Convaincu que, face à l'agribashing, il faut communiquer, Bruno Cardot s'est associé pour créer une nouvelle vidéo à Thierry Bailliet un agri-youtuber de Loos-en-Gohelle qui partage sa volonté de changer l'image des agriculteurs en France. Le résultat fait sourire et réfléchir. Nous les avons contactés.
Bruno Cardot, agriculteur dans l'Aisne, près de Saint-Quentin, cultive des pommes de terre, du colza, des betteraves à sucre et du blé. Comme Thierry Bailliet, son ami aussi agriculteur, installé à Loos-en-Gohelle, il a été marqué par l'agribashing. Si le premier se rappelle des coups de fusil tirés sur des tracteurs il y a quelques années au plus fort de l'agribashing, le second se souvient que son fils a été harcelé au collège car il était fils d'agriculteur.
"On a 30 ans de retard en matière de communication. Or ces vidéos sont des moyens de passer des messages auprès du grand public de manière sympathique. Et il faut communiquer", explique Bruno Cardot. Car, pour lui "l'inconnu engendre la peur qui elle-même provoque de mauvaises réactions" qui peuvent se traduire par de "mauvaises lois" alors que "nous sommes plus vertueux qu'ailleurs".
"Un herbivore dans un monde de carnivores"
Exemple, "si la réglementation – et c'est vrai dans plusieurs cas de figures — est plus stricte en France qu'ailleurs en Europe et bien nous perdons des marchés", explique Bruno Cardot. Peut-être, mais les agriculteurs français peuvent ainsi jouer le rôle de premiers de cordée et montrer le bon exemple lui objecte-t-on. "Non", rétorque Bruno Cardot, "car comme le soutient Sébastien Abis, spécialiste de la géopolitique agricole, 'l'Europe est un herbivore dans un monde de carnivores'. Même si elle va dans la bonne direction de l'agroécologie, elle veut aller trop loin, trop vite, et met ses agriculteurs en danger".
Du coup, depuis une dizaine d'années Bruno Cardot communique contre ceux "qui détruisent notre agriculture", comme dans le clip ci-dessous de 2020 sur l'air d'Antisocial du groupe Trust.
Ce 14 juillet 2023, Bruno Cardot réédite la performance sur les terrils de Loos-en-Gohelle en compagnie de Thierry Bailliet. Sur l'air de "Partenaire Particulier" (du groupe éponyme) le duo parodie la chanson en demandant que les règles soient les mêmes pour tout le monde. "La date du 14 juillet" explique Bruno Cardot, "a été choisie en cas de remaniement... Alors, ça serait bien de retrouver Julien Denormandie" (ministre de l'Agriculture dans le gouvernement de Jean Castex), "pour davantage d'actes en faveur des agriculteurs".
Et l'agriculteur de prendre en exemple la part des importations de volailles de l'ordre de 50% en France à cause des contraintes réglementaires et des normes, selon lui. Être vertueux, aller vers une agroécologie d'accord, mais pas au point de se fermer à tous les marchés, en somme.
Thierry Bailliet, lui, prend, un autre exemple: l'eau. Il dit comprendre le besoin de faire attention à cette ressource, de l'économiser. Cependant, il regrette également un système ou toutes les quinzaines, des quotas devront être respectés, enregistrés par ses soins et communiqués ensuite à l'administration. Et l'homme de dire aujourd'hui regretter passer plus de temps dans les bureaux que dans les tracteurs. "C'est un truc administratif de plus qui donne encore le sentiment d'être fliqué", regrette-t-il.