Le procès d'un ancien patron d'un groupe d'ameublement s'est ouvert hier devant le tribunal de Dunkerque. Avec près de 300 personnes qui se sont constituées partie civile, l'audience a dû être délocalisée au Kursaal.
Des parties civiles assises dans des fauteuils rouges, face à une juridiction installée sur une estrade. La scène est peu commune.
Durant deux jours, le procès de "Dédé le Belge" s'est tenu au Kursaal, le palais des Congrès de Dunkerque.
Le ministère de la justice a décidé d'y louer la salle Jean Bart, un lieu habituellement réservé aux séminaires. Objectif : être en mesure d'accueillir des centaines de plaignants qui réclament le remboursement de leurs commandes ou acomptes, au propriétaire d'une société d'ameublement.
"Nous verrons à l'issue des trois jours si la salle fait le plein mais nous ne pouvions pas prendre le risque d'accueillir, surtout dans le contexte sanitaire que l'on connait, dans notre palais de justice traditionnel, une audience d'une telle ampleur", explique Guillaume Meunier, président du tribunal de Dunkerque.
Un procès plus de quatre ans après les faits
Tout commence en octobre 2017, lorsqu'une holding détenue par André Decroix est placée en redressement judiciaire. Celui qui est surnommé "Dédé le Belge" possède plusieurs entreprises : ITB (isolation thermique dans le bâtiment), DLB Cuisine et DLB Meubles, ouvert à Cappelle-la-Grande dans le Nord, un an plus tôt.
Le magasin ferme sans que les clients ne soient livrés ou remboursés de leurs commandes. Salariés et fournisseurs ne sont pas payés non plus. Le mois suivant, en novembre 2017, la liquidation judiciaire est prononcée. Près de 300 victimes portent plainte. Leur préjudice est estimé à plusieurs millions d'euros.
Le procès s'est ouvert plus de quatre ans après, ces 29 et 30 mars. André Decroix, son ex-femme ainsi que son associé ont été jugés pour détournements de fonds, faillites frauduleuses et faux bilans.
Pour l'entrepreneur, le procureur a requis quatre ans de prison dont deux fermes, avec un mandat de dépôt, ainsi qu'une obligation d'indemniser les victimes. Deux ans de prison avec sursis ont été requis pour l'ex-épouse ainsi que l'associé de "Dédé le Belge".
Des plaignants déçus et en colère
Les parties civiles, rencontrées devant la salle d'audience, témoignent toutes d'histoires similaires. "On a épargné, on avait commandé une salle à manger et un canapé puis on s'est fait rouler. On est démoralisés. Il nous a escroqué", raconte Gérard Gillard, un client qui a déboursé la somme de 1 971 euros. "Je me suis fait avoir", souffle Christine Bertin, qui elle a versé un acompte de 1 600 euros pour sa cuisine. "J'espère qu'il va payer pour ce qu'il a fait, c'est tout ce que je demande : réparation."
Il y a quelques années, on a commandé un salon. On a versé un acompte et on n'a jamais eu le salon. On voudrait savoir si, un jour ou l'autre, on va récupérer les 800 euros que l'on a versés.
José LépinoisClient et partie civile
Mais pour le premier jour de ce procès, mardi 29 mars, la salle d'audience n'a accueilli qu'une trentaine de plaignants sur les centaines de parties civiles.
"C'est une épreuve. Il y a des gens qui n'ont pas envie de confronter le gérant des sociétés DLB qui leur a fait du mal", explique Charlotte Catrix, avocate de 102 parties civiles qui ont un préjudice total estimé à plus de 500 000 euros.
L'achat d'un canapé pour des personnes, ça peut être l'achat d'une vie. C'est des gens qui vivaient dans des canapés qui avaient 20 ans, qui avaient prévu cet achat, qui étaient contents (…) mais qui n'ont jamais rien vu arriver. C'est dur, c'est très difficile.
Charlotte CatrixAvocate de 102 clients
Les plaignants doivent désormais attendre le 27 juin, date à laquelle le délibéré de ce procès sera rendu.