François Filoni se lance pour la première fois dans la course aux élections territoriales. Connu à Ajaccio, où il s'est présenté de nombreuses fois aux Municipales, son parcours est marqué par une multitudes de virages politiques.
"Aider les déshérités". C'est par ces mots que François Filoni, tête de liste "Les nôtres avant les autres", soutenue par le Rassemblement national, explique ses débuts dans le monde politique.
Bien avant de défendre les couleurs de l'extrême droite, c'est à l'autre extrême qu'il commence son engagement. Déjà présent lors du grand mouvement de 1989, François Filoni s'aguerrit comme représentant syndical CGT au sein d'EDF. Rapidement conseiller prud'homal, il est tout aussi vite contaminé par le virus de la politique.
En 1984, il participe à sa première campagne électorale des cantonales avec le Parti communiste. "Ça fait 38 ans, c'était une première incartade dans ce domaine-là, mais on me le reproche encore aujourd'hui, mais j'assume complètement mon parcours", rit-il.
De la gauche à la droite
Un idéal que François Filoni va vite abandonner au profit de "la gauche plurielle". En 1995, il prend la tête d'une liste aux élections municipales d'Ajaccio. "On se réclame de la gauche progressiste, aujourd'hui, et il y a plus de gens à gauche en dehors des appareils que dans les appareils", explique-t-il alors.
C'est ensuite du côté de la "gauche souverainiste" qu'il poursuit son engagement en soutenant Jean-Pierre Chevènement. "J'ai toujours été dans ce cap souverainiste, car je pense que c'est par le peuple que l'on fait les choses", commente-t-il. Mais l'ancien ministre et candidat aux élections présidentielles de 2002 finit, selon le candidat aux élections territoriales, "par se perdre lui aussi dans les méandres de la mondialisation."
C'est quelqu'un de surprenant qui sait faire le meilleur comme le pire. Il ne manque pas de qualité pour être altruiste, mais il manque de structuration
Candidat malheureux aux élections municipales anticipées de 2000 sous l'étiquette du Mouvement Des Citoyens, il fait finalement partie de la coalition de gauche qui ravit la maison carée aux Bonapartistes en 2001. Mais l'idylle avec le nouveau maire social démocrate Simon Renucci sera de courte durée. François Filoni crée alors son mouvement Ajaccio Energie en opposition avec la nouvelle majorité.
À nouveau candidat en 2008 et en 2014, sans réelle couleur politique il fait de la lutte contre le clientélisme son cheval de bataille. Un an plus tard, il figure sur la liste victorieuse menée par le candidat de droite Laurent Marcangeli. "J'ai fait le pari de la jeunesse de Laurent Marcangeli", confie-t-il. Un nouveau camp et un choix gagnant. Au second tour, Laurent Marcangeli s'empare de la cité impériale. François Filoni devient adjoint à la propreté urbaine et à la police municipale. Et encore une fois, il quitte ses fonctions. "Contrairement à ce que l'on peut dire, on ne m'a pas mis dehors, on m'a offert des postes plus reluisants pour que je reste mais je ne les ai pas acceptés. J'ai fait un choix de vie et un choix de carrière", justifie-t-il.
Pour un homme, un temps au premier plan de la vie politique ajaccienne et voulant garder l'anonymat, le parcours politique de François Filoni "décrit pertinemment ce qu'il est, soit une forme d'instabilité. Il a manqué d'un cadre dans sa jeunesse et aujourd'hui ce cadre lui fait défaut." Il continue : "c'est quelqu'un de surprenant qui sait faire le meilleur comme le pire. Il ne manque pas de qualité pour être altruiste, mais il manque de structuration et aujourd'hui les gens ont besoin de cohérence. Mon sentiment envers lui oscille entre indulgence et incompréhension."
De la droite à l'extrême droite
En rupture avec ses anciens alliés de droite, François Filoni repart dans la course aux municipales de 2020 avec une liste sans étiquette, soutenue par la cheffe du Rassemblement National, Marine Le Pen. Sans succès. Un virage que François Filoni décrit comme "un choix sociétal".
De retour d'un tour de Corse dans le cadre de la campagne électorale, son constat est sans appel. "J'ai vu des ghettos à Aleria, Ghisonaccia, Porto-Vecchio, Bastia … ce sont les futurs problèmes de demain et si l'on ne veut pas être malade, il faut que l'on guérisse aujourd'hui. La mixité n'amènera pas tout et il faut que ces gens fassent aussi l'effort d'assimilation, car la France ce n'est pas qu'un totem avec la Caf. Les nouveaux arrivants ont aussi le devoir, comme l'ont fait leurs ancêtres, d'essayer de s'assimiler et de rentrer sans choquer. Notre culture est dominante et doit le rester", considère François Filoni.
Pour lui, le Rassemblement national "a su s'ouvrir" et n'est ainsi plus seulement vu comme un rempart "parce que l'on vient avec des solutions et des projets concrets et chiffrés". Hors de question donc de parler de racisme. "C'est la mission que m'a donnée Marine Le Pen, ces gens-là n'ont pas leur place chez nous."
Un parcours loin de faire l'unanimité
La carrière atypique de François Filoni lui vaut de nombreuses critiques. Ainsi, chez les communistes, il est notamment félicité, ironiquement, pour "ses facultés d'adaptation remarquables."
Quand je regarde les réseaux sociaux … Qu'est-ce que je n'ai pas fait ? Si ce n'est d'avoir passé des années de ma vie à ramasser la merde des uns et des autres sur les plages … Et je me suis régalé !
Des dires que le candidat qualifie de "caricatures". "Je préfère aimer que d'être aimé. Quand je regarde les réseaux sociaux … Qu'est-ce que je n'ai pas fait ? Si ce n'est d'avoir passé des années de ma vie à ramasser la merde des uns et des autres sur les plages … Et je me suis régalé ! Je suis prêt à recommencer, car on prend du plaisir à servir l'intérêt général", indique-t-il.
Une défense de l'intérêt général qui lui est aussi reconnue dans son camp. "Il est persévérant et tourné vers les autres. Les gens qui le critiquent ne le connaissent pas et ne savent pas ce qu'il a fait, ni ce pour quoi il s'investit, bien souvent de manière gracieuse que ce soit pour les gens, sa ville et maintenant pour son île. Il a de très bonnes idées, parfois un peu en avance sur son temps et c'est ce qui crée une incompréhension chez les gens", analyse Nathaly Antona, deuxième de la liste "Les nôtres avant les autres".
Malgré tout, François Filoni en est persuadé, sa candidature fera un score à deux chiffres le 20 juin prochain. Un résultat qu'il explique principalement par le contexte national et régional.