Dans sa dernière note de conjoncture, l’INSEE dresse le bilan économique de l’impact de la crise sanitaire en Corse. Et même si l’île a retrouvé un second souffle après la première vague, elle demeure la région la plus impactée économiquement par le Covid-19.
Ce que dit la note de l'INSEE
"Au troisième trimestre 2020, l’économie corse retrouve un second souffle après la première vague épidémique", explique l’INSEE, chiffres à l’appui. L’emploi a retrouvé des couleurs au troisième trimestre après une première vague destructrice, et "se redresse plus rapidement qu’en moyenne nationale (+ 4,4 % contre 1,6 %)."
Le retour de l'emploi s’explique notamment par la reprise de l’activité touristique, mais ne compense pas deux premiers trimestres désastreux. “Sur un an, l’emploi insulaire paye le prix fort de la crise sanitaire, il diminue de 2,3 % alors que la baisse est trois fois moindre au niveau national avec - 0,8 %."
Logiquement, les chômeurs ont ainsi baissé au troisième trimestre en Corse, mais augmenté sur un an (+14,7 %, bien plus qu’au niveau national avec + 4,4 %), alors que le troisième trimestre a vu la création de 1 470 entreprises en Corse, une donnée impressionnante qui peut être analysée comme un "rattrapage lié à toutes les créations d’entreprises au trimestre précédent qui n’ont pas pu avoir lieu (à cause du confinement)", explique Sauveur Giannoni, maître de conférences en économie à l’université de Corse.
Au 3e trimestre 2020, l’emploi salarié en #Corse se redresse plus rapidement qu’en moyenne nationalehttps://t.co/GGWM0tsUKX pic.twitter.com/oF0LKLOV5A
— Insee en Régions (@InseeRegions) January 22, 2021
Côté transports, le transport maritime dans le fret a baissé de 10 % entre le troisième trimestre 2019 et le troisième trimestre 2020, notamment à cause de la baisse du fret étranger, alors que la reprise du trafic de passagers au troisième trimestre reste en deça des années précédentes.
En août, où l’activité touristique a été la plus forte, la baisse de passagers atteint malgré tout - 18,8 % par rapport à août 2019. Et le second confinement a fait de nouveau plonger le transport de passagers : "En novembre, l’aérien perd 69,7 % et le maritime 68,2 %", explique l’INSEE, pour qui l’impact du second confinement semble toutefois plus réduit que le premier.
La Corse est la région la plus impactée économiquement par la crise sanitaire
"Il se trouve que les activités liées au tourisme sont fragilisées, ce qui constitue la force de l’économie corse, et quand le tourisme est en difficulté, la Corse souffre", explique Sauveur Giannoni. L’ultra-dépendance de l’île au tourisme apparaît ainsi comme la raison principale de l’impact fort de la crise sanitaire en Corse, région la plus impactée économiquement par la crise sanitaire.
"La reprise des activités touristiques en saison estivale n’efface pas le préjudice causé par la crise sanitaire."
L’INSEE note que "la reprise des activités touristiques en saison estivale n’efface pas le préjudice causé par la crise sanitaire", et explique le Covid-19 a complètement balayé l’activité touristique de l’avant-saison : - 98 % de nuitées en avril 2020 par rapport à 2020 (!).
Et malgré un mois d’août presque normal, la reprise a été lente. Et les chiffres de juin et juillet n’ont pas été incroyables, alors que l’arrière saison a été marquée par le retour du Covid-19.
Pour Sauveur Giannoni, la Corse a davantage subi la crise sanitaire à cause de la "moindre diversification de son tissu productif. On n’a pas énormément d’industries, et beaucoup de services", qui ont souffert des confinements. Et d’ajouter : "le phénomène d’insularité joue à plein régime en période de crise, notamment au travers du fret, où il y a eu un ralentissement très très fort."
Des bons chiffres au 3e trimestre 2020, et une seconde vague moins destructrice
"Cet espoir sur le troisième trimestre, il est lié à l’embellie saisonnière du tourisme, explique Sauveur Giannoni, qui n’est pas étonné par les bons chiffres du troisièmes trimestre. Même si la Corse est la plus impactée par la pandémie, il se trouve que malgré le ralentissement du tourisme, les chiffres sont bons au troisième trimestre."
La note conjoncturelle de l'INSEE
La seconde vague a également été moins destructrice pour la France, et l’explication se trouve forcément dans la différence d’approche entre le premier et le second confinement. "Les commerces n’ont pas fermé aussi longtemps, et la priorité était de maintenir l’activité économique", juge Sauveur Giannoni.
Peut-on déjà tirer des leçons de l’année 2020 ?
"Il est évident que la forte dépendance à l’activité touristique va fragiliser notre économie. À long terme, il est souhaitable que l’économie puisse se diversifier, mais ça ne veut pas dire qu’il faut considérer le tourisme comme un problème", avance le maître de conférences en économie Sauveur Giannoni, pour qui la solution se trouve dans le "chemin de la diversification".
"La plupart des entreprises de Corse et de France sont sous perfusion étatique. Le vrai test, ce sera le moment où toutes ces aides vont s’arrêter, et là il peut y avoir un vrai choc."
Et avant de tirer quelconque leçon, encore faudrait-il pouvoir constater les conséquences complètes d’une crise qui dure. "Pour l’instant, on voit des défaillances d’entreprise très limitées, mais en réalité c’est en trompe-l'oeil, juge Sauveur Giannoni. La plupart des entreprises de Corse et de France sont sous perfusion étatique. Le vrai test, ce sera le moment où toutes ces aides vont s’arrêter, et là il peut y avoir un vrai choc."