Cinquante ans après, des protagonistes de la grande grève des mineurs de 1963 se souviennent avec  émotion du "formidable élan de solidarité" et de l'"unité parfaite" des syndicats qui ont permis d'obtenir une hausse des salaires en faisant plier au bout de 35 jours le gouvernement Pompidou.

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"Cette grève était justifiée"


"C'était un vendredi, le 1er mars" que fut lancé le mot d'ordre de grève générale, se rappelle avec précision Louis Bembenek, 24 ans à l'époque, mineur et délégué CGT à la fosse Delloye, où est désormais implanté le Centre historique minier de Lewarde (Pas-de-Calais).

Un décret prévoyant la réquisition des mineurs signé le lendemain par le général De Gaulle et son Premier ministre, Georges Pompidou, mettait le feu aux poudres. "Ici, on guettait avec impatience et appréhension la réaction des copains de Lorraine à l'ordre de réquisition (...). Le général passait très bien là-bas, mais pour
une fois ils ne l'ont pas suivi
", se félicite encore cinq décennies plus tard l'ancien mineur.

Cette grève, la dernière de cette importance pour le monde minier voué à disparaître au cours des décennies suivantes, "n'a pas éclaté de manière spontanée, imprévisible", retrace Raymond Frackowiak, secrétaire général de la CGT mines du Nord/Pas-de-Calais. Une grève du rendement dès janvier avait provoqué une baisse de la productivité "de 10 à 20%".

Prévue dans la foulée, celle pour "le rattrapage de salaire est retardée le plus tard possible car l'hiver avait été rugueux", ajoute M. Bembenek. "Je ne suis pas partisan des grèves inutiles, mais celle-ci était justifiée. On
a profité des vacances pour marquer un bon coup. C'était l'unité parfaite, même les cadres ont participé
",  insiste l'ex-CFTC François Cerjak, 80 ans, "descendu" à la mine "à l'âge de 14 ans et 2 mois".
"Le matin, les gens s'occupaient de cultiver le jardin, l'après-midi, on se retrouvait ensemble pour les réunions, qui duraient une heure ou deux. Et après chacun rentrait chez soi, car même aller boire un coup on ne pouvait pas se le permettre", note Louis Bembenek, mettant en avant le rôle des femmes qui "n'ont jamais flanché" et "nous ont encouragés à continuer la lutte".

Celle-ci n'aurait pas été non plus tenable sans "le formidable élan de solidarité de toute la population, et les dons envoyés de Belgique, URSS, Grande-Bretagne ou Espagne. On faisait des collectes jusqu'en région parisienne, avec nos fiches de paye pour montrer aux gens ce qu'on gagnait vraiment", rappelle M. Bembenek.


"Pas une partie de plaisir"

"On avait faim, plus rien pour chauffer les maisons", témoigne le maire de Rouvroy, Jean Haja, âgé de 11 ans en 1963, fils d'un mineur polonais qui "a participé malgré lui" au mouvement. Déjeuners pour les enfants aux frais de la municipalité communiste, séjour dans une famille de Trappes, carnet de crédit chez le commerçant du coin... "Il fallait se débrouiller: on allait avec notre petite charrette sur les aires de stockage, où on ramassait les dernières gaillettes et les poussières de charbon, un peu pour nous et aussi pour vendre", poursuit M. Haja.

"Cette grève n'était pas une partie de plaisir, mais de voir toute cette solidarité autour de nous, tout ce qui s'était mis en branle pour nous et aussi entre nous, ça faisait chaud au coeur", déclare, ému, Louis Bembenek, qui voit dans cette grève "les prémices de 68".

"Certains étaient grisés par toute cette solidarité et ça n'a pas été facile de faire reprendre le travail" après 35 jours de grève, le 4 avril, une fois obtenues une augmentation salariale de 11% et une semaine de congés supplémentaire.

Une exposition de photographies se tiendra à partir du 20 septembre au Centre historique minier, qui a lancé par ailleurs un appel à témoignages sur la grève.


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