Les écobuages représentent une source importante de pollution de l'air. Si depuis 2011 le brûlage des déchets verts est interdit tout au long de l'année, la Corse bénéficie de dérogations. La pratique est ancestrale dans l'île et elle a particulièrement augmenté durant le confinement.
32 tonnes. C'est la quantité de déchets verts brûlés, par écobuages, à Afa, commune proche d'Ajaccio (Corse-du-Sud).
Si ce chiffre n'est qu'une estimation établie par des chercheurs de l'Université de Corse, la pratique a des impacts considérables sur la pollution de l'air.
"Rien que pour Afa, cela entraîne la production de 238 kilos de particules fines, ce qui représente 177 millions de cigarettes consommées, un véhicule diesel qui va rouler pendant 53 millions de kilomètres, ou encore 1.300 fois le tour de la Terre", détaille Toussaint Barboni, maître de conférences à l'université de Corse.32 tonnes de déchets verts brûlés représentent 177 millions de cigarettes consommées
Consciente des enjeux environnementaux, la municipalité a trouvé une solution pour inviter la population à ne plus brûler ses déchets verts : le broyage. Feuilles et branches sont transformées en compost ou en broyat utilisé par la suite pour des paillages. Résultat à Afa, la pollution de l'air a considérablement diminué.
Plus d'écobuages pendant le confinement... et de pollution
D'après des études menées dans les laboratoires de l'université de Corse, de nombreuses molécules toxiques se dégagent des écobuages comme des dioxines, du benzène ou encore du furane.Et ce, quels que soient les végétaux brûlés. Ironie du sort, durant la période de confinement l'association Qualit'air a mesuré une forte diminution des polluants dus au trafic routier. En revanche, ceux liés aux écobuages ont fait un bond notable.
"Pour s'occuper, les gens ont entretenu leur jardin et pour se débarrasser de toute cette végétation coupée, ils l'ont brûlée. Il y a donc eu une augmentation des particules dans l'air", explique Rosanna Casale, membre de Qualit'air.
⛔Brûler? ses déchets verts ? c'est interdit⛔@Qualitair_Corse a publié un guide ?️ pour accompagner les collectivités pour les aider à la mise en œuvre d’un service de gestion des déchets verts https://t.co/n0YhUeLUVn
— Atmo France (@ATMOFRANCE) June 9, 2020
Une législation complexe
Mais venir à bout des écobuages en Corse n'est pas simple. D'une part, parce que la pratique y est ancestrale."C'est la coutume, des générations entières l'ont faite, nos parents le font et ainsi de suite. Même les jeunes générations font de l'écobuage, c'est quelque chose qu'il va falloir enlever des mœurs petit-à-petit ", reprend Rosanna Casale.
D'autre part, la législation est complexe. Selon une circulaire ministérielle, il est interdit de brûler des déchets verts à l'air libre depuis 2011.
Mais dans les régions comme la Corse, il existe des dérogations notamment pour faire respecter une autre loi : le débroussaillement autour des habitations.En milieu périurbain et dans les villages, c'est autorisé seulement pour l'élimination des déchets issus des obligations légales de débroussaillement.
"En milieu périurbain et dans les villages, c'est autorisé seulement pour l'élimination des déchets issus des obligations légales de débroussaillement. Ce ne sont pas tous les végétaux. Les tontes et les feuilles doivent être compostées", précise Alain Le Borgne de la direction départementale des territoires de la Haute-Corse.
En clair, en dehors des arrêtés préfectoraux concernant le risque incendie, il est interdit de brûler des déchets verts en milieu urbain, en milieu rural et périurbain si une déchetterie existe ou lors d'une alerte à la pollution de l'air.
Des communes de Corse et du continent commencent à réfléchir à des solutions pour éviter les écobuages. Elles peuvent consister, comme à Afa, à des prêts de broyeurs, ou encore à la mise en place de collectes en porte-à-porte.
En 2019, 17.000 tonnes de déchets verts ont transité par des déchetteries dans toute la Corse.