit les choses un peu plus tard. Donc il vaut mieux se mobiliser avant que d’avoir à se mobiliser après… Quand c’est trop tard. Il faut faire sentir que la population n’accepte pas ce genre de comportement."

"La Corse restera fidèle à ses valeurs"

Participant : "Nous sommes venus parce que c’est un moment d’unité nationale. Nous ne pouvons pas être à Paris donc on a trouvé tout naturel de venir au rassemblement bastiais. On vient de San-Gavino-d’Ampugnani, et on est descendu spécialement pour cette mobilisation.

La Corse fait partie des départements Justes, pendant la Seconde Guerre mondiale, il n’y a pas eu de dénonciations de Juifs et là, j’ai entendu dire qu’il n’y avait pas eu d’actes antisémites depuis le 7 octobre. Je pense que la Corse restera fidèle à ses valeurs d’accueil et d’intégration.