Confrontés à la hausse des dépenses sociales, les départements mettent la pression sur le gouvernement pour obtenir une réorganisation du financement du RSA, faute de quoi ils menacent de ne plus financer certains projets et équipements.
"Nous sommes extrêmement déçus. Aucune solution n'est proposée par le cabinet du Premier ministre", a déploré mercredi Dominique Bussereau (Les Républicains), le président de l'Assemblée des départements de France (ADF). Les discussions entamées mi-2015 avec Matignon se sont achevées, selon lui, sur "un constat d'échec", à l'issue d'une ultime réunion mardi. "On nous parle éventuellement de quelque chose dans la Loi de finances 2017", dit-il. Depuis des mois, l'ADF alerte sur les conséquences désastreuses de la hausse des dépenses sociales sur les finances des départements. Conjuguée à la baisse des dotations de l'Etat, l'augmentation du nombre de prestataires du Revenu de solidarité active (RSA) en particulier met nombre d'entre eux dans de graves difficultés budgétaires.
Depuis 2004, les départements versent les allocations sociales et l'Etat doit compenser le montant des prestations. Mais le mécanisme s'est détérioré au fil des ans, avec la hausse des dépenses du RSA, que l'ADF estime en moyenne de 9% à 10% par an. En 2015, les dépenses du RSA ont avoisiné 10 milliards d'euros, avec un montant de près de 4 milliards restant à la charge des départements. Début décembre, le gouvernement a accordé un soutien exceptionnel global de 50 millions d'euros à une dizaine d'entre eux, parmi les plus en difficulté, dont le Nord, le Pas-de-Calais ou la Seine-Saint-Denis. Fin 2016, "ce sont 40 à 50 départements qui seront en difficulté budgétaire, qui ne pourront plus assurer leurs missions sociales, et peut-être ne pas payer la totalité du RSA", avertit Dominique Bussereau. Ces difficultés sont partagées "sur tout le territoire et tous les collègues qui n'ont pas encore voté leur budget sont en grande difficulté", affirme-t-il.
"Impasse financière"
Stéphane Troussel, le président PS du Conseil départemental de Saint-Saint-Denis, où le cap des 100 000 allocataires du RSA a été franchi, a déjà décidé de présenter un budget 2016 "dans lequel il n'y aura pas un centime de plus qu'en 2015" pour financer cette aide sociale. Jean-Léonce Dupont, son collègue UDI du Calvados, dresse un constat aussi alarmant. "Si cette solidarité nationale, essentiellement prise en charge par le local, n'est pas réorganisée en terme de financement, tous les départements finiront à un moment donné dans l'impasse financière", déclare-t-il à l'AFP. Les discussions avec le gouvernement portent notamment sur la "renationalisation" totale ou partielle du financement du RSA, c'est-à-dire sa prise en charge par l'Etat.L'ADF attend des décisions avant fin mars, date butoir pour le vote du budget des départements. En contrepartie, les départements seraient prêts à céder certaines dotations de l'Etat, mais pas leurs ressources dynamiques, comme les droits de mutation (frais de notaire) et taxes foncières. "Les départements vont réagir fortement si nous n'avons pas un geste très fort du chef de l'Etat ou du Premier ministre dans les jours à venir", prévient Dominique Bussereau. Le président de l'ADF va renouveler par courrier ses demandes auprès de Manuel Valls et François Hollande pour tenter de parvenir à une solution. Dans leur bras de fer avec l'Etat, les départements pourraient cesser de cofinancer des projets et des équipements qui ne relèvent pas de leur compétence, notamment dans le cadre des contrats de plan passés avec l'Etat. Ce qui concernerait le réseau routier, le numérique... Autre idée qui circule à l'ADF : demander à tous les prestataires du RSA de s'inscrire à Pôle emploi, ce qui ferait grimper les chiffres du chômage au moment où l'exécutif cherche à tout prix à les faire baisser. Outre le RSA, les départements financent l'Allocation personnalisée d'autonomie (APA) et la Prestation de compensation du handicap (PCH).