En novembre 2023 et janvier 2024, le Pas-de-Calais a subi des inondations historiques impactant des dizaines de milliers d'habitants. Pourtant, le Béthunois, qui avait été inondé en 2016 notamment, a été épargné. Grâce à des solutions mises en place en amont. Alors comment l'agglo s'est-elle protégée de l'eau ? Ses solutions sont-elles adaptables à tout le département ? Éléments de réponse.
La centaine de communes, soit 280 000 habitants, de l'agglomération du Béthunois, qui gère 640 km de cours d'eau, affiche sa volonté d'adapter son territoire aux effets du changement climatique.
Gabriel Attal, en tant que Premier ministre a consacré son premier déplacement aux sinistrés du Pas-de-Calais le 9 janvier et promis de faciliter l'action locale pour se protéger de l'eau.
Reportage dans le Béthunois où une taxe a été mise en place pour mieux aménager les cours d'eau (des retenues en amont et des curages en aval). Par la voix de son président, Olivier Gacquerre, également maire (UDI) de Béthune, l'agglomération ne se voit pas comme un exemple et veut rester très humble par rapport à la lutte contre l'eau mais estime que les pluies stationnaires de novembre (représentant 6 mois de précipitations) et de janvier 2024 demandent une réaction conséquente.
Au sud-ouest de Béthune, sur la Lawe, affluent de la Lys dont le cours va du sud vers le nord, un vannage automatisé est de nouveau opérationnel depuis un an... Lors des dernières inondations, il a parfaitement joué son rôle : retenir en amont l'eau, pour éviter les inondations des communes en aval.
"Quand la rivière de la Lawe est montée fortement avec les coups d'eau, ce vannage a été manœuvré pour stocker environ 50 000 m3 d'eau en amont", assure Yannis Delgery, responsable de la lutte contre les inondations à la communauté d'agglomération de Béthune Bruay, Artois Lys Romane.
Plus loin, une digue, également renforcée, a permis elle aussi de contenir l'eau, un investissement payant pour les communes de l'agglomération de Béthune-Bruay situées en aval.
Gérard Ogiez, maire (SE) de Fouquereuil, explique que cet hiver 2023-2024, sa commune a été protégée. "L'eau est montée au niveau de 2016, seulement, on n'a pas eu les pieds dans l'eau". En juin 2016 en effet, le secteur avait subi de graves inondations, ce qui a poussé les élus à agir. Et pour cause, la communauté d'agglomération a enregistré 608 arrêtés de catastrophe naturelle depuis 1982.
Du coup, à la communauté d'agglomération Béthune - Bruay, Artois Lys Romane, un impôt spécial a été mis en place, ce qui a augmenté la taxe foncière mais permis de constituer un budget de 8 millions d'euros par an d'investissement.
Avec cet argent, une vaste zone d'expansion de crue a pu être réalisée sur la commune de Gosnay. Elle aussi, s'est révélée efficace. "En 2016, on avait eu une trentaine de maisons inondées avec 80 cm ou 1 mètre d'eau. Cette année, à part quelques garages ou sous-sols ou on a eu un peu d'eau, les habitations ont été épargnées", assure Virginie Souilliart, maire (SE) de Gosnay.
Dans certains cas, on a eu des endroits où on n'a pas pu intervenir ou quand on intervient on est punis parce qu'on n'a pas respecté le calendrier. Il faudrait qu'on soit libérés un peu de ce carcan
Olivier Gacquerre, maire (UDI) de Béthune
Si l'agglomération de Béthune-Bruay a prévu d'investir 100 millions d'euros sur 10 ans pour entretenir et aménager ses cours d'eau, elle demande aujourd'hui à l'Etat d'être un facilitateur : "On répond à beaucoup de normes, notamment parce qu'on respecte la biodiversité. Mais souvent ça demande des délais d'instruction très longs. Trop longs. Dans certains cas, on a eu des endroits où on n'a pas pu intervenir ou quand on intervient on est punis parce qu'on n'a pas respecté le calendrier. Il faudrait qu'on soit libérés un peu de ce carcan", demande Olivier Gacquerre, maire (UDI) de Béthune et président de la communauté d'agglomération qui apparaît rassuré après la visite de Gabriel Attal, mais qui prend aussi en exemple la possibilité de se retrouver au tribunal administratif quand il veut saisir des terres pour réaliser une zone d'expansion des crues...
Par ailleurs, un travail important est également mené en aval sur les fossés, comme à La Couture où le maire (PS) Raymond Gaquère estime "qu'il faut redonner à la nature les capacités qu'elle n'a plus. Parce qu'on a tout oublié, on a permis des constructions partout et c'est un non-sens".
Dans ce secteur de La Couture, 800 km de fossés vont être reprofilés et nettoyés sur une douzaine de communes.
Avec Yann Fossurier, Frédérik Giltay et Rémy Maucort / FranceTélévisions