Désirs d'état de droit en Corse

Les réactions se multiplient dans l'île après les différents appels au sursaut collectif

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Valls: Colère des notaires corses

Manuel Valls a évoqué les notaires et les professionnels de l'immobilier "muets" selon le ministre sur des "pratiques à caractère mafieux". Maître Alain Spadoni se dit scandalisé par ces mots du représentant du gouvernement.

Les récents propos du ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, ne laissent personne indifférent en Corse. Comme l'utilisation par le chef du gouvernement du mot mafia, toujours absent du droit français.

Corse: l'indispensable sursaut...Tel était le titre du rapport de la commission d'enquête parlementaire adopté  à l'unanimité le 2 septembre 1998 par les députés à l'Assemblée nationale. Quatorze ans et de  lourdes séries d'assassinats plus tard, les divers appels au sursaut collectif dont celui lancé par Manuel Valls et Christiane Taubira le 15 novembre dernier, suscitent de nombreuses et diverses réactions.

Si les notaires sont en colère, des militants associatifs, des policiers, des animateurs de club politique entrent à leur tour dans le débat et de manière parfois originale ainsi que le fait  Pierre-Laurent Santelli sur le site de l'association U Levante.

Le gouvernemet doit regagner la confiance

Le club politique corse Gauche autonomiste a apporté lundi son soutien au gouvernement, "qui a pris la mesure de la gravité de la situation" dans l'île, l'exhortant à regagner "la confiance perdue dans l'action de l'Etat". "Nous sommes confiants dans la volonté du gouvernement de traduire dans les faits la politique annoncée, mais nous sommes aussi conscients de la volonté de ceux qui ont profité largement de l'impunité de la contrecarrer", a déclaré lors d'une conférence de presse à Ajaccio Vincent Carlotti, animateur de ce club et membre du parti socialiste. Il a appelé à "reprendre la confiance perdue dans l'action de l'Etat et dans sa capacité à faire que la Corse cesse d'être une zone de non droit". Dénonçant "ceux qui donnent aujourd'hui de la Corse une image sanglante, qui en pillent ses richesses et qui vivent en parasites sur le corps social", il a appelé l'Etat à "mettre au pas cette infime minorité". Ancien maire d'Aléria (Haute-Corse), M. Carlotti a notamment suggéré de "taper au portefeuille" en vérifiant, par exemple, comment, dans certaines localités, ont été achetés par dizaines de très onéreux véhicules haut de gamme. Mais il a ajouté que "la défiance envers l'autorité (qui) habite le corps social insulaire", s'explique notamment après avoir vu "un préfet de la République se comporter comme les criminels qu'il était venu traquer". Il faisait allusion au préfet Bernard Bonnet nommé par Jean-Pierre Chevènement dans l'île après l'assassinat en 1998 du préfet Claude Erignac et qui fut écroué et jugé après avoir ordonné à des gendarmes d'incendier clandestinement des établissements de plage. "L'action de l'Etat", a donc ajouté M. Carlotti, "doit prendre garde à ce que (les Corses) puissent se sentir stigmatisés. Ils attendent de lui qu'il les protège et les soutienne dans ce qui est, dans notre société de proximité, une épreuve collective". Il a souligné qu'une "minorité" craint "une remise en ordre" de la société insulaire car "elle dérange les plans qu'elle a établis pour mettre notre île en coupe réglée et engranger de juteux bénéfices." (Source: AFP)

