Ce jeudi 17 août, le procureur de la République d’Ajaccio et les services d’enquête sont revenus sur la saisie record de 100 kilos de drogues réalisée mardi dans l’île. Pour la Justice, comme pour la police, il est dorénavant l’heure de tenter de rendre compte de la structure du réseau.
« La Corse n’est pas une terre de rebond, mais une terre de consommation. Le produit n’y transite pas. » Ce jeudi 17 août, le procureur de la République d’Ajaccio, Nicolas Septe, accompagné des services d’enquête, est revenu sur la saisie record de drogue opérée en Corse mardi.
Ainsi 100 kilos stupéfiants – plus de 92 kilos de cannabis et plus de 7 kilos de cocaïne - ont été saisis en partie à la sortie d’un bateau dans le port de Bastia. Dans la foulée, sept personnes ont été interpellées et placées en garde à vue pour une durée pouvant aller jusqu’à 96 heures. « Ces personnes sont toujours auditionnées dans les locaux de la police judiciaire. Nous essayons de déterminer qui fait quoi dans le réseau, d’établir une hiérarchie, leur position », précise Nicolas Septe.
Des voitures et 10.000 euros en numéraire saisis
Selon les services d’enquête, la quantité de drogue saisie mardi représente à la revente, selon les estimations, entre 1.7 et 2 millions d’euros. « Un véhicule qui servait à l’acheminement, une Porsche Cayenne, et un autre véhicule servant aux livraisons dans les deux départements corses ont également été saisis tout comme 10.000 euros en numéraire. C’est peu et nous essayons de déterminer où pourrait se trouver l’argent », précise Arnaud Pirard, commandant de police et chef du groupement interministériel de recherche (GIR).
L’enquête a quant à elle démarré six mois plus tôt, en février 2023. « L’intégralité de nos services a été mobilisée. On peut dire que cette entreprise tournait bien. L’enquête a nécessité la mise en place de surveillance, parfois la nuit, de filature, d’identification des trajets et des personnes. Le but était de déterminer les contours de ce trafic. Lors de l’intervention du 15 août, 70 personnes ont été mobilisées », détaille Thierry de Maria, directeur territorial de la police judiciaire en Corse.
Saisonnalité
Si les services de justice et de police constatent « une explosion de la consommation de cocaïne chez les jeunes » en Corse, ils tiennent également à relativiser la présence de stupéfiants dans l’île. « Il faut tenir comptede la variation saisonnière, lorsqu’il y a plus de touristes, il y a plus de demande donc les importations de stupéfiants augmentent », explique le procureur de la République d’Ajaccio. « Si l’on ne retient que les 7 kilos de cocaïne, c’est un chiffre important pour la Corse, et il faut peut-être y voir un effet estival », complète le directeur territorial de la police judiciaire en Corse.
Néanmoins, depuis septembre 2022, les chiffres s’intensifient. Ainsi, 37 enquêtes préliminaires ont été ouvertes, et sept d’entre elles ont donné lieu à l’ouverture d’informations judiciaires. Actuellement, dans la juridiction de Corse-du-Sud entre 20 et 25 enquêtes sont actives en matière de stupéfiants.
« Ne pas imputer ces trafics à une communauté »
La saisie réalisée mardi devait, selon les autorités, alimenter les régions de Porto-Vecchio et deux quartiers d’Ajaccio : les cannes et Pietralba. D’après les dires du procureur, elle a permis « d’assécher » quatre points de deal pour « un temps ».
Nicolas Septe indique néanmoins : « Il est factuellement erroné et sociétalement dangereux d’imputer ces trafics à une communauté en particulier. Parmi les personnes placées en garde à vue, se trouvent également des personnes d’origine corse. »
Le procureur décrit alors des « trafics juteux » qui comptent des « gagnants ». Ces derniers « ne consomment pas ». « Ce sont les cols blancs, qui agissent dans l’ombre et ce sont eux qui nous essayons d’identifier ».
Au niveau national, 240.000 personnes vivent du trafic de stupéfiants, un marché qui représente 3 milliards d’euros.