Aux assises de Haute-Corse, le procès pour meurtre de Thomas Hiblot, accusé d'avoir tué son frère d'un tir de fusil harpon en septembre 2022 à Lucciana, se poursuit, ce jeudi 13 juin. Une journée qui a commencé de façon peu commune avec le transport de la Cour sur les lieux, suivi de l'interrogatoire de l'accusé. Ses avocats devraient plaider la légitime défense.
L'image est rare. Dans un bus ce jeudi matin, trois magistrats professionnels, six jurés titulaires et un remplaçant : la Cour d'assises de Bastia au grand complet.
S'ils viennent au camping L'Esperanza, c'est pour voir de leurs yeux la scène du crime qu'ils jugent en ce moment, à défaut de reconstitution pendant l'instruction.
Un déplacement sous haute surveillance. Dans le camping, l'accusé est présent lui aussi et désigne du doigt, à la demande du président ou des jurés, les positions des uns et des autres ce soir-là.
La séquence n'a duré qu'une dizaine de minutes mais a permis de mettre un cadre pour mieux appréhender les auditions des témoins et l'interrogatoire de l'accusé.
Enchaînement effréné des évènements
Tout a commencé dans le chalet principal des parents. C'est là que, d'après les témoignages, Mathieu Hiblot, la victime, est d'abord venu pour s'en prendre à sa mère, puis à son beau-père.
Il aura fallu l'intervention musclée de trois personnes, dont son frère Thomas, pour réussir à le neutraliser. Mathieu Hiblot, escorté par un client du camping, se rendra ensuite dans son bungalow.
Dans le bungalow voisin, Thomas ira chercher son fusil à harpon pour, dira-t-il ensuite, “le dissuader” car, affirme l'accusé, “j'avais peur qu'il aille chercher un couteau et qu'il massacre tout le monde”.
Devant la Cour, l'accusé racontera l'enchaînement effréné des événements, sa panique quand il a vu son frère revenir vers son bungalow et s'en prendre à sa femme, sa course, ses cris et le tir mortel dans la foulée, assure-t-il, “pour que ça s'arrête”.
C'était un tir volontaire, oui, mais instinctif.
Thomas Hiblot, l'accusé.
“De la légitime défense”, assure Thomas Hiblot, car il pensait que son frère avait un couteau. Les constatations montreront qu'il n'était pas armé. Au Président qui lui demande s'il pense que sa réaction était proportionnée à l'attaque, il répond : “Aujourd'hui, évidemment que non. Mais à l'époque, j'étais persuadé qu'il avait un couteau”.
“La véritable question, la plus importante, ça n'est pas de savoir si oui ou non l'agresseur, le frère de mon client, avait un couteau, estime Maître Emmanuel Maestrini, l'avocat de la défense. Mais c'est de savoir : Thomas Hiblot pouvait-il raisonnablement ou non croire que son frère était armé d'un couteau ? Et c'est cette question-là que ce que devra se poser le jury populaire.”
Dans le box, Thomas Hiblot assume : “C'était un tir volontaire, oui, mais instinctif”. Il assure qu'il n'a pas visé. “J'aurais aimé réfléchir deux secondes de plus, trente secondes de plus, répète l'accusé. Mais aujourd'hui encore, je comprends pourquoi j'ai agi comme ça. J'ai cru qu'il allait tuer ma femme.”
L'avocat général prendra ses réquisitions vendredi matin.
Le récit de Maia Graziani et Guillaume Leonetti :