Depuis 2007, la pêche à l’anguille est soumise à une réglementation européenne drastique. Le but est d’éviter son extinction. Conséquence : seuls neuf pêcheurs corses ont obtenu une licence. Ils subissent la concurrence de plein fouet sur le marché local.
Comme presque tous les jours depuis 26 ans, Laurent Briançon vient visiter ses nasses à anguilles. Il en possède 60, toutes postées sur l'étang de Biguglia.
Poisson atypique et migrateur, l'anguille se pêche selon une technique bien particulière. « Le poisson, en général, bute vers la terre, longe le filet et entre dans le cœur. Ensuite, il y en a qui s’échappent quand même. C’est une pêche très durable. Le poisson reste vivant à l’intérieur de la nasse, et on sélectionne ce que l’on veut prendre et ce que l’on ne veut pas prendre », explique le pêcheur.
Depuis 2007, et pour éviter l'extinction de l'espèce, la pêche à l'anguille est soumise à une réglementation européenne très stricte. En Corse, seuls neuf licences ont été accordées.
Obligés d’exporter
Malgré cet encadrement drastique, les professionnels subissent la concurrence de plein fouet sur le marché local.
« Le marché est très tendu, il y a eu beaucoup d’anguilles du continent, et beaucoup d’anguilles d’élevage sur le marché. Cette année, pour une espèce en voie de disparition, il y a des quantités de pêche astronomiques. De ce fait, on a de grandes difficultés à vendre notre production », complète Laurent Briançon.
Pour survivre, les pêcheurs doivent exporter la quasi-totalité de leurs anguilles vers l'Italie et la Sardaigne. Une situation à laquelle le pêcheur espère remédier.
Transformer un modèle économique
Première étape : reconquérir les consommateurs locaux. Pour cela, il faut prendre la direction du marché de noël de Bastia.
Grillées, en persillade ou même fumée, toutes les recettes sont bonnes pour faire découvrir l'anguille. « Elles sont excellentes. C’est un produit que l’on trouve assez rarement dans le commerce et quand on en a l’occasion, je pense qu’il faut en profiter », indique un client.
Sur le marché, Laurent Briançon n'est pas le seul à militer pour le développement de la pêche à l'anguille. Au-delà de la filière, c'est tout un modèle économique que Gérard Romiti ambitionne de transformer. « Il faut que le pêcheur gère son entreprise comme une petite PME [petite et moyenne entreprise] et qu’il gère à 360 degrés. Il pêche, il transforme et il revend », souligne-t-il.
Pour valoriser la pêche corse et lutter contre l'importation, Laurent Briançon et ses confrères ont un projet : créer un écolabel et construire un laboratoire de transformation.