Le Bon Coin : un changement tarifaire remet en question l'activité de milliers de professionnels

Un changement tarifaire intervenu en novembre sur le site de petites annonces Le Bon Coin a provoqué la disparition de plus de 500.000 d'entre elles et remet en question l'activité de milliers de professionnels en France, selon plusieurs utilisateurs mécontents.

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Les annonces qui étaient jusque-là gratuites pour les professionnels leur sont désormais facturées 3,60 euros pour deux mois de présence sur le site, ce qui revient ainsi pour 200 annonces à débourser 4.320 euros pour une année de visibilité. Mardi à midi, ce sont 552.602 annonces de professionnels qui avaient disparu du Bon Coin depuis l'application du nouveau barème le 27 novembre dernier qui a affecté les détenteurs d'un "compte pro" et d'une "boutique pro".

"Le Bon Coin a sauvé mon activité, mais aujourd'hui il va la couler", résume à l'AFP l'écrivain Phil Marso, qui possède une librairie à Paris, Megacom-ik, dont
80% de l'activité dépend du site. "Si je ne trouve pas de solution, je vais être obligé de fermer d'ici trois mois, pour tenir j'ai déjà vendu mon stock de livres à Chapitre.com", explique-t-il. "Cela fait huit ans que je travaille pour mon patron, mais il risque de ne pas renouveler mon contrat dès fin mars", renchérit Sonia Mazzola, de la boutique Photolumière, spécialisée dans la vente de matériel photographique d'occasion et située à Toulon (Var).

"Mon poste est en jeu car je passais 300 annonces par mois qui nous apportaient 30% du chiffre d'affaires, c'était une aubaine", s'insurge-t-elle. "Je n'ai plus aucune annonce contre 250 en moyenne", indique pour sa part Pierre Declerck, propriétaire de Nordtroc, un dépôt-vente de meubles et bibelots installé à Polincove (Pas-de-Calais). Réalisant 70% de ses ventes par internet, il vit "une catastrophe" mettant en péril la survie du magasin qu'il tient avec son épouse. "En France, il y a beaucoup de commerçants dans la brocante, des gens au chômage qui ont créé leur activité justement parce que Le Bon Coin était gratuit", ajoute-t-il.

Le huitième site le plus consulté dans l'Hexagone, qui appartient au groupe de médias norvégien Schibsted, reçoit 20 millions de visiteurs uniques mensuels sur web et mobile. Ce tournant dans sa politique commerciale a des conséquences très importantes en raison de sa place écrasante en France et a été d'autant plus mal ressenti qu'il a eu lieu avant la période cruciale des fêtes de fin d'année.

Protéger les utilisateurs non-professionnels

Face à ces critiques, Antoine Jouteau, directeur général adjoint du site Le Bon Coin, justifie la décision prise par la nécessité de protéger les utilisateurs non-professionels, qui "allaient être noyés". "Notre concept, c'est quand même d'être un site de particuliers, qui déposent plus de 90% des annonces", souligne-t-il. "Le changement concerne trois univers: ceux de la maison, du multimédia et des loisirs, et il avait déjà eu lieu dans les secteurs immobilier et automobile", rappelle Antoine Jouteau.

"Cette évolution va permettre aux professionnels d'avoir des produits de plus grande valeur sur le site, par exemple dans le multimédia ils vendront un ordinateur plutôt qu'une souris ce qui leur permettra d'amortir les frais d'insertion", affirme-t-il. Ses détracteurs ne sont pas convaincus par des solutions qu'ils jugent au rabais (ventes par lot, collections, remises en échange d'un abonnement à la "boutique premium"). "Je suis d'accord pour payer au pourcentage jusqu'à un euro sur les plus gros objets, mais là il y a de l'abus", juge Sonia Mazzola.

Exode massif ?

"Malheureusement l'équipe du Bon Coin ne connaît pas son outil, et ne réalise d'ailleurs pas d'enquête clients sur les possesseurs de +boutique pro+", assure Pierre Declerck. Ce changement a également provoqué pour les particuliers des difficultés dans le dépôt d'annonces, qui sont plus souvent refusées par l'équipe de modération du site, devenue extrêmement tatillonne.

Quant aux associations de protection animale qui ont souscrit un "compte pro" afin d'avoir une meilleure visibilité pour leurs annonces d'adoption de chiens et chats, elles ont d'ores et déjà annoncé qu'il leur était impossible de payer. De là à assister à un exode massif d'utilisateurs similaire à celui observé il y a 8 ans d'eBay vers Le Bon Coin, il y a toutefois un pas.

"Certains sites comme mondebarras.fr ou Vivastreet pourraient en profiter, mais la prépondérance du Bon Coin et son audience empêche pour l'instant" une telle migration, regrette Phil Marso.

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