La Fondation de France a publié un rapport rigoureux sur la philanthropie dans les territoires français, mettant en lien, dans chaque région, revenu médian et don moyen.
Le Nord plutôt généreux, malgré les apparences. C’est une des conclusions qu’on pourrait tirer du rapport "La philanthropie dans les territoires", que vient de rendre public la Fondation de France. Son observatoire a analysé les mécanismes du don à partir de chiffres de l’année 2013. Pour le Nord-Pas-de-Calais, le bilan dressé est assez pointu.
Des chiffres bruts expliqués
L’observatoire de la Fondation de France s’est d’abord penché sur un critère : le nombre de foyers donateurs. De ce côté-là, une statistique globale a été établie pour la nouvelle grande région. Elle se classe douzième sur treize : seulement 12,7% de foyers fiscaux ont donné aux causes d’intérêt général en 2013. Dans les explications qui accompagnent son classement, la Fondation de France met en valeur un lien entre pratiques religieuses et don. Les traditions de charité chrétienne ont fait naître une pratique "sociale, moderne et souvent désacralisée" du don : quelque chose qui tiendrait de l’héritage. Or le Nord est considéré comme l’extension d’un bassin parisien très tôt laïcisé : l’influence de la religion y a baissé dès le XVIIIe siècle.La Fondation de France s’est aussi penchée sur le montant moyen du don, qui est loin d’être homogène dans le Nord-Pas-de-Calais. Le rapport précise que la présence d'une grande agglomération (ici, Lille) influence le montant des dons en le tirant vers le haut. Le département du Nord a ainsi dépensé 350 euros en moyenne par foyer donateur, au-dessus de la moyenne des dons hors région parisienne. Le Pas-de-Calais, lui, est avant-dernier, avec 256 euros. Alors, le Nord, une région près de ses sous ? C’est plus compliqué que ça.
Un nouvel indice
Le rapport est allé plus loin, avec la création d’un "indice de générosité relative". Concrètement, les auteurs du rapport ont croisé le revenu médian et le rang moyen du don : ce que chaque région donne avec les moyens dont elle dispose. Surprise : le Nord-Pas-de-Calais se classe deuxième. En effet, cette région est une zone en difficulté, que le rapport classe dans les "zones de détresse économique". La région (et "notamment les jeunes") souffre de la précarité économique et du chômage , pointe le rapport. Dans ces zones une spécificité se dégage : la générosité est prise en charge par les couches les plus aisées de la population.Le Nord en est un exemple typique, avec la présence de la famille Mulliez. Le groupe notamment propriétaire d’Auchan, troisième fortune de France, a créé plusieurs fonds et fondations. Le rapport lui attribue même une "philanthropie familiale très structurée". Le département du Nord concentre d’ailleurs de nombreuses fondations, qui en font, selon le document "un pôle essentiel de la philanthropie française du XXIème siècle". Certains domaines sont plus représentés : l’enseignement supérieur et la recherche, l’insertion des jeunes et la lutte contre la précarité. Lille compte à elle seule 55 fondations : elle est la troisième ville de France dans ce domaine.
Le rapport l’a constaté : la carte de la philanthropie en vient à recouper par endroits celle des inégalités territoriales. La Fondation de France a pris en compte la richesse disponible et la façon dont elle est employée, et le Nord-Pas-de-Calais ne s’en sort pas si mal. "Que qui peut puisse", telle pourrait être sa devise.