L'Unesco a annoncé ce vendredi 13 décembre retirer de sa liste du patrimoine culturel immatériel de l'humanité le carnaval belge d'Alost, accusé d'antisémitisme. Il avait permis l'exhibition d'un char caricaturant des juifs orthodoxes.
Accusé d'antisémitisme, le carnaval belge d'Alost est retiré de la liste du patrimoine culturel immatériel de l'humanité de l'Unesco. Cette manifestation qui se déroule en Flandre, inscrite sur sa liste en 2010, était dans le collimateur de l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture depuis sa dernière édition en mars.
C'est la première fois que l'Unesco procède à un retrait de la liste du patrimoine culturel immatériel. La présence dans le défilé d'un char caricaturant des juifs orthodoxes aux nez crochus, assis sur des sacs d'or, avait indigné les représentants de la communauté juive de Belgique (environ 40 000 personnes).
Le bureau du Comité du patrimoine immatériel de l'Unesco avait alors unanimement décidé de mettre à l'ordre du jour de la réunion de Bogota un possible retrait du carnaval de sa liste.
"L'Unesco se devait d'être vigilante et ferme quant aux dérives d'un festival classé au Patrimoine de l'humanité qui en bafoue les valeurs élémentaires", avait alors déclaré la directrice générale de l'Unesco, Audrey Azoulay. "Ce n'est, de plus, pas la première fois que ces chars racistes et antisémites défilaient dans ce festival", avait-elle ajouté.
? FLASH
— UNESCO en français (@UNESCO_fr) December 13, 2019
Le carnaval d’Alost, #Belgique??, retiré de la Liste représentative du #PatrimoineImmatériel de l’humanité.
ℹ️ https://t.co/j0OXjyP2ev #14com pic.twitter.com/oYPkwxe6cj
Ne pas "excuser l'intolérable"
Une allusion à l'édition 2013, quand la société carnavalesque avait eu l'idée de faire défiler un char montrant en officier nazi le chef du parti indépendantiste flamand N-VA, supposé être favorable à la déportation des francophones.
Irina Bukova, qui dirigeait à l'époque l'Unesco, avait fustigé "une insulte à la mémoire des six millions de juifs morts durant l'Holocauste". De son côté, le bourgmestre de la ville, Christophe D'Haese, (N-Va), revendique le droit de "se moquer de tout". "On se moque de l'Église, des rois, des juifs, de la politique internationale, des musulmans. C'est la liberté d'expression dans sa plus large interprétation", avait-il affirmé fin octobre à l'AFP.
Il y a dix jours, ce dernier avait pris l'Unesco de court, alors qu'il n'est pas maître de la décision, en annonçant dans la presse, le retrait du carnaval de la liste du patrimoine immatériel.
"C'est une réponse à tous ceux qui veulent nuancer, justifier ou excuser l'intolérable mais ce n'est malheureusement pas la fin de l'histoire. Nous déplorons mais aujourd'hui nous redoutons également les conséquences désastreuses du Carnaval, qu'ils soit reconnu ou non par l'Unesco", a réagi Yohan Benizri, président du Comité de coordination des organisations juives de Belgique (CCOJB).
Pour l'édition 2020 en février, "nous ne voulons plus de caricatures diffamantes qui nous rappellent la période nazie", a déclaré Hans Knoop, porte-parole du Forum des organisations juives, qui fédère les associations communautaires de Flandre. "Cela donne à la Belgique une image extrêmement négative à travers le monde. Rien que cela justifierait de dire 'stop'", a-t-il ajouté.
L'Unesco classe depuis une convention de 1972 les plus beaux sites du monde, mais a désormais aussi autorité pour protéger le "patrimoine immatériel culturel de l'humanité", aux termes d'une convention signée en 2003. Plusieurs carnavals ou processions traditionnelles de géants en Belgique --comme dans le nord de la France-- ont été ainsi honorés depuis une quinzaine d'années: Ath, Binche, Dendermonde, Mons... Le carnaval d'Alost, qui a une histoire de plus de 600 ans et est l'un des plus populaires.