Arras : "Vive le Roi ! Vive les nobles !", l'histoire du perroquet anti-révolutionnaire qui a condamné sa famille à mort

En 1793, le perroquet Jacot provoque l'exécution de tout son foyer, en criant des slogans contre la Révolution française depuis sa fenêtre d'une rue d'Arras. Exhumée par le compte twitter Curiosités Juridiques, l'affaire est à la fois une pépite juridique, et le symbole de toute une période.

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C'est une pépite comme il en existe beaucoup dans l'Histoire de France, mise à la Une ce 24 juillet par le compte twitter Curiosités Juridiques, suivi par plus de 298 600 personnes et auteur de la Revue du droit insolite, éditée chez Enrick B. Editions. Le compte twitter résume, souvent en citant les uniques lignes du verdict, des procès significatifs, importants ou tout déroutants. C'est le cas de la petite histoire du jour, venue d'Arras : "Sont condamnés à avoir la tête coupée, les propriétaires du perroquet qui continue de hurler : "Vive le Roi ! Vive les nobles !" pendant la Révolution française."

Une famille qui se fait discrète, un perroquet trop bavard

Ce verdict et son histoire ont été rendus publics par les archives départementales du Pas-de-Calais. Le perroquet anti-révolutionnaire s'appelle Jacot, acheté aux Pays-Bas par le marquis Louis-Auguste de La Viefville lorsque sa fille était enfant, et il est devenu l'animal de compagnie de toute la famille. Né en 1723 à Steenvorde, dans le Nord, le marquis de La Viefville est issue d'une famille noble de longue lignée, et va marier sa fille Isabelle à son cousin germain, Eugène de Béthune-Saint-Venant, qui possède notamment un hôtel à Arras. Veuf, le marquis y fait de fréquents allers-retours.

Mais "au printemps 1792, La Viefville abrège plus rapidement qu’à son habitude son séjour arrageois. La ville est gagnée par le climat révolutionnaire qui commence à se propager [en France]" après la prise de la Bastille, racontent les archives départementales. Le marquis se réfugie sur en Belgique mais fait fréquemment des allers et retours dans la commune frontalière de Poperinge, pour visiter sa fille enceinte. Mais son mari, Eugène de Béthunes, lui, a choisi de ne plus mettre les pieds en France, ce qui lui vaut une inscription officielle sur la liste des "émigrés", ces nobles hostiles à la Révolution. Leurs liens familiaux avec Eugène de Béthunes vaut au marquis de ViefVille et à sa fille d'être arrêtés, en août 1793. Le reste de la famille de ViefVille et leurs domestiques décide de retourner s'établir à Arras.

C'est là seulement qu'intervient le perroquet Jacot. "De retour à Arras, Jacot retrouve son perchoir près d’une fenêtre de l’hôtel rue du Saumon. Comme par le passé, il amuse les passants en lançant des : "Vive l’empereur ! Vive le roi ! Vive nos prêtres ! Vivent les nobles !". Mais ce discours ne plaît pas à tout le monde", soulignent les archives du Pas-de-Calais. Le 16 avril 1794, les deux domestiques de la famille, Marguerite Farinaux et Caroline Pitre, sont arrêtées. Le perroquet lui, va être interrogé par le commissaire chargé de l'affaire. 

Les de La FiefVille, victimes de la Terreur

Le marquis de FiefVille, sa fille et leurs deux domestiques sont finalement officiellement accusés de trahison envers la patrie "et d'avoir cherché à provoquer le rétablissement de la royauté (...) ayant instruit et conservé très soigneusement un perroquet" qui répète des slogans anti-révolutionnaires. Seule Caroline Pitre échappera à la peine capitale, les trois autres accusés seront exécutés le soir même, place de la Révolution. Le sort de Jacot, lui, est resté incertain. Il aurait finalement été confié à une autre famille en charge de lui donner une "éducation républicaine".

Si l'affaire prête aujourd'hui à rire par son absurdité, elle est très représentative de la période de la Terreur, une politique de répression de tous ceux "qui n’ont pas constamment manifesté leur attachement à la Révolution", notamment via un texte appelé la Loi des suspects. On estime que cette politique de procés et exécutions arbitraires aurait fait jusqu'à 40 000 morts entre 1793 et 1794, dont au moins 550 dans le Nord.

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