Maya Magassouba est arrivé seul en France à l'âge de 15 ans et a fait du chemin depuis. Aujourd'hui apprenti en boulangerie à Grande-Synthe, il a été menacé d'expulsion avant de se voir offrir une récepissé de trois mois. Une première victoire.
Maya Magassouba est un jeune apprenti en boulangerie de 19 ans d'origine guinéenne. Il était depuis peu sous le coup d'une OQTF (Obligation de quitter le territoire français). Heureusement pour lui, ce jeudi 22 avril, à 19h30, il a obtenu un récepissé de trois mois. La préfecture va "regarder les résultats scolaires" avec attention. S'ils sont bons, il peut espérer obtenir un titre de séjour.
Une belle victoire pour une histoire qui avait pourtant mal commencé. Battu par son père, privé d'école, orphelin de sa mère - probablement décédée à la suite de conflits inter-ethniques - le jeune homme a quitté sa Guinée Conakry natale. Il est arrivé seul en France en mai 2017, à l'âge de 15 ans, après avoir traversé le Mali, le Niger, la Libye, la Méditerranée en barque puis l'Italie. Des chemins tortueux sur lesquels il ne reviendra pas durant notre entretien, tant les souvenirs et la douleur sont encore vifs.
"Étant mineur, je suis tout de suite parti à l'école. J'ai été dans une classe spéciale pour apprendre la langue au collège et j'ai passé le certificat de formation générale", détaille-t-il. En quelques mois seulement, Maya apprend le Français, langue qui lui était encore étrangère quelques temps après son arrivée.
Un modèle de réussite
Il explique que son choix d'orientation a été la boulangerie, "découverte par hasard grâce à un ami", qui s'est transformée petit à petit en véritable vocation. "Je voulais faire en priorité une formation de boulanger". Il enchaîne alors la distribution de CV après les cours, pendant les week-ends et les vacances. Et l'avenir lui a prouvé qu'il était fait pour ce métier.
"J'ai fait un mois de stage à Gravelines où j'ai appris énormément, raconte-t-il. Le propriétaire de la boulangerie m'a recommandé à un collègue, qui a voulu me prendre, puis j'ai été aussi pris à Grande-Synthe. Les deux me voulaient, j'avais le choix." Il décide de choisir Grande-Synthe, "pour rester près de [ses] amis".
Le propriétaire de la boulangerie m'a recommandé à un collègue, qui a voulu me prendre, puis j'ai été aussi pris à Grande-Synthe. Les deux me voulaient, j'avais le choix.
Depuis son arrivée en France, Maya se sent "bien intégré". Il joue dans un club de foot, suit sa formation de boulanger et, comme beaucoup de jeunes de son âge, a une vie sentimentale. "J'ai une copine avec qui j'ai des projets d'avenir, sa famille me connaît et me considère comme un des leur."
"Absence de caractère sérieux des études"
Et malgré son intégration par la formation en boulangerie, le sport, les amis et la vie privée, la préfecture avait décidé de ne pas lui accorder de titre de séjour dans un premier temps. Pour justifier cette décision, elle a mis en avant "l'absence de caractère sérieux des études" qui l'a conduit "à un échec au CAP en juin 2020".
En effet, durant le premier confinement, tous les cours sont passés à distance. "Je ne connaissais pas l'ordinateur, j'avais du mal avec les cours à distance, explique Maya, qui raconte la situation à Salem Khalfart, son maître d'apprentissage en boulangerie. Il m'a dit qu'il préférait que je vienne en entreprise, car je vais mieux apprendre par la pratique que par des cours en ligne". Sinon, en temps normal, il assure fréquenter l'école "régulièrement, comme tout apprenti."
Aujourd'hui, heureusement, une lueur d'espoir se dessine.
Des soutiens par milliers
Du côté de Salem Khalfat, auteur d'une pétition pour garder Maya en France qui est à 22.000 signataires, Maya est un "bon garçon qui travaille dur et ne compte pas les heures" pour qui il a décidé de "bouger tout de suite et de l'accompagner dans ses démarches".
C'est un bon garçon qui travaille dur et ne compte pas les heures.
"Je le forme depuis trois ans, il a fait ses preuves et les boulangers, ça ne court pas la rue, explique-t-il. Je veux l'embaucher après sa formation, et même s'il ne réussit pas son examen, je le signe quand même en CDI." Mais au-delà des bons rapports qui lient les deux hommes, il y a aussi un lien père-fils qui s'est crée. Maya voit en son maître d'apprentissage un "père de substitution" et ce dernier le voit également comme un fils.
Il a pu compter sur la présence de près de 70 personnes qui s'étaient rassemblées pour montrer leur solidarité le 13 avril dernier. Le maire de Grande-Synthe, Martial Beyaert (PS), a également exprimé son soutien. "À l'issue de mon rendez-vous de jeudi, il m'a dit qu'il sera là pour moi jusqu'à la fin du dossier et de ne pas m'inquiéter car il ne me laissera pas tomber", se réjouit Maya.
Du soutien qui lui donne la force de continuer son combat vers la régularisation pleine et totale : "Je me sens soulagé quand je vois tout ce monde autour de moi, ça me donne du courage, j'espère que ça va aboutir."