Pour ce premier tour des Territoriales, nous avons assisté au dépouillement au bureau centralisateur d'Ajaccio. Reportage.
On ne sait si c'est le Covid, la fête des pères ou la chaleur - peut-être les trois ? -, mais on était loin de l'effervescence des grands rendez-vous électoraux au bureau centralisateur de la mairie d'Ajaccio.
Ce dimanche 20 juin, à une demi-heure de la clôture du scrutin du premier tour des Territoriales, tout est étrangement calme. Mis à part les assesseurs, une poignée de journalistes et quelques curieux, la salle de vote sonne plutôt creux. "J'ai rarement vu aussi peu de monde un jour d'élection", confie un vieil Ajaccien, appuyé à la barrière en attendant tranquillement 18 heures.
"Y a-t-il encore des personnes qui souhaitent voter ?", interroge Jean-Marie Rossi, président du bureau. Une mère, avec son petit aux bras, sera la dernière personne à glisser son enveloppe dans l'urne. "A voté, le scrutin est clos !" Le dépouillement peut commencer. Pendant ce temps-là, François Filoni est assis en terrasse sur le port, avec certains de ses colisitiers.
Premières tendances
Au fur et à mesure qu'on ouvre les bulletins, quelques personnes se massent derrière les barrières. On aperçoit des colistiers de Gilles Simeoni : Alex Vinciguerra (en 3ème position) est en compagnie de Nadine Nivaggioni, Sébastien Masala et Romain Colonna : "On regarde les 200 premiers bulletins et on va dans un autre bureau." Histoire de prendre la température...
À côté, Arthur Solinas de Core in Fronte est également là. Luc Bernardini aussi. Il était troisième sur la liste du parti indépendantiste de Paul-Félix Benedetti aux dernières Municipales d'Ajaccio.
Plus loin, le communiste Paul-Antoine Luciani écoute attentivement Jean-Marie Rossi égrener les noms. Celui de Michel Stefani, dont il est le colistier, n'est pas souvent cité. "C'est mauvais signe", souffle-t-il derrière son masque. Les deux cents premiers bulletins donnent Laurent Marcangeli en tête devant Gilles Simeoni.
Sur le trottoir devant la mairie, la foule s'est un peu épaissie. Dans le hall, les adjoints du maire sont là : Pierre Pugliesi, Simone Guerrini ou encore Stéphane Vannucci. Antoine Maestrali, son directeur de cabinet et de campagne, passe furtivement avant de monter à l'étage.
Des estimations qui se confirment
19 heures 45, les résultats de la "maison carrée" tombent. Dans son antre, Laurent Marcangeli reste maître à bord avec 270 voix contre 118 pour le président sortant de l'Executif. La surprise vient de Core in Fronte, quatrième dans un bureau centralisateur pas vraiment connu pour ses tendances indépendantistes.
Quelques minutes plus tard, on entend une petite clameur et des applaudissements du côté de place du marché. Ça vient de la permanence de Gilles Simeoni, à quelques pas de la mairie. Il est 20 heures. Les premières estimations donnent l'autonomiste en tête sur l'île. Devant la permanence, colistiers et soutiens laissent éclater leur joie. "On va peut-être pouvoir faire cavalier seul au second tour", analyse un militant en regardant les résultats sur son téléphone.
"O ghjenti, ça peut bouger, ça reste des estimations", rappelle un "Simeoniste". Estimations confirmées dans la foulée.
Plus les minutes passent, plus l'écart se creuse : au niveau régional, Gilles Simeoni accentue son avance sur Laurent Marcangeli. À Ajaccio, néanmoins, le candidat de la droite s'impose avec près de 3.000 voix de plus que son rival. "Beaucoup de gens que je connais ne sont pas allés voter", regrette cependant Jacques Billard, adjoint au maire en charge du bureau de l'Octroi, au bas du cours Napoléon.
"Ils vont passer devant la mairie"
Retour à la mairie. Devant l'entrée, une cinquantaine de personnes patiente en attendant la proclamation des résultats définitifs en ville. Les journalistes font le pied de grue. Certains discutent avec Stéphane Sbraggia, premier adjoint de Laurent Marcangeli. On veut savoir où est le tête de liste de la droite insulaire et s'il va donner une première réaction. Pas pour l'instant.
Au même moment, on aperçoit des bandere au niveau du carrefour de la Place du Diamant. Des nationalistes défilent. "Ils vont passer devant la mairie", glisse un militant de droite. Et d'ajouter : "Je m'en vais, je ne veux pas voir ça." "On reste là, la tête haute", peut-on entendre. "Ce n'est pas fini, il reste un second tour dimanche prochain", lâche une jeune femme en pensant qu'il s'agit des supporters de Gilles Simeoni.
Je m'en vais, je ne veux pas voir ça
Ce sont en fait des militants de Core in Fronte. Après avoir fait le tour du centre-ville, ils arrivent à la mairie lorsque Laurent Marcangeli proclame enfin les résultats officiels dans la cité impériale. Quand il annonce la troisième place ajaccienne de la liste de Paul-Félix Benedetti, les partisans du leader nationaliste exultent puis repartent aussitôt.
Dans la moiteur du bureau centralisateur, ce sera la seule véritable effusion de la soirée. Et peut-être aussi la plus inattendue...