L'association les Petits Frères des Pauvres a publié son étude sur l'isolement des personnes âgées durant le confinement. A travers le témoignage de Danièle Durieux, une septuagénaire vivant à Tourcoing, se dessine les difficultés rencontrées par ces personnes confrontées à un isolement fort.
Danièle Durieux a soixante-dix ans. Elle vit seule dans son appartement à Tourcoing. Elle est veuve, a perdu un de ses fils et n'a gardé contact qu'avec sa fille qui vit à Arras. Le confinement a accentué son isolement. Elle fait partie des 720 000 personnes âgées en France qui n'ont eu aucun contact avec leur famille durant le confinement selon une étude, publiée ce jeudi 4 juin par l'association des Petits Frères des Pauvres.
"Ma fille ne m'a pas téléphoné. Pendant un moment, j'ai coupé les ponts avec elle. Cela m'a beaucoup manqué, surtout de ne pas avoir de nouvelles de mes deux petits-enfants", déplore-t-elle. Si 91 % des personnes âgées vivant dans les Hauts-de-France ont eu des contacts réguliers avec leur famille, Danièle n'a pas eu cette chance.
Ce sont les membres de l'association des Petits Frères des Pauvres qui lui ont permis de rompre son isolement : "Jean-Michel et Alain sont venus me faire mes courses". Comme 16% des personnes de 60 ans et plus dans les Hauts-de-France, cette Tourquennoise a eu besoin de plus d'aide. "J'ai des problèmes de santé, je suis plus fragile que les autres, donc je dois faire attention."
Des sorties qui continuent à être limitées
La septuagénaire n'est quasiment pas sortie durant le confinement : "Je ne sortais que très tard le soir pour promener mon chien et être sûre qu'il y ait le moins de personnes possibles dans la rue." Avec le déconfinement, elle s'autorise à aller à la pharmacie, mais toujours avec prudence : "Je suis méfiante, car les gens ne respectent rien et jettent leurs masques à terre."
Il est encore inenvisageable pour elle de retrouver le même rythme que celui d'avant le confinement. La peur est bien présente. Danièle Durieux fait partie des 39% des personnes âgées des Hauts-de-France qui disent avoir peur de sortir, selon l'étude des Petits Frères des Pauvres. C'est la région où le pourcentage est le plus important.
"J'ai peur, surtout au retour des grandes vacances, de tous ceux qui vont partir puis revenir, je crains qu'ils ramènent le virus", s'inquiète-t-elle.
Pour ne pas perdre pied durant ce confinement, la Tourquennoise s'est occupée de son intérieur : "J'ai remis de la peinture dans mon salon, j'ai fait du ménage, j'ai tricoté notamment pour les mamans célibataires qui en ont besoin". Cela n'a pas comblé le manque provoqué par l'arrêt des activités de l'association. "Avec les Petits frères, on va à la mer, au théâtre, au cinéma, on fait des chants, il y a de l'animation. On ne s'ennuie pas avec eux. Pour moi, ils font partie de ma famille."
Cet accompagnement bienvenu a compensé l'absence de solidarité que déplore Danièle dans son immeuble. "J'aurais pu mourir, personne ne serait venu pour me secourir. Personne n'est venu me demander si j'avais besoin de quelque chose dans mon voisinage. Je n'avais pas de lien avec eux avant le confinement mais la moindre des choses, c'était de me demander."
Le manque d’empathie ou de sollicitude évoqué par Danièle va à l’encontre de l’étude conduite par les Petits Frères des Pauvres. Les Hauts-de-France s’y révèlent la région où les 60 ans et plus ont constaté la plus forte solidarité envers eux. Ils sont 75% à estimer cela contre 69% au niveau national.
Le déconfinement a quand même apporté son lot de joie pour Danièle. "Coquette", elle a pu retrouver sa coiffeuse et n'attend plus que ce samedi pour revoir ses deux petits-enfants.