Près d’Ypres dans les Flandres belges, la nuit du 12 juillet 1917, l’artillerie allemande déclenche un bombardement nourri sur les Britanniques. Les obus libèrent un gaz qui dégage une légère odeur d’ail ou de moutarde. Les soldats ne se doutent de rien. Ils viennent pourtant de subir la première attaque d’une nouvelle arme chimique terrifiante : le gaz moutarde ou ypérite, référence à la ville d’Ypres toute proche.
A Ypres, en avril 1915, la guerre chimique a franchi un palier avec l’utilisation par les Allemands du gaz de chlore. Les attaques successives ont appris aux soldats à se protéger de mieux en mieux. En 1916, les premiers masques à gaz avec filtres à charbon apparaissent. En cet été 1917, la menace des gaz semble maîtrisée mais les Alliés ignorent que les Allemands ont mis au point un gaz encore plus toxique : le sulfure d’éthyle dichloré.
En cette nuit du 12 juillet 1917, une nouvelle fois les Britanniques font les frais de cette expérimentation. Sur le moment, ils ne ressentent rien, à peine une odeur de moutarde, l’autre nom de l’ypérite. Mais au lever du jour, les soldats alliés se réveillent dans d’atroces douleurs : vomissements, brûlures sur tout le corps. L’ypérite n’agit pas que sur les voies respiratoires, mais aussi directement sur les yeux et à travers la peau.
14 000 hommes sont touchés, 500 succombent. Mais ce nouveau gaz ne permet pourtant pas de réussir une percée. Car ce n’est pas une arme de frappe mais d’usure. Traumatisante. Après-guerre, de nombreux soldats touchés par l’ypérite mourront des années plus tard. En 1925, le Protocole de Genève interdit les armes chimiques. Cela n’empêchera pas le gaz moutarde d’être utilisé jusqu’à la fin du XX ème siècle.