Le centre aquatique intercommunal Linéo, situé à Wormhout (Nord), est chauffé grâce à une chaufferie biomasse qui utilise les anas de lin. Ce projet écologique fait appel à une énergie propre, durable, innovante et provenant de teilleurs de lin locaux.
Le centre aquatique de Wormhout (Nord) est chauffé grâce aux anas de lin depuis plusieurs mois. Ce produit 100% végétal provient du teillage de la paille de lin produite localement.
La genèse du projet est "assez simple". André Figoureux, le président de la Communauté de communes des Hauts de Flandre (CCHF), "très soucieux des problèmes d'énergie fossile et comment faire pour s'en passer", a commencé à réfléchir à une alternative renouvelable il y a plus de cinq ans.
Le centre a ouvert ses portes en janvier 2022:
"On s'est dit que pour ce centre aquatique, il nous fallait trouver une formule qui nous éloigne des énergies fossiles et notamment du gaz pour ce qui concerne la chaleur", note Bruno Brongniart, vice-président de la CCHF, responsable du centre aquatique intercommunal de Wormhout et du réseau de chaleur, qui a repris le dossier en main en 2020 après le départ de son prédécesseur, Michel Delforge.
A l'origine, un projet de méthanisation
Au départ, il n'est pas question d'anas de lin. "On s'est lancé dans la recherche avec l'assistance d'une maîtrise d'ouvrage et on est partis sur la méthanisation à la base", poursuit-il. La CCHF rencontre alors des agriculteurs pour travailler sur ce programme de méthanisation à proximité. Mais le courant ne passe pas car ils ne voient pas la maitrise du projet de la même façon.
André Figoureux, ancien exploitant agriculteur et éleveur, commence à réfléchir aux anas de lin, une suggestion de Bertrand de Cock, président du syndicat professionnel des teilleurs de lin, au cours d'une rencontre en 2017. "Très vite, on s'est aperçu que la valeur de chauffage des anas de lin étaient très élevée, plus que le bois par exemple", ajoute Bruno Brongniart.
La Communauté de communes lance alors des consultations "et il s'est trouvé qu'Engie avait deux chaudières aux anas de lin qui fonctionnaient déjà : une dans l'Oise et l'autre en Normandie, il y avait déjà une histoire et une référence". Après des études, "la conclusion a démontré que l'ana de lin était la solution au niveau économique et durable", note Bertrand de Cock. Elle entre alors dans le cahier des charges de la chaufferie de ce centre aquatique.
En somme, le projet est né il y a quelques années, aux alentours de 2017 "au stade d'idée" avant de passer à la conception et aux livraisons d'anas de lin, début 2022. Un délai habituel pour un projet de cette ampleur.
Ça marche comment ?
Les anas de lin sont brûlés pour produire l'énergie nécessaire au réseau et au centre aquatique de Wormhout. L'énergie produite est transférée à l'eau qui "circule dans le réseau de chaleur urbain".
Un traitement "multi cyclone élimine les plus grosses particules contenues dans les fumées", un filtre à manches assainie les particules les plus fines. Les fumées, "purifiées selon les normes les plus strictes" sont finalement rejetées dans l'atmosphère.
Les cendres issues de la combustion, quant à elles, sont pour la plupart valorisées en fertilisants agricoles. "Seule une infime quantité retourne au centre de valorisation", détaille la CCHF dans la vidéo ci-dessous.
Innovant, durable et local
Pour Bertrand De Cock et ses collègues, trois éléments clés entourent ce projet : l'innovation, la durabilité et la proximité. L'innovation, car "c'est une des premières fois que l'ana de lin est utilisé comme combustible pour une chaufferie", souligne-t-il. Le projet est également "durable car on est sur un produit renouvelable".
En effet, la culture de lin se fait tous les ans.
Il s'agit aussi d'une "véritable plante zéro déchet" car tout est utilisé dedans, précise l'entreprise Van Robaeyes. Enfin, le côté local est essentiel : "on livre nos anas à 10 à 20 kilomètres de chez nous, tous les partenaires sont à moins de 20 kilomètres de la chaufferie, ça a beaucoup de sens", témoigne Bertrand De Cock. Ce projet permet également, pour Van Robaeyes, de "diversifier les débouchés pour les anas de lin" car c'est un "marché de fibres en croissance".
"Le lin, on le cultive depuis bien longtemps"
En réalité, les anas de lin sont utilisés depuis longtemps "pour la chaufferie, la chaudière, souligne l'entreprise Van Robaeys, partenaire fournisseur de la Communauté de communes des Hauts de Flandre. On utilisait des écoproduits pour faire tourner la machine à vapeur et permettre la production au niveau de l'usine".
Le partenariat s'est fait car "on est à proximité du territoire ou à côté". La CCHF est venu voir plusieurs teilleurs pour assurer un approvisionnement. "C'est local, c'est une matière renouvelable, ça existait par le passé mais avec les technologies actuelles, ils reproduisent un modèle qui existait", souligne-il en ajoutant que "le lin, on le cultive depuis bien longtemps".
"La production sera absorbée à 70% par le centre aquatique"
Bruno Brongniart explique que la production "sera absorbée à 70% par le centre aquatique". La Communauté de communes est actuellement en négociation pour raccorder le réseau à l'EHPAD de Wormhout et à un groupe scolaire. "On est aujourd'hui en contact avec d'autres clients potentiels", parmi lesquels un grand groupe de distribution qui a un projet de se réinstaller "à proximité du réseau de chaleur".
En tout, on compte 1,55 kilomètre de réseau qui permettent une réduction de CO2 de l'ordre de 5930 tonnes et "un taux d'énergies renouvelables de 91,78%". Tout cela permettra une économie de près de 195 000 euros cumulée sur 10 ans. Ce qui explique pourquoi d'autres clients tapent à la porte.
Le lin, une solution d'avenir pour les ménages face aux énergies traditionnelles ?
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