En dix ans, huit femmes ont été tuées en Corse par leurs compagnons, maris ou ex conjoints. Des chiffres qui nous rappellent que l'île ne fait pas exception en la matière et se situe dans les statistiques nationales.
Des noms qui reflètent la diversité de la Corse, des âges qui n'abritent personne, des meurtres, des assassinats en ville au pied d'un immeuble ou dans l'intimité d'une maison isolée.
Dans nos archives, il faut le dire imprécises, remonte en dix ans, le souvenir de huit femmes abattues, étranglées, ou frappées à mort par leur ex-compagnon ou leur mari.
Pour Joanna Tavera, 25 ans l'effroi marque la marche blanche de cette fin d'été 2010. Car à l'isolement, à la violence extrême des actes, se mêle l'indifférence. Le père de l'assassin habitait dans la même maison que le jeune couple, à l'étage en dessous.
« Paul-Roch Martini, dans la journée du 21 septembre 2010, a violé Joanna Tavera et il l’a battue à mort. Il fallait une vérité dans ce dossier. Nous attendions quelques mots de lui, nous ne les avons pas eus », indiquait alors Jean Michel Mariaggi, avocat de la partie civile en février 2014 lors du procès. L'ex-compagnon, 28 ans, est condamné à 20 ans de prison.
« Il faudra peut-être que je meure pour qu’on me prenne au sérieux »
Six ans plus tard la deuxième marche blanche de la décennie se met en mouvement pour Savannah. Même jeunesse, coups mortels aussi, et contexte équivalent d'absence de signalement ou de plainte précédant le crime.
« C’est quelque chose à ne pas oublier, surtout pour les femmes qui sont victimes de violences, ça permet de faire évoluer les choses », estimait un homme dans la foule. Et bien, non, ça n'évolue pas. Même la présence d'enfants scolarisés dans les couples n'ont pas permis de déceler des alertes. C'est le cas pour Jennifer Grante ou pour Beata Majewski.
Comme à Porto-Vecchio, Kadijah El Amraoui, dont le corps reste introuvable 7 ans après les faits. Elle, semble être la seule dans cette liste et la première à avoir porté plainte pour violences conjugales, juste avant d'être étranglée par son mari.
Dix ans après, ce n'est pas une plainte, mais plusieurs qu'avait porté Julie Douib à l'encontre de son ex-compagnon, père de ses deux enfants, qui la tue froidement de deux balles. « Julie m’avait dit : ‘Je m’inquiète parce qu’on ne me prend pas au sérieux, il faudra peut-être que je meure pour qu’on me prenne au sérieux.’ Voilà où on en est aujourd’hui », livre Etiennette Salducci, élue de la communauté de communes d'Ile Rousse - Balagne le 3 mars dernier.
De l'effroi, on est passé à la sourde colère qui met en cause la protection des institutions quand les femmes prennent la parole.