En Belgique, le combat de femmes contraintes d'abandonner leur enfant

Dans les années 50 à 80 en Belgique, quelques milliers de femmes ont été contraintes d'abandonner leurs enfants nés de grossesses non-désirées. En résulte des milliers d'adoptions forcées, notamment en Flandre, avec la complicité de l’Église catholique.

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Quand Ritje a tenu pour la première fois son "bébé" dans ses bras, il avait 43 ans. Depuis, cette sexagénaire, contrainte d'abandonner son enfant après un viol, se bat pour faire reconnaître le scandale de milliers d'adoptions forcées, notamment en Flandre, avec la complicité de l'Église catholique.

Il y a deux ans, Ritje Schouppe a reçu une lettre manuscrite. C'était son fils, qui venait de la retrouver. "Je tremblais de bonheur, je me suis dit: 'enfin!'",
raconte-t-elle avec émotion. Violée par son petit ami à 20 ans, la jeune femme a été forcée en 1969 d'abandonner son enfant, qui a grandi dans une famille d'adoption, près de Bruxelles.

Enfant "enlevé"

Elle raconte que ses beaux-parents avaient fait suivre sa grossesse dans un hôpital de Bruxelles, où la jeune flamande signera, sans les comprendre, des papiers en français où elle accepte d'abandonner son futur bébé à un service de placement d'enfants.

"Quand mon enfant est né et qu'il a poussé son premier cri, mon copain a dit: 'Bouche toi les oreilles'. Ils l'ont tout de suite emmené. Je ne l'ai même pas
vu
". Ses beaux-parents font croire à ses parents que l'enfant est mort-né. Elle n'ose pas leur révéler la vérité. Quand elle le fait, il est trop tard. Malgré
ses appels répétés, l'hôpital refuse de dire à qui son enfant a été confié. "Le délai de rétractation de trois mois n'a jamais été respecté", soupire-t-elle.

Église, services publique et justice complices

Ritje a rejoint l'association Mater Matuta, qui demande que la lumière soit faite sur les abandons sous contrainte d'enfants ensuite adoptés, des années 1950 au début des années 1980 en Flandre. Selon l'association, jusqu'à 30.000 enfants auraient été arrachés à leur mère, souvent dans des institutions
liées à l'Église catholique, avec la complicité des services publics et de certains magistrats, qui validaient les adoptions.

Un groupe d'experts, dont les recommandations sont attendues en avril, a été mis sur pied par le gouvernement flamand. Le parlement de la région néerlandophone a organisé des auditions, dont la dernière est prévue mercredi.

'Une faute' de l'Église

Fin 2014, le secrétaire général de la conférence des évêques de Belgique, Herman Cosijns, avait refusé de reconnaître "une faute" de la part de l'Église,
alors que certains instituts gérés par des religieuses sont montrés du doigt.

Comme la maison Tamar à Lommel (nord), qui aurait hébergé, selon Mater Matuta, quelque 700 jeunes femmes dont la famille voulait cacher la grossesse, puis fait pression sur elles pour qu'elles abandonnent leur enfant. Elles avaient "le choix: s'occuper elles-mêmes d'élever l'enfant ou le confier à l'adoption", a affirmé Mgr Cosijns, au grand dam des parlementaires et de l'association.

Elle réclame des excuses de l'Église belge, déjà secouée par des scandales de pédophilie, et un accès aux archives. Plus récemment, la conférence des évêques a consenti à constituer un groupe chargé d'enquêter, "dans la mesure où de tels dossiers existent", et promis de collaborer avec les experts. "Nous n'allons rien étouffer", a assuré son porte-parole, Tommy Scholtès.

Mercredi, Monica Van Langendock doit témoigner devant le parlement flamand. Née sous X en mai 1965 à Villers-Semeuse, une bourgade française à deux pas de la frontière belge, elle a été adoptée par une famille flamande. "Je veux connaître mon histoire". "La seule chose que je sache, c'est que quand mes parents adoptifs sont venus me chercher, j'avais 12 jours, j'étais maigre, assoiffée et j'avais des escarres", raconte-t-elle.

Irrégularités

Mater Matuta accuse les agences d'adoption d'avoir échangé des enfants, pour encore mieux brouiller les pistes. Les quelques documents que Monica a réussi à rassembler montrent de nombreuses irrégularités, de la procédure d'adoption bâclée par la justice belge à l'inscription par la mairie française du nom de ses parents adoptifs comme parents naturels sur son extrait de naissance, quelques années plus tard.

"Je suis fâchée contre toutes ces institutions qui ont volontairement magouillé, qui ont oeuvré pour tout faire disparaître", accuse-t-elle. "Tant pour les mères que pour les enfants, ceux qui sont responsables doivent (...) dire 'Nous n'aurions pas dû, c'était mal'".
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