1639 concerts, 4000 musiciens venus du monde entier, le jazz club de Dunkerque est devenu un lieu incontournable de la scène Jazz en 40 ans. Anciennement installé dans une cave de la MJC, il accueille maintenant son public venu de toute la région au pôle Marine de Dunkerque.
Le Jazz Club de Dunkerque, c'est une série de 3 concerts par mois, avec des artistes internationaux aux styles éclectiques. C'est aussi 4500 spectateurs chaque année avec un public fidèle (le club compte 430 adhérents) qui se déplace chaque fois avec la même envie : assister à une magnifique performance artistique. Bingo, il n'est jamais déçu.
Un aller-retour New-York - Dunkerque pour jouer au Jazz Club
Ces 25, 26 et 27 novembre derniers, c'était au tour de Nguyên LÊ, habitué de cette salle, de se produire avec son groupe. Un concert annulé et reporté 4 fois à cause du Covid, mais qui a enfin eu lieu. Et ça vallait le coup ! Le batteur percussionniste John Hadfield a fait le déplacement depuis New-York. Rien que ça. Chris Jennings, le contrebassiste, est originaire du Canada. Quant au vibraphoniste Illya Amar et au guitariste et principal compositeur Nguyên LÊ, ils ont traversé la France depuis Lyon pour venir jouer à Dunkerque.
Les spectateurs ont pu écouter en live leur album "Streams" ("courants" en anglais) : "Le monde d'aujourd'hui est peuplé de courants. Les informations circulent dans tous les sens. Toutes les cultures vont et viennent. Il faut juste les attraper et c’est ce qu’on essaye de faire avec ce groupe." Des compositions inspirées de musiques traditionnelles vietnamiennes, mais aussi japonaises, indiennes ou encore maghrébines. Un album aux influences internationales et jamais très loin d'un engagement politique. La chanson "Bamiyan", par exemple, rendait hommage aux statues de Bouddha détruites par les talibans en Afghanistan.
Si Nguyên LÊ vient régulièrement au Jazz Club de Dunkerque depuis 20 ans, c'est en partie pour son public : "il a à la fois une capacité d’écoute de concentration sur des moments très calmes et d’autres moments où ils vont se déchaîner, participer à la joie de la musique". Ce 25 novembre en tout cas, il a été emporté : "c'était une évasion avec des sons qui font rêver mais qui rappellent aussi l’actualité, c’est ça la force du jazz". Une spectatrice se réjouissait d'avoir la chance d'assister à ce type de performance : "c’est génial d’avoir ça, cette qualité de musiciens qui viennent du monde entier, dans un lieu de vie comme ça, à proximité". Si elle a fait le déplacement depuis Calais, une autre est a même fait la route depuis le Valenciennois : "je viens souvent ici... Je me déplace facilement pour les gens que j'aime !"
Car il faut le dire, c'est un lieu plutôt unique dans la région. Il s'agit en effet de la seule scène permanente de jazz dans les Hauts-de-France et sa fondatrice se plaît à dire qu'il a été plébiscité en 2001 par les musiciens qui le classent "meilleur Club de Jazz en France pour la qualité de la programmation et de l’accueil".
Linx, Texier, Laurent, Sclavis... une programmation exigeante
La liste d'attente est longue pour se faire programmer à Dunkerque. Le calendrier est booké jusque fin 2022. Au programme : David Linx, décoré "Chevalier des Arts et des Lettres" par le ministre de la Culture, Henri Texier, dont l'ensemble de la carrière a été récompensé par le prix "in Honorem", Géraldine Laurent, victoire du Jazz 2020, Louis Sclavis, élu notamment meilleur créateur européen en 1989. Beau programme !
Françoise Devienne, l'âme du Jazz Club
Et ce qui fait la singularité du Jazz Club, c'est aussi sa directrice, Françoise Devienne. Nguyên LÊ nous le confirme : "c'est à chaque fois un grand plaisir de retrouver Françoise qui est l’âme de ce lieu". Les artistes la contactent directement. Elle ne s'entretient pas avec les agents. Françoise Devienne est une VIP. Et elle le vaut bien... lorsqu'ils arrivent à Dunkerque, Françoise les conduit partout, elle réserve leur hôtel et leur table au restaurant avant chaque concert. Elle traite les artistes comme son fils, lui aussi musicien.
Françoise Devienne a bâti ce club avec ses mains et son âme. Les doigts sur un piano dès l'âge de 6 ans, elle découvre et tombe amoureuse du jazz au lycée. Elle s'abonne à un magazine et attend impatiemment, chaque mois, le dernier CD en vogue à l'époque, aux Etats-Unis. Elle devient institutrice mais finit par tout plaquer pour monter son club et s'adonner entièrement à sa passion musicale. Tout a commencé dans une petite cave de la MJC Terre Neuve, en 1983, "avec des bouts de chandelle... On n'avait rien." Et puis petit à petit… 1639 concerts plus tard, le Jazz Club fête ses 40 ans. "40 ans de ma vie... et je suis tellement prise par tout ça que je ne me suis pas rendue compte du temps passé", nous confie Françoise Devienne.
Qui succédera à Françoise Devienne ? Avis aux amateurs de jazz
Elle est encore présente, motivée par sa passion, qui la fait tenir malgré les drames, malgré les longs mois de confinement... mais un jour, elle dira "je ne suis plus apte". Alors elle anticipe et cherche la perle rare. Car n'importe qui ne saurait lui succéder : "il faut connaître le jazz, les artistes, les avoir suivis" pour faire perdurer ce lieu de vie et de musique. Le jazz club de Dunkerque.