Alors que le gouvernement ne veut plus voir de migrants errer à Calais, 79 réfugiés de l'ex-"Jungle" viennent de terminer dans le Nord une formation accélérée à la langue française et aux métiers en manque de main-d'oeuvre, dans une expérimentation inédite qui s'étendra à 1000 réfugiés en septembre.
Vendredi, en salle des fêtes de la préfecture du Nord, Soudanais, Afghans et Tchadiens brandissent avec fierté leur certificat de fin de Programme d'insertion par le logement, l'orientation et le travail (Pilot), chapeauté par le Fonds d'assurance formation du travail temporaire (FAF-TT) qui répondait à une demande du préfet du Nord.
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— Préfet Nord (@prefet59) 30 juin 2017
Après trois mois et demi d'apprentissage du français avec l'Association professionnelle pour la formation des adultes (Afpa), ces 79 migrants, sélectionnés lors du démantèlement de la "Jungle" de Calais en octobre 2016, ont suivi des stages en entreprise via des sociétés d'intérim. Logés et nourris, leur procédure de demande d'asile a été accélérée.
Mohamed, grand dadais soudanais de 27 ans, quatre mois passés dans la "Jungle", raconte dans un français au niveau encourageant: "J'habite à Cantin (Nord) depuis huit mois et je travaille pour Boulanger comme préparateur de commandes à Dourges (Pas-de-Calais). Au début le français c'était difficile, mais avec la pratique, cela va aller." Son visage s'assombrit un instant: "C'est Calais qui était très difficile."
Adam, Soudanais de 26 ans, apprécie d'autant plus sa nouvelle vie que lui aussi se souvient de ses conditions de vie désastreuses dans le bidonville, cinq mois durant: "La +Jungle+ c'était très, très dangereux. Alors que maintenant, j'ai une résidence sécurisée, avec un code à l'entrée!"
"Est-ce que nous prenons la place de Français ?"
Le programme Pilot s'enorgueillit d'avoir débouché sur un emploi pour 53 des participants, entre CDI intermittents, CDI d'insertion, CDD et intérim. La formation doit être approfondie pour 26 autres réfugiés. Pilot "a offert à la République française, qui en a bien besoin, les capacités à se rassembler autour de l'intégration", s'est félicité le préfet du Nord Michel Lalande au micro. Jusque-là, "ce que l'on savait admirablement faire dans ce pays c'était mettre les réfugiés dans des centres, et puis seulement au bout de (l'instruction de) leur demande d'asile on disait +Ca y est, il va falloir commencer à travailler+, et on avait perdu deux ans!"Cette insertion n'a pas été sans inquiétude. "Au sein des entreprises, il y a eu d'abord beaucoup d'a priori par rapport au travail avec des réfugiés. Mais dès qu'on les rencontre on s'aperçoit que tout va bien", relate Justine, chargée de mission pour FAF-TT.
#Insertion #Emploi Bilan très positif du programme de #formationprofessionnelle pour les personnes migrantes dans le #Nord. pic.twitter.com/O5WUspCsa9
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C'est assumé, le dispositif Pilot repose sur une insertion via des emplois dans des secteurs où la main-d'oeuvre manque: logistique, maçonnerie, peinture... La directrice de l'agence Adecco de Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais) a témoigné: "Certains réfugiés m'ont demandé: +Est-ce que nous prenons la place des Français?+ Mais non, actuellement de nombreuses offres d'emploi ne sont pas pourvues."
"Ce qu'ils veulent, c'est travailler. Les Soudanais, Afghans et Tchadiens viennent de pays aux systèmes éducatifs moins développés, donc ils étaient polycompétents", souligne Margaux Brousse, responsable du projet réfugiés à la direction générale de FAF-TT.
L'Etat veut d'ores et déjà élargir le dispositif : 1.000 réfugiés de centres d'accueil répartis dans toute la France commenceront leur formation en septembre.