Le maire de Roubaix a-t-il subventionné une association de soutien scolaire accusée de prosélytisme religieux ? Guillaume Delbar était jugé ce vendredi pour "détournement de fonds publics par négligence". La procureure a réclamé huit mois de prison de sursis et trois ans d'inéligibilité à son encontre. Le jugement a été mis en délibéré au 8 juin prochain.
Il n'a fait aucune déclaration à son arrivée au palais de justice de Lille. Guillaume Delbar, maire DVD de Roubaix, était jugé ce vendredi par le tribunal correctionnel pour "détournement de fonds publics par négligence" via des subventions à une association accusée de prosélytisme religieux.
L'affaire a notamment été médiatisée dans un reportage de "Zone Interdite" diffusé sur M6 début 2022. Parmi les témoins de l'émission, Amine Elbahi, un jeune juriste et militant associatif de Roubaix, avait alerté la préfecture du Nord sur l'association AAIR (Ambitions et initiatives pour la réussite), l'accusant de dispenser des "cours coraniques" sous couvert de cours d'arabe.
Il avait aussi écrit un courrier au maire mettant en avant que "plusieurs indices permettent de comprendre que cette association ne respecte pas les valeurs républicaines et le principe de laïcité". Après enquête, la préfecture a indiqué avoir constaté que "des cours d'arabe à caractère cultuel" étaient bien dispensés par l'association.
Une année l'AAIR n'a pas eu de subvention car ils n'avaient pas donné les éléments, on n'est pas négligent, on est exigeant.
Guillaume Delbar, maire DVD de Roubaix, face au tribunal correctionnel de LilleFTV
Face au tribunal correctionnel de Lille cet après-midi, Guillaume Delbar a expliqué avoir mis en place des procédures pour vérifier l'usage de ces subventions : "une année l'AAIR n'a pas eu de subvention car ils n'avaient pas donné les éléments, on n'est pas négligent, on est exigeant", s'est défendu le maire de Roubaix, avant de poursuivre "j'aurais aimé avoir des éléments tangibles sous les yeux, ça a été ma quête tout au long du processus." La procureure a réclamé huit mois de prison de sursis et trois ans d'inéligibilité à son encontre. Le jugement a été mis en délibéré au 8 juin prochain.
Les dirigeants de l'AAIR également jugés
Devant le tribunal comparaissent également trois dirigeants de cette association roubaisienne de soutien scolaire. Son président Nordine Khabzaoui est jugé pour "abus de confiance".
Entendu en début d'après-midi, Nordine Khabzaoui dément tout prosélytisme de la part de l'association. Il explique à la barre : "l'AAIR n'a jamais fait la promotion de la religion en tant que telle. On a aidé des élèves à devenir médecin, pas à devenir imam." "Pourquoi enseignez-vous les méthodes pour bien prier?" lui rétorque le juge . "Ce n'est pas de la langue mais c'est de la culture", lui répond Nordine Khabzaoui.
L'AAIR n'a jamais fait la promotion de la religion en tant que telle. On a aidé des élèves à devenir médecin, pas à devenir imam.
Nordine Khabzaoui, président de l'AAIR, face au tribunal correctionnel de LilleFTV
La préfecture du Nord a refusé de préciser à l'AFP les montants versés à l'AAIR, pour laquelle la région Hauts-de-France dit pour sa part avoir déboursé 1.500 euros en 2018.
Selon la municipalité, l'AAIR devait bénéficier en 2020 de 64.640 euros de subventions, mais l'argent n'a jamais été versé.
Guillaume Delbar a par ailleurs été condamné le 2 décembre 2021 à six mois de prison avec sursis et deux ans d'inéligibilité pour participation à un système frauduleux de défiscalisation via des micro-partis. Il a fait appel de cette décision.
Avec AFP