L'été est la période propice aux abandons d'animaux de compagnie. Plusieurs associations tirent la sonnette d'alarme et rappellent que l'adoption d'un animal est un engagement pour la vie : il faut donc bien y réfléchir avant de se lancer.
Chiens, chats, lapins, rongeurs, oiseaux... En Picardie, la hausse des abandons d'animaux de compagnie ne faiblit pas pendant l'été. Essayer de joindre certains refuges pour un entretien relève même du parcours du combattant, tant ils sont sollicités durant cette période de l'année.
Ondine Eliot, présidente de l'association de la compagnie des NAC (nouveaux animaux de compagnie) dans l'Oise, qui s'occupe principalement des lapins, des rongeurs, mais aussi des oiseaux, constate cette hausse du chiffre des abandons pendant l'été. "Ce sont des animaux qui sont faciles à abandonner en pleine nature", dans des champs, en forêt, en laissant la cage ouverte. "On voit vite la différence entre un lapin sauvage et domestique", observe-t-elle.
Certains propriétaires se déplacent jusqu'au refuge. Dans ces cas, les bénévoles essaient de "jauger les raisons de l'abandon pour prendre en charge les animaux qui sont les plus prioritaires". Car son refuge ne possède que 35 places en moyenne, et il est toujours complet. Quand le souci est comportemental, Ondine Eliot propose son aide afin de trouver une solution. Pour le lapin, par exemple, il peut s'agir d'un manque d'espace dans le logement ou du fait qu'il ne soit pas encore stérilisé : "on essaie de régler les problèmes de comportement avant".
Le manque d'information
Qu'est-ce qui peut expliquer cette hausse des abandons pendant l'été ? Ondine Eliot pointe du doigt le manque d'information qu'elle estime être "le problème principal". Et tout se passe dès l'achat en animalerie, mal encadré selon elle. "Les personnes achètent deux lapins et ne savent pas qu'ils peuvent se reproduire, ils ne savent pas non plus que cet animal n'est pas fait pour être en cage, ce qui peut mener à un comportement agressif", constate-t-elle.
"Les informations autour des lapins ne sont pas données, les propriétaires sont dépassés, explique Ondine Eliot. Les frais de vétérinaires sont très chers, mais on ne le sait pas quand on le prend en animalerie". Un problème de dents engendre généralement entre 300 et 500 euros de frais d'hospitalisation.
Mais ce n'est pas tout. Les allergies participent à "au moins 50% des abandons" et "la dernière chose, c'est les vacances, il n'y a pas beaucoup d'endroits qui accueillent les lapins pour les vacances donc c'est compliqué de trouver une pension ou des personnes spécialisées" à qui les confier. C'est pourquoi la compagnie des NAC a ouvert une pension pour l'occasion, mais leurs places sont limitées et ils ne peuvent pas "prendre tous les lapins de la région".
"La loi reste bien trop douce"
L'association Règne Animal, basée dans le Val-de-Marne et présente un peu partout en France, n'a pas de refuge et cherche activement des familles d'accueil et des adoptants, notamment dans l'Oise "pour élargir les zones et parce qu'il y a plus de gens qui ont des maisons avec jardins", ce qui est moins le cas en région parisienne, note Carine Demaurey, la présidente.
Elle regrette que la loi reste "bien trop douce" sur les abandons. Le code prévoit 3 ans d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende, mais la sanction n'est pas toujours appliquée. "Il y a aussi beaucoup de maltraitances, on récupère beaucoup d'animaux maltraités, ça nous coûte cher en frais vétérinaires", comme toute adoption hors cadre (c'est-à-dire sans contrat d'adoption), faite fréquement sur Le Bon Coin. "Ce site cause beaucoup de tort, il y a beaucoup d'élevages illégaux", regrette Carine Demaurey.
Si jamais des gens veulent nous aider, on recherche un véhicule utilitaire pour transporter les animaux : soit un don, soit quelqu’un qui peut nous le vendre pour pas trop cher. Et si des gens peuvent nous aider financièrement, ils sont les bienvenus.
