Le nombre de réfugiés ukrainiens en France a triplé en une semaine. On en recense désormais plus de 15000. En majorité des femmes et des enfants. Les établissements scolaires s’organisent pour les accueillir dans les classes. Une quinzaine a déjà intégré les écoles des trois départements, comme les enfants de la famille Arefiev, arrivée le 4 mars à Bernot, dans l’Aisne.
Lorsque nous avons rencontré la famille Arefiev, le 6 mars dernier, elle venait d’arriver à Bernot, cette petite commune de l’Aisne où une amie les attendait chez elle.
Après 10 jours de voyage en voiture, Genia, la grand-mère, Yura, Katia et leurs trois enfants pouvaient enfin poser leurs valises.
Ils nous avaient alors confié que le trajet avait été épuisant pour tout le monde. 2 000 kilomètres avec quelques arrêts en Pologne et en Allemagne avant de rejoindre la France et Bernot. "La plus grande difficulté, c'est sur le plan émotionnel. C'est très dur de quitter son pays", nous avouait Yura, le père de famille. Genia, sa mère de 71 ans peinait encore à réaliser ce qu'ils venaient de vivre : "En 10 minutes, j'ai dû prendre mes documents, quelques habits, ramasser toutes mes affaires, tout ça dans la panique. On s'est assis dans la voiture et on est partis !"
Le langage n'est pas une barrière
Ingrid Debras, directrice de l'école de Bernot dans l'Aisne
Pour éviter que l’angoisse ne s’installe, le couple a immédiatement scolarisé ses trois enfants à l’école de Bernot. Artur, 4 ans, a intégré la classe de moyenne section, Diana, 6 ans, est entrée en CP et Tymur est en classe CE2. Tous les trois sont accueillis dans des classes correspondant à leur tranche d’âge.
D’après la directrice de l’école, l’intégration s’est faite naturellement. "Les enfants ont été très bien accueillis par les autres élèves. C’était chaleureux. Dès qu’ils se sont retrouvé à la récréation, leurs camarades leur ont apportés des cerceaux, des ballons pour jouer avec eux. Certains leur ont même apporté des cadeaux", explique Ingrid Debras.
De leurs côtés, les enseignants doivent adapter leurs apprentissages. "Ce n’est pas évident mais nous sommes aidés par un agent spécialisé dans l’accueil des enfants allophones. Cette enseignante de l’Éducation nationale nous a donné quelques pistes, comme des activités sur tablettes et des logiciels pour l’acquisition du vocabulaire. Pour le moment, cela se résume à des imagiers et des activités plastiques pour échanger à l’oral. Mais je suis confiante. Ces enfants ont déjà eu une bonne scolarité en Ukraine. Et le langage n’est pas une barrière", ajoute la directrice. La semaine prochaine, le niveau de français des trois enfants de la famille Arefiev sera évalué pour un meilleur accompagnement.
Un dispositif de scolarisation pour les enfants réfugiés
Comme Artur, Diana et Tymur, une quinzaine d’enfants ukrainiens réfugiés est déjà scolarisée dans l’académie d’Amiens, soit dans les trois départements de Picardie. Mais le rectorat s’attend à en accueillir davantage dans les prochaines semaines. Une fois arrivées en France, les familles peuvent se présenter dans les écoles proches de leur domicile pour l’inscription ou demander de l’aide à la municipalité d’accueil.
Le rectorat de l’académie d’Amiens assure que le dispositif se fait en étroite collaboration avec la préfecture et les collectivités. "On a mis en place un travail de suivi de ces familles. Et on va anticiper les arrivées", annonce Raphaël Muller, recteur de l’académie d’Amiens. Sa priorité : accueillir les enfants dans une école la plus proche de son domicile.
Ce qui compte, c'est que ces enfants se sentent bien
Raphaël Muller, recteur de l'académie d'Amiens
Des places en structures spécialisées pour les enfants allophones nouvellement arrivés en France sont déjà prévues dans l’académie. 800 places pour les niveaux de primaire et 1 800 places pour les élèves du second degré (collège et lycée). "Ce que l’on fait, c’est de s’appuyer sur ces structures spécialisées pour scolariser une partie des enfants ukrainiens qui arrivent. Mais ce sont des structures surtout basées en milieu urbain. Nous profitons de ce réseau de professeurs spécialisés pour soutenir les enseignants d’école non spécialisés qui accueillent ces enfants réfugiés", explique le recteur.
Tous ces enfants scolarisés devraient également bénéficier d’un test de niveau pour leur proposer un enseignement adapté. "Ce qui compte, c’est que les enfants se sentent bien. Ils ont vécu des situations difficiles. L’enjeu est de les accueillir, de les rassurer et de les intégrer. Pour cela, on s’appuie sur des matériaux pédagogiques que l’on connaît par notre expérience de l’accueil d’enfants non-francophones", ajoute Raphaël Muller.
À l’heure où nous écrivons ces lignes, 800 enfants ukrainiens sont scolarisés en France. Le ministre de l’Éducation nationale a d’ailleurs rappelé que tous les rectorats avaient organisé des cellules de crise pour l’accueil des réfugiés ukrainiens. Ils ont quitté leur pays, mais pas les bancs de l’école.