Ce jeudi 23 juillet, une audition plénière sur la gestion de la pandémie dans l'Oise se tenait au sénat. Elle réunissait les acteurs des principales institutions responsables pendant la crise du covid afin d'examiner le rôle de chacune et envisager des améliorations en cas de reprise du virus.
"C'est une audition riche d'enseignements", conclut René-Paul Savary, sénateur de la Marne, après trois heures de discussions, ce jeudi 23 juillet, au palais du Luxembourg. Trois heures pendant lesquels les principaux acteurs de la santé du département de l'Oise ont répondu aux questions de la commission d'évaluation des politiques publiques face aux pandémies.
Face aux sénateurs se sont succédés Étienne Champion, directeur général de l'ARS des Hauts-de-France, Louis Le Franc, préfet de l'Oise, Nadège Lefebvre, présidente du conseil départemental de l'Oise, Marie-Cécile Darmois, directrice de l'hôpital Saint-Lazare de Crépy-en-Valois, Bruno Fortier, maire de Crépy-en-Valois, et Arnaud Fontanet, directeur du département de santé globale à l'Institut Pasteur.
Pas de masques en bout de chaîne
591 : c'est le nombre avancé par Louis Le Franc de personnes décédées du coronavirus dans le département. Des morts auxquels chacun a tenu à rendre hommage avant d'entrer dans le vif du sujet. Car l'Oise est bien le département le plus durement touché par l'épidémie et celui qui enregistrait, le 26 février dernier, la première victime du virus, un enseignant de 60 ans qui vivait à Crépy-en-Valois, "épicentre de la crise médiatique et pandémique", rappelle le préfet.Au bord des larmes, Bruno Fortier a commencé par faire le récit de la crise dans sa commune. "Moi-même malade, j'apprends le 1er mars que je suis positif à cette cochonnerie, rappelle-t-il, et la galère commence dans un engrenage terrible qui se met en route." Il salue l'appui du préfet de l'Oise, "qui a toujours répondu à mes demandes", mais souligne que "des masques, en bout de chaîne, il n'y en avait pas". Pour les médecins libéraux, et pour les infirmières, entre autres.
Même chose pour les ambulanciers, les taxis et les personnels de pompes funèbres. "Il a fallu se démener car les morgues étaient saturées, poursuit l'élue départementale, qui pointe une pénurie de masques dans les premières semaines du mois de mars. On en a finalement trouvé, les entreprises nous en ont donné et on en a acheté." Tout comme à Crépy-en-Valois, où il a fallu s'adapter avec des stocks périmés pour assurer la sécurité des 269 employés de la mairie et des habitants.Tout a été rapidement mis en place pour les hôpitaux, mais pas pour les autres. Nous avions des personnes dans les services d'accompagnement qui lavaient leur masque à l'eau de javel tous les soirs.
"Nous étions les premiers"
Du côté de l'hôpital Saint-Lazare, on se félicite d'avoir toujours pu donner du matériel de protection au personnel et aux résidents. "On a souvent été en flux tendu, explique Marie-Cécile Darmois, mais on n'a jamais manqué." Grâce notamment aux stocks prévus pour les épidémies hivernales, à un réapprovisionnement dès le 26 février et aux dons de la population."Nous étions les premiers, n'aura de cesse de marteler Étienne Champion, de l'ARS des Hauts-de-France, pour expliquer les difficultés rencontrées dans le département. Il ne s'agit pas d'un dysfonctionnement, c'est comme ça. Et d'autres ont pu bénéficier par la suite de notre expérience." Le directeur général rappelle que l'agence de santé a commencé à se préparer le 23 janvier. "Mais avant le 26, nous n'avions pas conscience que le virus circulait dans l'Oise."On a pris notre sort en main dans une forme d'interministérialité locale déconcentrée en s'inscrivant d'emblée dans une logique de complémentarité entre services. Par une analyse fine etablissement par établissement, nous avons déterminé le nombre de jour d'autonomie de chacun en équipements de protection.
Une co-gestion difficile des Ehpad
L'un des problèmes dans la gestion de la pandémie, pointé directement par Nadine Lefebvre et partagé par le directeur de l'ARS : la co-tutelle dans la gestion des Ehpad entre les deux institutions. "Il faut impérativement revoir notre gestion et opérer une meilleure collaboration, moins technocratique et plus liée au terrain", explique la présidente. Étienne Champion se défend rapidement : "La taille de notre structure ne nous permet pas d'être au contact direct du terrain, c'est pourquoi nous travaillons en relais."Bruno Fortier, clot son propos par une remarque, après avoir déploré le "flou terrible" dans lequel les communes ont évolué et le "vaste chantier" pour se procurer des masques. "On a dans toutes les communes un plan de classification des risques majeurs où on retrouve les procédures en cas d'inondation, de feu de forêt, et autres, explique le maire de Crépy-en-Valois. Mais la case pandémie y manque terriblement."
Des pistes d'améliorations, il y en a eu pendant ces trois heures d'audition. "Des situations difficiles mais sources de solutions", conclut René-Paul Savary. Les jours précédents, le sénat s'était réuni en commission similaire pour interroger les acteurs de Guyane et de Mayotte.