À l'issue de huit jours d'audience devant les Assises de l'Aisne, Florian Courtine, Damien Neveux et Florentin Marro ont été condamnés à 20 ans de réclusion. Ils étaient jugés pour le meurtre de Bruno Charles, 56 ans, retrouvé mort dans la cave de son immeuble en 2018.
Après plus de sept heures de délibération, les jurés ont suivi les réquisitions de l'avocat général en condamnant les trois accusés du meurtre de Bruno Charles à 20 ans de réclusion criminelle. Parmi eux, deux d'entre eux étaient déjà en détention provisoire : Florian Courtine et Damien Neveux. Florentin Marro, accusé des mêmes faits, comparaissait libre. Il a été incarcéré à l'issue de l'audience. La mère de ce dernier a également été condamnée à un an de prison ferme pour destruction de preuves.
Une décision qui satisfait les proches de la victime. "Il y a un soulagement, une sérénité dans le délibéré qui les apaise, a déclaré leur avocate Pauline Rainaut. Des questions, il en reste après les débats, on n'y a pas répondu, mais cette décision de justice leur permettra d'avancer. C'est une première étape de leur deuil."
Battu à mort
Le corps de Bruno Charles, 56 ans, avait été retrouvé le 18 décembre 2018 dans la cave de son immeuble à Laon. Il gisait dans une mare de sang. Visiblement victime d'un déchaînement de violence, il aurait succombé à une hémorragie.
"On a clairement déshumanisé un homme, on l'a frappé comme on aurait frappé dans un arbre de colère, on a complètement oublié l'humanité de cet homme qui a été battu à mort", estimait Caroline Letissier, l'autre avocate des parties civiles, le jour de l'ouverture du procès.
Elle décrit la victime comme un fils attentionné et un père présent. "Il appelait chaque jour sa fille pour avoir des nouvelles de celle-ci et de ses petits-enfants. C'est aussi un homme qui avait beaucoup soutenu sa fille lorsqu'elle est tombée enceinte très jeune. Dès qu'il avait un petit peu d'argent, et il en avait très peu, le partageait notamment avec sa fille et ses amis, a-t-elle expliqué à notre équipe. Il adorait aussi faire les brocantes, c'était un collectionneur et un passionné de rock. Il avait beaucoup de qualités."
Un seul accusé avait reconnu les faits
La longue instruction n'avait pas permis d'établir clairement le mobile et les circonstances précises du meurtre. Pendant le procès, l'officier de police judiciaire qui a procédé aux premières contestations a décrit avec précision la scène de crime, photos à l'appui. Des images si violentes que la famille de la victime n'a pas souhaité les regarder. Florian Courtine, âgé de 21 ans au moment des faits, est le seul à les avoir reconnus. Il admet avoir frappé la victime avec un tesson de canette de bière.
Maxime Gallier, son avocat, s'est appuyé sur les expertises psychologiques et psychiatriques pour plaider en faveur de son client. "Le message que je voulais faire passer, c'est que la cour d'assises juge un homme et pas un monstre. Les experts ont pu nous dire qu'il y a quatre ans, ils avaient face à eux quelqu'un d'assez en marge de la société et carencé, parce que sans père ni mère. Les choses ont évolué aujourd'hui, on est quatre ans après les faits, et la solution qu'ils apportent, c'est de nous dire qu'il faut l'encadrer avec des soins qu'il doit respecter à la lettre, et il le fera."
À la fin des audiences, au moment où la parole lui a été donnée, Florian Courtine s'est d'ailleurs excusé auprès des proches de Bruno Charles, et a assuré avoir beaucoup travaillé sur lui-même pendant ses quatre années passées en prison. Son avocat assure qu'il accepte la décision qui a été rendue et qu'il assume l'acte commis.
Les arguments de la défense n'ont pas convaincu
Damien Neveux a quant à lui assuré jusqu'au bout n'avoir ni frappé ni tué la victime. Son avocat Cyrille Bouchaillou a d'ores et déjà indiqué son intention de faire appel. "Je suis assez curieux de connaître les motivations de cette décision qui me semble injuste, dans la mesure où Damien Neveux n'a jamais eu l'intention d'ôter la vie à cet homme. Il l'a toujours répété depuis le début de cette procédure. Il clamera son innocence jusqu'au bout, on recommencera et on essaiera de faire appel", a-t-il déclaré.
Le troisième accusé, Florentin Marro, nie lui aussi toute implication. Pour son avocat, les accusations contre son client relèvent de la "fiction juridique". Il estime que l'avocat général n'a basé son réquisitoire que sur des "hypothèses, des 'peut-être', des 'c'est possible que'". "Nous n'avons pas d'ADN, pas de preuves matérielles, il n'y a pas la démonstration que Mr. Marro est coupable des faits qui lui sont reprochés : il est innocent", a-t-il déclaré à notre équipe sur place pendant le procès.
La mère de Florentin Marro, Peggy Laforêt, accusée d'avoir détruit des preuves, n'a pas cédé non plus face aux questions des avocates des parties civiles et de l'avocat général. Si elle admet avoir été au courant du meurtre, elle clamait à la barre que ni elle ni son fils n'étaient impliqués.
Les jurés n'ont visiblement pas été convaincus par ces dénégations, puisqu'ils ont choisi de suivre les réquisitions de l'avocat général pour les quatre accusés. Ils ont dix jours pour faire appel.