Environ 80 personnes se sont rassemblées devant le centre régional d'addictologie à Prémontré (Aisne) pour contrer la décision de la direction de le fermer pendant les deux mois d'été.
L'annonce a été faite dans le courant du mois d'avril et la direction semble décidée à ne pas changer d'avis : le centre régional d'addictologie de Picardie (CRAP), situé à Prétmontré près de Laon (Aisne), devrait fermer ses portes en juillet et en août 2019.
Ce service spécialisé appartient à l'établissement public de santé mentale départemental de l'Aisne et prend en charge les personnes atteintes d'alcoolisme et autres addiction. C'est le seul centre d'addictologie de l'ex-région Picardie, avec une capacité d'accueil de 18 lits.
Deux millions d'euros de déficit
Le directeur par intérim, François Malleret, assure que l'établissement "ne peut pas assurer le fonctionnement de ses services physchiatriques si le centre n'est pas fermé cet été." pour compenser les problèmes d'effectif dans le reste de l'hôpital, les infirmières du centre d'addictologie seront redéployées dans les autres services. Il met en avant des problèmes financiers importants. "On a deux millions d'euros de déficit, et on doit assurer un plan d'investissement d'1,7 millions d'euros avec une dotation annuelle qui n'est pas à la hauteur de nos attentes," ajoute le directeur.
La fermeture estivale serait donc la seule option pour garder la tête hors de l'eau. Pourquoi ce service plutôt qu'un autre ? Car la direction estime qu'il est plus logique de fermer un service d'hospitalisation programmée comme celui d'addictologie pour pouvoir assurer le fonctionnement des services d'hospitalisation non-programmée.
Pas question pour autant d'interrompre une thérapie en cours. "Nous avons pris cette décision en avril, et la durée de séjour moyenne des patients est d'une vingtaine de jours. Nous avons donc pu anticipé pour nous assurer qu'il n'y aura plus de patients au centre à partir du 1er juillet," souligne François Malleret.
Le seul centre en Picardie
Pour la CGT, la décision est une aberration. "Les médecins ont voté à l'unanimité le fait qu'il ne devait pas y avoir de fermeture, explique Olivier Fénioux, secrétaire départemental CGT Santé. Quand on demande au directeur où les patients vont aller, il nous dit que ce sera aux médecins de décider. Mais les médecins n'ont aucune autre alternative que le CRAP à proposer aux malades !"
Les malades risquent donc de s'adresser aux autres services de l'établissement de santé mentale de Prémontré ou aux hôpitaux généraux de la région. "Il n'en est pas question, il y a déjà de l'usure professionelle et des problèmes de sous-effectif dans certains autres services. Et puis c'est une spécialité, les autres soignants n'ont pas forcément la formation, c'est impossible", déplore le délégué.
Une prise en charge urgente et spécifique
"On ne peut pas non plus les rediriger vers les hôpitaux généraux de l'Aisne, qui sont déjà à saturation ! La fermeture du centre va mettre encore plus en difficulté leurs services des urgences. Et la psychiatrie, c'est de la prise en charge à moyen ou long terme, ce n'est pas le même fonctionnement qu'un hôpital général." Autre problème : les hôpitaux peuvent proposer un sevrage physique, qui dure cinq jours pour l'alcool, mais sans l'accompagnement psychologique essentiel pour se soigner.
Pour Stéphanie*, infirmière au CRAP, la fermeture du centre cet été risque d'avoir de graves conséquences sur les malades. "Si quelqu'un vient pour être pris en charge, et qu'on lui dit qu'on l'accueillera dans deux mois, en septembre, c'est très dangereux pour lui. Pendant ces deux mois, tout peut se passer.", déplore-t-elle. "Quand ils demandent à faire une cure, c'est qu'ils sont déjà bien bas, ils ont en général perdu leur travail et sont parfois même à la rue... Certains sont à la minute du passage à l'acte !"
Vers une fermeture pérenne ?
Et l'inquiétude du syndicat concerne également l'avenir. De l'aveu même du directeur, il a été évoqué, pour pallier les problèmes budgétaires, de fermer définitivement ce service. "Pour l'instant, il est un peu tôt pour en parler, mais c'est une option que nous avons soulevée, oui." Une éventualité qui ne convient ni à la CGT, ni à la commission médicale. Les négociations à ce sujet devraient avoir lieu à la fin du mois de juin.Olivier Fénioux, le secretéraire départemental CGT Santé, compte interpeller le préfet à ce sujet, et aborder le sujet avec l'Agence régionale de santé le 25 juin.
*le prénom a été changé