Pénurie d'huile : le tournesol, la nouvelle culture en plein essor dans l'Aisne

Le décor de nos campagnes devrait changer quelque peu dans les mois à venir et se parer d'une belle couleur jaune. En cause, la culture du tournesol vers laquelle de plus en plus d'agriculteurs se tournent, notamment dans l'Aisne. La tendance tombe à pic face à la pénurie d'huile générée par la guerre en Ukraine. Pour autant, l'intérêt pour cette plante se développe déjà depuis plusieurs années.

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"Aujourd'hui, c'est 10% de ma ferme", Hugues Bécret, agriculteur à Toulis-et-Attencourt dans l'Aisne s'est lancé depuis deux ans dans la culture du tournesol. Depuis 10 jours, il vient de terminer ses semis de l'année. Une surface doublée désormais : 15 ha l'an passé, 27 cette année. "On essaie de trouver [des solutions]. Tout le monde cherche un petit peu. On en parle depuis trois ou quatre ans. Ça se faisait du temps de nos parents", raconte Hugues Bécret.

Si le tournesol garde l'image d'une plante aimant le soleil et la chaleur, il s'adapte visiblement très bien à notre climat. "Sa culture ne pose a priori pas de problème dans notre région. Sauf s'il fait un temps sec dans des terres séchantes, ça peut pénaliser", estime l'agriculteur du Marlois. 

Rentabilité améliorée

Comme Hugues Bécret, de plus en plus d'exploitants du département plantent du tournesol. Chacun imagine un lien avec la pénurie d'huile née de la guerre en Ukraine. Pour la plupart des agriculteurs, ce n'est pas le cas. Même si cette production d'huile supplémentaire risque évidemment de tomber à pic, la démarche a débuté en réalité bien avant. Les agriculteurs commandent en effet leurs semences plusieurs mois à l'avance.

C'est une culture très peu gourmande en produits phytosanitaires. En plus, elle ne demande pas vraiment un matériel spécialisé. On prend le semoir à betterave et on récolte avec la moissonneuse batteuse

Hugues Bécret, agriculteur

L'explication de cet engouement, ce sont les nombreux avantages liés à la culture du tournesol. "Il y a de nouvelles variétés. C'est une culture qui n'a pas besoin de beaucoup d'azote : 200 kg l'hectare pour du blé contre 50 pour du tournesol", explique Hugues Bécret. Des coûts de production maîtrisés à l'heure où de nombreux prix s'envolent, voila de quoi offrir au tournesol une rentabilité améliorée et susciter l'intérêt des agriculteurs.

Germain Gojard, agriculteur à Priez dans le sud de l'Aisne, s'est ainsi lancé dans la culture du tournesol depuis trois ans. Il en produit entre 10 et 15 hectares qu'il vient de semer depuis mi avril. "C'était lié aux conditions. Nous avons eu plusieurs années sèches et c'est aussi suite à un échec sur des colzas. C'était l'occasion de tester", raconte cet agriculteur aujourd'hui très satisfait par cette culture, si ce n'est un problème local de nuisances liées à la présence de corbeaux et de pigeons.

"C'est une plante formidable. Qu'il fasse sec ou pluvieux, quand c'est parti, c'est parti. Il y a des progrès par sélection de variétés mieux adaptées à nos régions. Elle a besoin de moins d'intrants, azote, phosphates, potasse. Elle est moins exigeante face aux maladies. Il ne faut qu'un seul passage pour désherber". Le seul risque serait un orage qui ferait plier les fleurs ou les corbeaux, confie Germain Gojard.

Remplacer le maïs et le colza

L'engouement est notable dans l'Aisne sans que l'on puisse le chiffrer précisément pour le moment. La plante pourrait par ses avantages remplacer maïs et colza. Philippe Meurs, président de l'arrondissement de Château-Thierry de l'Union des syndicats agricoles de l'Aisne est également en plein semis de tournesol. "Il y a de moins en moins d'obstacles avec le changement climatique. On en fait depuis quelques années. Ça va bien dans des terres légères. L'opportunité est en lien avec la date de semis. C'est une culture rustique, une culture de printemps, une tête d'assolement. Cela se substitue facilement au maïs. Ce n'était pas trop rentable, mais aujourd'hui. la rentabilité est plus évidente", analyse le représentant. 

Le tournesol produit dans le département sera généralement vendu aux coopératives pour faire de l'huile et aussi du tourteau qui pourra entrer dans l'alimentation des bêtes.

Son essor trouve aussi ses limites pour le moment. "Ceux qui ont des betteraves ne peuvent pas trop changer car ils ont des engagements", explique Philippe Meurs. Le tournesol ne va donc pas supplanter demain les cultures traditionnelles de notre région. Pour autant, on peut parier que les surfaces plantées augmenteront encore l'année prochaine si la pénurie d'huile reste d'actualité.

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