FO Police: insuffisant renforcement des effectifs

Le syndicat Unité SGP Force ouvrière a dénoncé lundi les mesures de renforcement des effectifs policiers en Corse annoncés récemment par le gouvernement, estimant ne pas avoir les moyens de conduire les missions de protection des citoyens. Ce syndicat a dénoncé, dans un communiqué signé du secrétaire pour la Corse-du-Sud, Raphaël Vallet, des "mesures placebos et exclusivement comptables". "Alors que notre ministre (de l'Intérieur Manuel Valls, ndlr) vient d'affirmer que nous représentons (en Corse, ndlr) 20% en termes de règlements de comptes sur le plan national, le nombre de policiers en Corse chargés de lutter contre la criminalité organisée ne représente pas 20% des effectifs nationaux", a ajouté M. Vallet. Le 22 octobre, après l'assassinat de l'avocat Antoine Sollacaro, le gouvernement avait annoncé un "renforcement des moyens d'enquête spécialisés", avec notamment l'affectation à la gendarmerie nationale de Corse de 14 fonctionnaires de police judiciaire spécialisés dans la lutte contre la délinquance économique et financière. Le Groupement d'intervention régional doit lui être renforcé de quatre personnes et la Coordination des services de sécurité intérieure en Corse d'un fonctionnaire spécialisé dans l'enquête financière. Le syndicat a dénoncé ces "mesures prises dans un temps médiatique par l'administration parisienne et sans la moindre concertation", sans tenir compte "des propositions que nous lui formulons depuis de nombreux mois". Unité SGP Force ouvrière a annoncé qu'elle déposerait "les nombreuses boîtes d'armes que nous ont confiées nos collègues en signe de protestation" et "une liste d'officiers de police judiciaire demandant le retrait de leurs habilitations", lors de la nouvelle visite de M. Valls en Corse prévue la semaine prochaine.(Source: AFP)

U Levante dénonce les activités criminelles

Un membre d'une association corse de défense de l'environnement ayant déjà obtenu des annulations de permis de construire illégaux a publié lundi un texte humoristique à l'attention du ministre de l'Intérieur Manuel Valls, qui la semaine dernière avait exhorté les insulaires à dénoncer les activités criminelles.

"Il avait raison Valls, les Corses doivent coopérer si on veut sortir de cette spirale mortifère. On a tous une responsabilité dans la situation actuelle et si on se tait, on est complice. Car on sait tout. Ou presque", a écrit Pierre-Laurent Santelli sur le site internet de l'association U Levante.

"Je les connais (...) ceux qui achètent et attendent. Ceux qui achètent puis déclassent, ou font déclasser, par centaines d'hectares des pans entiers de collines au dessus d'un golfe aux eaux limpides pour les rendre constructibles, les faisant passer de maquis pour les sangliers à des lots à deux millions d'euros. Je sais qu'il suffit d'un simple trait de crayon sur un zonage (...) baguette magique transformant la terre en or", a écrit M. Santelli. Et l'auteur du texte de dénoncer "ceux qui montent des SCI pour y implanter de pharaoniques projets immobiliers (...) dont l'évocation des noms des gérants fait frémir. Ceux qui construisent des villas qui ruissellent jusqu'au bord de l'eau, sur l'inaliénable domaine public". Se demandant ironiquement comment il avait pu "se taire si longtemps", il a encore mentionné "ceux qui confisquent les plages, "murdeberlinnisent", privatisent des criques, construisent des ports privés, tendent des câbles d'acier pour empêcher quiconque d'accoster, font détourner les sentiers littoraux (et) rampent à présent jusqu'à l'intérieur des terres". "Je connaissais les causes de cette fameuse dérive mafieuse, les rouages, comment se fabriquaient les profits colossaux, comment se lessivait l'argent sale, les noms", a ajouté M. Santelli. Aussi, a-t-il précisé s'adresser directement à M. Valls, "parce qu'aux administrations responsables, aux différents préfets s'étant succédés sur l'île, aux différents ministres l'ayant précédé, c'était déjà fait". La cour d'appel administrative de Marseille a confirmé le 8 novembre un jugement du tribunal administratif de Bastia annulant un permis de construire accordé illégalement pour un lotissement de résidences secondaires sur le littoral du village de Patrimonio (Haute-Corse), dénoncé depuis des années par U Levante et une autre association, Le Poulpe.(Source: AFP)

Des guerres en Corse ?

Des chercheurs indépendants, peu nombreux en France, travaillent au décryptage des séries d'assassinats  en Corse, depuis 2006 tout particuliérement. C'est le cas du chercheur Thierry Colombié, auteur de La French Connection, les entreprises criminelles en France. Il livre, ce 20 novembre, sur son blog, une hypothèse  autour des récents assassinats en Corse: une guerre de sécession entre des côteries trafiquantes et la consolidation d'un système apparemment très éclaté mais qui ressemble à s'y méprendre à une matrice politico-mafieuse (sic).

Son article qui souligne également l'importance pour l'île du Programme Exceptionnel d'Investissements (PEI), s'intitule Des guerres en Corse, sans point d'interrogation.

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