Journée internationale des droits de la Femme : le CIDFF, en première ligne du combat depuis des années

Le CIDFF est un centre d'accueil où l'on tente d'apporter des solutions aux femmes et aux familles dans le besoin. Un combat quotidien que nous racontent Francine Grilli, Dominique Muglioni et Angeline Castel Franceschini, du CIDFF de Haute-Corse, à l'occasion de la journée des droits de la femme. 

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"J'ai encore reçu un SMS..."
Dominique Muglioni derrière son bureau, brandit son téléphone. Francine Grilli, qui fait couler un thé dans la salle de réunion, secoue la tête, un sourire navré sur les lèvres. "Ca n'arrête pas. C'est toujours comme ça, à cette période de l'année"

Le message réceptionné par Dominique, la conseillère juridique du CIDFF, vient d'une grande enseigne de magasins de sport. Il annonce, à grands coups de points d'exclamation, que, à l'occasion de la journée de la femme, elle bénéficiera d'une remise de 20 % sur ses achats, comme toutes les clientes qui se présenteront au magasin.

"Et au supermarché du coin, on a droit aux affiches "offrez des fleurs pour la journée de la femme"... Ca me choque". Dominique Muglioni soupire, et jette le portable sur tas de dossiers.

Ils veulent réduire çà à un argument commercial de plus.

Francine Grilli

"Ils veulent réduire cette journée à un argument commercial de plus. Et puis c'est aussi une manière détournée de noyer le poisson, enchérit Francine Grilli, la directrice du Centre d'Information des Droits des Femmes et des Familles de Haute-Corse. C'est pour cela que, il y a quelques années, le nom de la journée a été changé. Ce n'est plus la journée des Femmes, mais la journée internationale des droits des femmes."
Apparemment, cela n'a pas suffi à convaincre les grandes marques de lever le pied...

Dossier de presse de la journée des droits de la femme en Corse, dimanche 7 mars

500 à 600 personnes par an

Dans les locaux exigus du CIDFF, acollés à l'école Amadei, à Lupinu, elles sont trois, du matin au soir, à tenter de répondre aux interrogations, aux peurs et aux angoisses des 500 à 600 personnes qui viennent frapper à leur porte chaque année. 

Des femmes, dans leur immense majorité. Même si Dominique, Francine et Angeline Castel-Franceschini, la coordinatrice sociale qui a rejoint l'équipe en janvier dernier, prennent soin de préciser, dès que possible, qu'elles sont avant tout à l'écoute de familles, femmes, hommes et enfants.

Dans l'esprit des gens, le CIDFF est associé aux femmes battues.

Francine Grilli

Leurs domaines d'expertise, le divorce, le droit du travail, le droit de la famille, le droit pénal. Mais, la plupart du temps, c'est pour des cas de violences domestiques que l'on fait appel à elles. 
Francine Grilli se tourne et nous montre une affiche jaunie par les ans, punaisée au mur :

"Au CIDFF, dans l'esprit des gens, on est associées aux femmes battues. Vous voyez, le numéro vert sur cette affiche ? On l'a mis en place en 1994. Pour que les femmes victimes de violences aient quelqu'un à qui parler. Et puis on a étoffé nos aides année après année. On est étiquetées comme cela, et c'est très bien. Les victimes savent à qui s'adresser. Mais il ne faut pas que cela dissimule les autres domaines dans lesquels on peut accompagner les femmes..."

Ecouter, et accompagner

Le centre d'information des droits des femmes et des familles de Lupinu fait partie de la fédération nationale, qui réunit 103 centres. Un dans chaque département. La structure est sous l'égide du ministère du travail, qui est en charge de la question du droit des femmes. 

Les trois femmes reçoivent, écoutent, conseillent, informent, et tentent d'accompagner les personnes en détresse. "Nous devons faire en sorte qu'elles aient, au moment de faire leur choix, toutes les cartes en main pour prendre leur décision. Quelles connaissent les dispositifs d'aide, les structures, tout l'éventail des possibilités qui s'offrent à elles et que, trop souvent, elles ignorent", explique Dominique Miglioni. 

Et puis, pour le ministère, le réseau des CIDFF est un vrai baromètre. "Un observatoire des problèmes auxquels sont confrontées les femmes. On fait remonter les données que l'on collecte, régulièrement, sur les réalités locales", complète Francine Grilli.

Parler, oui. Mais pas avec n'importe qui

 Les centres tels que celui de Haute-Corse sont en première ligne, depuis des décennies pour mener le combat de l'égalité hommes-femmes. Et ils ont longtemps mené ce combat dans l'ombre, alors que l'opinion publique et les politiques s'en désintéressaient. Aujourd'hui, la question occupe la Une des médias en permanence, et agite régulièrement internet, à travers #Metoo ou #Iwas.

Etaler sa vie sur les réseaux sociaux, c'est risqué.

Dominique Muglioni

Le signe d'une prise de conscience, certes, mais pour les trois responsables du CIDFF de Corse, c'est plus compliqué que cela. Francine Gilli y voit une avancée : "qu'aujourd'hui on ne soit plus les seules à tirer le signal d'alarme, c'est une très bonne chose. La rue s'en est emparé, et ça aide à la prise de parole. Les femmes se rendent compte qu'elles ne sont pas seules, et que d'autres sont passées par là. La domination masculine, qui régit les rapports depuis une éternité, a éclaté au grand jour". 

Dominque Muglioni, elle, est plus nuancée."Le problème, c'est qu'il faut parler, mais pas n'importe comment, et avec n'importe qui. Etaler sa vie sur les réseaux sociaux, c'est risqué, et cela peut avoir des conséquences à moyen terme, psychologiquement..."

La bonne volonté ne suffit pas

Parler, mais pas n'importe comment, pas avec n'importe qui. C'est le message que martèlent régulièrement Francine, Dominique et Angeline. Et qui ne concerne pas uniquement les réseaux sociaux...

"C'est un vrai métier, d'aider les femmes en détresse. Un métier qui s'apprend, et qui réclame du professionnalisme. Les associations de bénévoles qui voient le jour depuis quelques années, pour nous, c'est une catastrophe. Elles sont pleines de bonne volonté, elles veulent bien faire, mais la bonne volonté, ça ne suffit pas", confie Francine. 

Angeline Castel-Franceschini abonde dans son sens : "Ici, on aide à l'intérieur d'un cadre, de protocoles, il y a tout un circuit pour accompagner au mieux la personne. Les lois changent en permanence, les dispositifs évoluent. Nous, on est là pour ça, et on sait faire. Ca ne s'improvise pas. La fédération nationale délivre un agrément triennal aux centres départementaux. Il faut faire ses preuves, suivre des formations en permanence..."

"On ne peut pas tout faire à la place des victimes qui viennent nous voir, comme le pensent certaines associations. On doit pour notre part informer, et susciter un déclic, mais c'est une démarche personnelle. On ne doit pas les brusquer, leur dire de faire cela ou cela, et que cela va s'arranger. C'est un processus intime. Nous, on se contente d'accompagner. Et ça peut prendre des années", conclut Dominique. 

Mais Francine Grilli, Angeline Castel-Franceschini et Dominique Muglioni ont tout le temps qu'il faudra. Elles ont depuis longtemps choisi de dédier une grande part de leur vie à ce combat. 

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