Pénurie de soignants : par manque d'infirmiers spécialisés, le bloc opératoire de l'hôpital de Compiègne fonctionne à la moitié de sa capacité

Sur les huit salles de bloc opératoire de l'hôpital de Compiègne, à peine la moitié sont ouvertes tous les jours. En cause : la difficulté de recruter des infirmiers spécialisés.

"C'est une situation de désarroi pour les chirurgiens, pour nous tous, on est malheureux de ne pas pouvoir faire fonctionner notre outil de travail", admet Catherine Latger, directrice du centre hospitalier de Compiègne-Noyon. La moitié des salles de bloc opératoire de son hôpital sont fermées, faute d'infirmiers spécialisés pour assurer les interventions chirurgicales. Non pas à cause d'une vague de démissions ou de suspensions, mais plutôt des "départs naturels" en mutation ou en retraite par exemple qui ne sont pas remplacés, par manque de candidats. 

Prioriser les interventions chirurgicales

"On a sept postes d'infirmiers anesthésistes à pouvoir, et six d'infirmiers de bloc opératoire. Ça représente 30% de personnel manquant. Certains jours on arrive à ouvrir cinq ou six salles grâce aux intérimaires, mais ce n'est pas tout le temps, avec l'effectif qu'on a, nous sommes assurés d'ouvrir seulement trois ou quatre salles."

Alors chaque jour, les chirurgiens établissent un ordre de priorité pour choisir quelles interventions auront lieu et lesquelles seront annulées. Priorité est donnée aux urgences vitales, à la cancérologie et aux interventions pédiatriques. "C'est doublement problématique parce que du fait du Covid, on avait déjà déployé les infirmiers anesthésistes en réanimation, donc on avait déjà déprogrammé des interventions et pris du retard", explique Catherine Latger.

Les listes d'attente s'allongent, et les patients n'ont pas d'autres choix que de prendre leur mal en patience. "C'est embêtant, par exemple en orthopédie, un problème de genou, ce n'est pas une urgence vitale, mais en attendant de se faire opérer les gens ne peuvent pas vivre leur vie normalement, ils ne peuvent pas travailler", regrette-t-elle. 

Un problème d'attractivité partout en France

D'après la directrice, le problème qui se ressent à Compiègne se retrouve dans beaucoup d'hôpitaux publics de France, qui n'attirent pas les candidatures de ces précieux infirmiers spécialisés... et encore moins depuis le début de la crise sanitaire. "On n'a pas eu de nouvelles candidatures en 2020 ni en 2021. On arrive à fonctionner avec des intérimaires mais ça ne peut pas suffire."

Depuis début novembre, des collectifs d'infirmiers anesthésistes essaient d'ailleurs de tirer la sonnette d'alarme sur leur situation. En faisant grève, ils dénoncent leurs salaires trop bas en comparaison de la pénibilité de leur travail et de leur spécialisation. Autant d'arguments qui rebutent les professionnels à s'engager dans l'hôpital public. "Il y a eu des rallonges budgétaires pour mieux les rémunérer, mais ce n'est pas suffisant semble-t-il. Mais ce n'est pas qu'une question d'argent, il y a un problème d'attractivité plus général, estime Catherine Latger. On essaie de communiquer auprès des professionnels pour valoriser ce qui existe et attirer par exemple les Parisiens qui veulent quitter la région parisienne pour aller dans des villes comme les nôtres, où il fait bon vivre, où la vie est moins chère et avec une communauté hospitalière à taille humaine."

Intervention dans les écoles d'infirmiers, cabinets de recrutement, annonces sur les plateformes : la directrice assure multiplier les actions pour attirer des professionnels, sans succès. "La seule lueur d'espoir, c'est qu'un nouveau bloc opératoire doit ouvrir en 2023, avec des meilleurs locaux, et ça va être un élément d'attractivité fort qui peut convaincre certains de revenir à l'hôpital public, parce que ça compte, d'avoir de bonnes conditions de travail."

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