PORTRAIT. Gabrielle Paillot, la justicière de l'Aisne au service des animaux

"Porte-parole des animaux". C'est ainsi que se décrit Gabrielle Paillot, habitante de Laon, dans l'Aisne. Un combat à coup de pétitions qui lui coûte cher. Elle est aujourd'hui traduite en justice correctionnelle pour diffamation.

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C'est son combat. Et elle ne compte pas l'abandonner de sitôt. Gabrielle Paillot lutte contre les actes de cruauté envers les animaux. Et ce n'est pas chose facile.

Un sanglier abattu sur un parking à Laon

Le 14 décembre dernier, elle devait comparaître au tribunal de Reims, en correctionnelle, "pour avoir voulu défendre par une pétition, fin 2019 un jeune sanglier abattu dans le centre-ville de Laon"

À l'époque, un sanglier s'était égaré. Des passants l'avaient repéré sur le parking d'un supermarché de Laon et l'avaient enfermé dans une aire de jeux afin qu'il ne fasse aucun dégât. La police avait fait appel à un lieutenant de louveterie, sous la direction du préfet. Il avait à son tour demandé l'intervention d'un agent de la Fédération des chasseurs. La bête avait alors été abattue sur place.

Interpeler les pouvoirs publics

Un acte qui a choqué Gabrielle Paillot, habitante de Laon. Révoltée, elle a lancé dans la foulée une pétition en ligne, recueillant 50 000 signatures.

L'abattage était "illégal" selon la pétition car "depuis février 2019, un nouvel arrêté pris par le gouvernement interdit de tuer les animaux à proximité des lieux publics : écoles, habitations, zones commerciales, etc." Paru au Journal officiel en mars 2019, le texte ne s'applique qu'aux cas de figure concernant la chasse à courre. Le sanglier retrouvé n'ayant pas été poursuivi par des chasseurs a donc été abattu légalement.  

Une conclusion qui désole Gabrielle Paillot. Elle ne "comprend pas qu'on puisse abattre des animaux comme ça, en public".

Procès en diffamation 

Mais l'histoire ne s'arrête pas là. Un membre des chasseurs l'a traduite en justice pour diffamation envers un particulier car dans son texte figurait un nom et la phrase "plus rien n'arrête ces êtres sanguinaires". Pour la militante, il ne s'agit pas de diffamation envers un particulier, mais d'un point de vue sur les chasseurs en général. "Sanguinaire, c'est relatif au sang. Quand il y a de la chasse, il y a du sang", se défend Gabrielle Paillot.

L'audience en correctionnelle fixée au 14 décembre a finalement été reportée à début mars 2022, au tribunal de Reims. "Ça fait un an que je vis l'enfer pour une pétition. C'est le monde à l'envers, je défends un animal, j'interpelle les ministères de la Transition écologique, de l'Agriculture et le président de la République pour que l'on fasse cesser ces dérapages près des lieux publics". 

65 pétitions pour porter la voix des animaux

Cette poursuite judiciaire la freine dans son combat. Elle qui a lancé 65 pétitions en moins de 5 ans, a maintenant peur de s'attirer des problèmes. Cette retraitée de l'Éducation nationale y avait mis du cœur pourtant.

À l'origine de son engagement, l'amour des bêtes. Un amour qui n'a cessé de croître au fil du temps dans la ferme de son grand-père, agriculteur. Une complicité, puis une nécessité. Gabrielle Paillot a grandi dans un HLM avec sa mère et ses sœurs "et puis mon chien, qui comblait l’absence de mon père qui nous avait abandonnées". 

Puis un événement a déclenché l'envie de porter son combat en dehors de chez elle. En 2016, Gabrielle Paillot tombe sur un article de journal relatant l'histoire d'un chien qui vient de se faire défenestrer du 2e étage d'un immeuble, par son propriétaire. Prise d'une grande empathie pour l'animal, elle court le voir à la clinique. "C'était plus fort que moi et à partir de là, je me suis dit que ce n'était plus possible."

Elle tente alors d'attirer l'attention sur des actes qu'elle considère intolérables en créant des pétitions, ou plutôt "outils techniques pour faire entendre la voix des animaux"

Considérer les animaux comme des "personnes non-humaines"

Son premier combat : "faire reconnaître les animaux comme des personnes non-humaines". S'il est reconnu depuis 2014 dans le code civil que les animaux sont dotés d'un "caractère sensible", Gabrielle Paillot souhaiterait aller plus loin. "Ce sont presque des personnes, avance-t-elle, ils comprennent et sont témoins de tout. Il leur manque juste la parole."

Du délit au crime 

Dans une autre de ses pétitions, la militante interpelle le ministre de la Justice pour "faire reconnaître le crime contre les animaux dans le code pénal". Aujourd’hui, en France, le fait publiquement ou non, d'exercer des sévices graves ou de commettre un acte de cruauté envers un animal domestique, ou apprivoisé, ou tenu en captivité, est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende. Mais il s'agit d'un délit.

Pour un numéro vert pour les animaux 

La "porte-parole" des animaux souhaiterait également la mise en place d'un numéro vert d'urgence, disponible 24h/24 et 7j/7, pour les personnes témoins de maltraitance animale. "Il pourrait être lié à une brigade de protection animale" Cette pétition a recueilli 232 213 signatures.

Malgré le risque de sanctions judiciaires, Gabrielle Paillot n'a pas encore dit son dernier mot.

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