Carine Demaurey, présidente de Règne Animal
Comme Ondine Eliot, elle remarque des schémas similaires d'abandon : dans la rue, chez un vétérinaire, dans une poubelle, en forêt et souvent ramenés dans des commissariats par celles et ceux qui les retrouvent. "C'est pour ça qu'on cherche le plus de gens possibles", insiste-t-elle.
Parmi les animaux les plus abandonnés, elle cite les malinois et les staffs. "Les gens n'arrivent pas forcément à s'en occuper et il y a un effet de mode". Beaucoup de personnes vont les adopter sans réfléchir et sans savoir qu'il va falloir s'en occuper tous les jours. "On n'adopte pas un animal sur un coup de tête, il faut pouvoir lui accorder beaucoup de temps", souligne Carine Demaurey.
Réfléchir avant d'adopter
Marie, habitante de Montmacq, dans l'Oise, a adopté un malinois 8 ans plus tôt auprès de Règne Animal. Elle est également famille d'accueil. "Mon conseil, ce serait de réfléchir" avant d'adopter, "de consulter chaque membre de la famille". Selon elle, l'expérience d'accueillir des animaux n'apporte "que du bon, même aux enfants, ça leur apprend que les animaux vivent des choses pas forcément sympas, on doit s'adapter à eux". Et surtout, ne pas oublier : "un animal, c'est pour la vie".
Le rôle de famille d'accueil est d'aider à sociabiliser les animaux qui ont vécu des situations traumatisantes, comme pour les chiens de sécurité ou les chats sauvages. "On est là pour leur faire connaître une vie de famille qu'ils n'ont pas connue auparavant". Attention toutefois à ne pas confondre ce statut avec celui d'adoptant, où l'animal reste à vie au sein de la famille. "En tant que famille d'accueil, il n'y a pas de temporalité, c'est au cas par cas, l'animal reste au sein du foyer jusqu'à adoption", précise Marie.
Avant l'adoption, les associations et refuges tentent de connaître les conditions d'accueil de l'animal : a-t-il un espace dédié dans la maison ? Est-ce que financièrement, les futurs propriétaires peuvent le prendre en charge ? "On ne va pas regarder les comptes, mais on essaie de creuser la question pour savoir si les personnes peuvent assurer les frais de l'animal chez le vétérinaire", souligne Ondine Eliot qui fait également signer, 7 jours avant, un document pour prouver l'aptitude à accueillir un animal.
Ce contrat d'engagement et de connaissance permet de s'assurer, en tant qu'association, mais aussi futur adoptant que la décision n'a pas été prise de façon hâtive. "C'est obligatoire en animalerie, mais ce n'est pas encore totalement respecté. Certains craquent et achètent sans avoir de quoi accueillir", regrette la présidente de la compagnie des NAC.
Si vous souhaitez adopter, il faut vous munir d'une pièce d'identité et d'un justificatif de domicile. "Il faut y ajouter des frais d'adoption à hauteur des frais de santé engagés, précise Ondine Eliot. Pour un rongeur, c'est une trentaine d'euros. Un lapin, c'est entre 100 et 200 euros" car il faut compter le vaccin, la stérilisation ou encore le vermifuge. "Comme ça, le propriétaire a un animal en bonne santé. Et si ce n'est pas le cas, il le sait. Parfois, certains peuvent adopter des animaux âgés et s'il y a un souci de santé, on donne les points à surveiller" ils savent qu'ils auront plus de frais.
"Et s'il pouvait y avoir plus de structures, ce serait beaucoup plus simple à gérer. On n'est pas assez nombreux par rapport au nombre d'abandons", conclut-elle. Selon l'Observatoire de la protection des carnivores domestiques (OCAD), le nombre d'animaux pris en charge par les fourrières et les refuges, qu'ils soient ou non abandonnés, ne baisse pas et reste de l'ordre de 200 000 animaux par an en France.