Mal comprise et surtout très maladroite, l'étude menée par une ONG belge analysant l'hyperactivité de l'affaire Benalla sur Twitter fait polémique.
D'où vient l'explosion d'une ampleur inédite de tweets sur l'affaire Benalla, en juillet ? Une étude consacrée à ce sujet a été publiée mercredi 8 par une ONG belge luttant contre la désinformation EU DisinfoLab. Elle a, depuis, fait couler beaucoup d'encre et fait réagir plusieurs responsables politiques. Pas forcément à juste titre.
Jean-Luc Mélenchon s'indigne ainsi d'être traité en "bot russe" tandis que Marine Le Pen dénonce pèle-mêle "fichage, censure, manipulation de l'info". Entre les deux pôles du spectre politique, les réactions ont été toutes aussi vives.
Eh stupide barbouze ! Je ne suis pas un bot russe. C'est juste moi, Mélenchon, qui tweete contre toi ! Si t'as besoin de me ficher pour t'en rappeler, c'est que tu es encore plus bête que tu en as l'air. Signé matricule 14452.
— Jean-Luc Mélenchon (@JLMelenchon) 9 août 2018
Numéro de matricule 14802...
— Marine Le Pen (@MLP_officiel) 10 août 2018
Fichage, censure, manipulation de l’info, barbouzeries... Sympa le nouveau monde ! MLP #FichagePolitique pic.twitter.com/S3Q7ROA8IP
L'étude en question
L'ONG, à l'origine, s'interrogeait sur l'origine de l'explosion des tweets portant sur l'affaire Benalla : 1,7 millions de tweets provenaient de seulement 2600 comptes. Après deux semaines d'étude, du 19 juillet au 3 août, les conclusions de DisinfoLab montrent le rôle majeur des comptes "militants" très actifs. Mesurée dans l'étude, l'influence des comptes automatiques (ou bots) a en revanche été très minoritaire.
Affaire Benalla : Les ressorts d'un hyperactivisme sur Twitter
A story told with Adobe Spark
Même constat au niveau de l'influence russe, même si bon nombre de ces comptes très actifs ont été catégorisés comme "pro-russes" (à part de retweets de sites tels que Russia Today ou Sputnik)
#AffaireBenalla : 2600 comptes Twitter ont été suractifs, tweetant plus de 300 fois/semaine et en tout 1 767 682 fois (soit 44% du total posté !).
— EU DisinfoLab - Français(@DisinfoEU_FR) 30 juillet 2018
Nos experts notent une corrélation de 27% avec des comptes pro-russes déjà repérés en France. https://t.co/ZpRkvkRAA4
Les données ont été publiées dans un souci de transparence par 'UE DisinfoLab, et c'est là où le bât blesse : on y voit le nombre de tweets de chaque compte concerné, mais aussi leur intérêt pour les médias russes (souvent accusés de désinformation), leur intérêt pour certaines rumeurs (comme les Macron Leaks) et surtout leur appartenance politique supposée. Le "matricule", lui, ne correspond qu'au n° de ligne dans le tableur.
Si les tweets sont publics, les personnes visées ne s'en pas moins senties fichées. Au point que la CNIL (Commission nationale de l'informatique et des libertés) a été saisie sur ce dossier.
CP | Etude réalisée à partir de messages postés sur Twitter : la @CNIL est saisie du dossier → https://t.co/Shz7777tev pic.twitter.com/D1czRLxG42
— CNIL (@CNIL) 9 août 2018
Un grand nombre de personnes se sont senties fichées
Dépassés par la médiatisation de leur étude, les responsables d'UE DisinfoLab ont publié un communiqué dans lequel ils rappellent avoir réalisé cette étude pour étudier l'explosion des tweets sur l'Affaire Benalla, à un volume jamais vu auparavant. "A titre d’exemple, nous n’avons jamais parlé d’une quelconque ingérence de l’Etat Russe dans la création de l’Affaire Benalla, ni de l’utilisation massive de 'bots russes'" souligne le communiqué.
"Un grand nombre de personnes se sont senties fichées" peut-on également lire. "Nous ne l’avions pas du tout anticipé en rendant ces données publiques. Nous sommes sincèrement et profondément désolés et nous en tirerons toutes les leçons."
Nous avons mis en ligne 2 fichiers pour être transparents. Le fait de figurer dans un fichier signifie que vous avez été très actifs pendant l’affaire Benalla. Rien d’autre. Par ailleurs, le fichier dropbox qui circule n’est pas l’officiel. L’officiel : https://t.co/t4ms1gKmv3 pic.twitter.com/Pjuxu27EQb
— EU DisinfoLab (@DisinfoEU) 8 août 2018