Avec la multiplication des sites de rencontre en ligne, de nombreuses agences matrimoniales ont fermé leur porte dans la région ces dix dernières années. Mais aujourd’hui, de plus en plus de célibataires font de nouveau appel à des professionnels pour trouver l’amour.
Meetic, Tinder, Badoo, Adopte un mec : sur internet, les sites de rencontre fleurissent depuis plus de dix ans, promettant des relations sincères et durables. Selon un sondage BVA, 1 Français sur 5 aurait déjà consulté ou utilisé une application de rencontre. Il faut dire que l’idée de trouver l’amour depuis son canapé peut paraître séduisante. Mais depuis quelques années, beaucoup d’utilisateurs finissent par délaisser ces sites, déçus après avoir enchaîné des rencontres sans lendemain.
Beaucoup de gens mentent sur leur profil en ligne
C’est en tout cas le constat fait par les agences matrimoniales de la région, qui comptent beaucoup d'anciens utilisateurs parmi leurs nouveaux adhérents. "Les gens sont déçus d’internet car il n’y a pas de filtres, confirme Michèle Taureau, directrice de plusieurs agences dans les Hauts-de-France. Beaucoup de jeunes femmes viennent me voir parce qu’elles ont été traumatisées par des rencontres faites sur internet". "Beaucoup de gens mentent sur leur profil en ligne, ajoute Jocelyne Defrenne, qui gère deux agences à Reims et à Laon. Certains mentent sur leur âge, d’autres se disent célibataires alors qu’ils sont mariés. Il y a aussi des pervers et des alcooliques ! Nous, nous sommes là pour vérifier les profils".
Le retour des agences
Les années 2000 ont été particulièrement difficiles à vivre pour les agences matrimoniales, qui ont été nombreuses à mettre la clé sous la porte à cause du développement des rencontres en ligne. "Lorsque j’ai débuté en 1993, il y avait dix agences à Reims. Aujourd’hui, nous ne sommes plus que deux" constate Jocelyne. Pour survivre, les agences matrimoniales abattent leurs nouvelles cartes : un service sécurisé et personnalisé.
Les agents rencontrent eux-mêmes les adhérents, vérifient leur identité, leur âge, leur profession et demandent des justificatifs en cas de divorce. Avec ses huit agences situées en Hauts-de-France et en région parisienne, Michèle Taureau multiplie les kilomètres pour aller à la rencontre de ses clients directement à domicile. "Cela demande plus de boulot mais il est indispensable de rencontrer les gens pour les jauger, comprendre leurs intentions et connaître leurs critères".
Beaucoup de gens pensent que les agences matrimoniales sont ringardes
Conseillère matrimoniale depuis 21 ans, Michèle compte entre 500 et 1000 adhérents dans ses fichiers. "La moyenne d’âge ? Entre 40 et 65 ans mais j’ai aussi des trentenaires. Ma plus jeune adhérente a 23 ans". Tous doivent signer un contrat de 6 mois ou d’un an, moyennant environ 1500 euros le forfait. En échange, Michèle s’engage à leur présenter d’autres adhérents qui correspondent à leurs critères. Selon elle, environ 50% d'entre eux trouveraient chaussure à leur pied. "Pourtant, beaucoup de gens pensent que les agences matrimoniales sont ringardes, il y a encore des idées reçues" ajoute-t-elle.
À Laon, Jocelyne affiche fièrement sa réussite : 13 couples formés depuis janvier 2019. Loin des retraités veufs ou divorcés, elle revendique aussi une clientèle qui rajeunit, échaudée par le côté impersonnel des sites de rencontre. Parmi ses clients, des fonctionnaires, des cadres ou encore des employés. "Les gens ont besoin d’interaction humaine, ils en ont marre d’être jetés comme des kleenex après un rendez-vous". Conseillère depuis 26 ans, elle est toujours aussi émue lorsqu’elle reçoit des faire-parts de naissance.
Se fier à l'instinct
Du côté de Lille, Xavier Jeanson mise aussi sur la personnalisation pour concurrencer les sites de rencontre. "Nous fixons énormément de paramètres pour déterminer les envies de nos clients, beaucoup plus que ce que proposent les sites en ligne, explique le conseiller, qui s’est lancé dans la profession il y a cinq ans. Et puis il y a aussi l’expérience et l’instinct qui font que l’on vise souvent juste".
Pas toujours facile à vivre, le métier de conseiller demande beaucoup de patience et d'empathie. "Il ne faut pas se laisser bouffer, avertit Michèle Taureau. Certains adhérents ont des histoires difficiles et il faut trouver le recul nécessaire".
Qu’ils soient dans le métier depuis 25 ou 5 ans, Jocelyne, Michèle et Xavier restent des passionnés. "Nous aidons les gens à voir demain, à être optimistes" ajoute Xavier. "Quand un monsieur de 81 ans m’envoie un courrier pour me dire qu’il est sous le charme de Françoise et qu’il est retombé amoureux, forcément ça me touche beaucoup" conclut Jocelyne.